Très amusante et en photos, une étude du Vogue UK porte sur les couleurs des vêtements de la reine Elisabeth II. A 29%, son altesse privilégie le bleu (couleur préférée des Occidentaux), 11% de vert (esprit campagne et écolo), 11% de blanc (simplicité tarte à la crème), 10% de rose (au pays de Barbara Cartland), 10% de mauve (violet bishop), 4% de rouge (trop violent), 4% orange, 4% jaune, 2% noir (occasions très solennelles), 1% beige, 1% carreaux (sans doute à bas le moral en tartan) ; sans oublier 13% d’imprimés à fleurs (so cute gardens). Un véritable cahier de tendances royales d’une reine qui ose les couleurs arc-en-ciel. L’étude porte sur douze mois de sorties publiques, la plupart avec les chapeaux assortis quasi à l’identique.
D’un point de vue purement pratique, il paraît que les ourlets de la reine sont plombés pour éviter un envol de jupe façon Marilyn et que les épaulettes trichent un peu ; quant aux chaussures, elles seraient un peu portées au préalable pour les assouplir… Créateur des chaussures pour le couronnement de la reine en 1952, Roger Vivier racontait que l’un des paramètres majeurs avait été le confort en raison de l’important poids de la couronne.
Reine de la mode anglaise, Vivienne Westwood célèbre aussi le jubilé de diamant de la reine Elisabeth II avec une collection capsule Red carpet. La créatrice s’est inspirée de robes portées par la reine dans sa jeunesse ou lors d’événements prestigieux. Le choix de l’imprimé s’est porté sur un motif qu’affectionne particulièrement Vivienne Westwood : le drapeau anglais ou familièrement Union Jack. Le tissu, double georgette, est retravaillé façon sequins dans des vêtements drapés.
De Beers célèbre le jubilé de la reine avec une couronne de diamants exposée chez Harrod’s. La couronne talisman s’orne de 974 diamants, 797 polis et 177 bruts autour d’une pierre centrale de 73 carats.
Chez Harrod’s, les créateurs de mode ont eux aussi imaginé des couronnes en hommage au jubilé : Lanvin, Paul Smith…
Pour célébrer plus simplement le jubilé, il suffit d’acheter un mug ou une théière. Il est aussi possible de séjourner dans la « Sandringham Room », sorte de chambre mausolée composée par une collectionneuse, Margaret Tyler (sur wimdu.fr), kitsch assuré.
Au Berkeley le tea time sera exquis avec des gâteaux qui reproduisent des accessoires portés par la famille royale et peut-être en compagnie du chapelier fou. Au menu de ce « Pret-à-Portea » : la couronne de 1952, un chapeau typique à fleurs et le bibi « cadre » créé par Philip Treacy pour la princesse Béatrice au dernier Royal Wedding et qui fit les choux gras des pages people (jusqu’au 9 juin).
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Un portemanteau, quelques points de couleurs en guise de patère, l’objet se révèle propice à tous les accrochages… Signé Le Corbusier. Dans les années 60 et 70, il était de bon ton de mettre les problèmes d’urbanisme sur le dos du Corbu. Aujourd’hui, si sa vision de la cité ne suscite pas toujours l‘enthousiasme, l’architecte a au moins tenté un modèle de vie, une utopie pour les collectivités avec des préoccupations de fonctionnalité, de praticité, d’espaces verts… Ses bâtiments, quant à eux, demeurent des jalons dans l’histoire de l’architecture. Son ouvrage, la Charte d’Athènes (1933) ou ses tentatives de mise à une échelle humaine des dimensions avec le Modulor (1945), fusion entre module et nombre d’or demeurent. Modulors 1/2/3 au théâtre (Rond Point notamment) remet en scène le « C’est la faute à Corbu » autour d’un échange épistolaire entre deux architectes avec des « Modulors » posant Le Corbu au centre de la problématique des grands ensembles. Un récent incendie dans la Cité radieuse a aussi remis Le Corbusier dans le feu de l’actualité. L’oeuvre du Corbusier ne cesse d’innerver le XXIè siècle.
Au Bon marché s’ouvre une exposition du cabanon de plage que l’architecte s’était bâti à Roquebrune en 1952. Cassina a reproduit le cabanon à l’identique. Exquis lieu de vie de vacances malgré sa petite surface (16 mètres carré au sol), la cabane est équipée de l’essentiel, élégance, simplicité et praticité, un module et modèle de vie. Le Corbusier racontait : « Ces plans, (les miens) ont été faits en 3/4 d’heure. Ils sont définitifs ; rien n’a été changé ; grâce au modulor, la sécurité de la démarche fut totale. » Lieu en mutation, le mur devient table, le lit offre des rangements… Le cabanon permet la mise en situation de pièces de mobilier qui sont aussi rééditées ainsi le portemanteau, la table avec rayonnages incorporés et les tabourets.
Toujours d’actualité Le Corbu.
Au Bon Marché. Le cabanon à l’étage design et une exposition de dessins sur la passerelle, jusqu’au 23 juin.
C FLC-ADAGP-OMG
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Du Soleil levant s’exposent aujourd’hui à Paris d’extraordinaires kimonos, costumes du théâtre le plus spectaculaire, le plus coloré de l’archipel : le kabuki.
A la fin du XVIè siècle Izumo no Okuni, une femme, invente un style de danse « de manière extravertie et suggestive ». Kabuki féminin, mais aussi kabuki des prostituées, le style sera interdit au Japon en 1629 et remplacé par de jeunes hommes, mais sera aussi interdit avant de prendre sa forme actuelle avec des comédiens hommes adultes. L’étymologie des idéogrammes associe chant, danse et jeu de scène à ce spectacle.
Chef d’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité, le kabuki est désormais classé (depuis 2005) au patrimoine culturel de l’Unesco. La fondation Yves Saint Laurent rend hommage à ces costumes avec les pièces de la Shôchiku Costume Co. qui a rassemblé pièces historiques et créations contemporaines.
En préface, Robert Wilson pose l’attention entre les similarités qu’il y eut au départ (sans être une influence puisqu’il ne connaissait pas le kabuki) entre son travail sur Le Regard du sourd en 1971 et le monde du théâtre japonais. « Parmi les choses qui ont réellement eu une influence sur moi il y a bien sûr le fait de changer de décor devant le public, l’habillage et le déshabillage sur scène, et le retrait des accessoires par des gens vêtus de noir censés être invisibles. J’ai été fasciné par la superposition des costumes les uns sur les autres, et par l’accessoiriste qui retirait le premier costume de l’acteur sous le regard des spectateurs. » Depuis Bob Wilson a tissé des liens avec des acteurs de kabuki dont Bandô Tamasaburô V. Ce monde de conventions très claires dans le théâtre japonais a trouvé un écho chez le metteur en scène.
Vêtement de forme très épurée, le kimono varie légèrement sur la longueur des manches (les manches longues des furisode sont des modèles pour jeunes filles, ainsi le personnage de Fuji Musume (jeune fille aux glycines), mais sinon, c’est tout le détail des broderies, la complexité des teintures qui lui donnent sa richesse. Au XVIIIe les vêtements du kabuki tombèrent aussi sous le coup de lois somptuaires et les modèles se simplifièrent avec du coton brodé. Les vêtements ne devaient pas trop imiter la qualité des tenues des nobles. Tout un jeu d’astuces, d’exagération de motifs a compensé les interdictions.
La variété des motifs donne aussi à voir la nature telle que les Japonais la représentait avec ses symboles et aussi les événements historiques qui ont été utilisés en guise d’inspiration du théâtre kabuki. Autour des kimonos sont présentés des accessoires (ombrelles, getas, éventails) et des estampes.
Sur l’exposition plane la délicieuse ombre du japonisme quand les Européens ont découvert les estampes et les kimonos notamment chez Bing à la fin du XIXè siècle. Les artistes post-impressionnistes furent influencés par les cadrages des estampes, les motifs. En mode, le japonisme a régulièrement des résurgences chez les créateurs : Yves Saint Laurent, John Galliano, Cacharel, Alexandre Mc Queen,… ou encore Yohji Yamamoto.
A l’origine vêtement de papier, Kamiko symbolise l’état de pauvreté qui a touché le héros dont le vêtement est constitué de lettres d’amour calligraphiées (en bandes de washi). Aujourd’hui le motif de fragments calligraphiés est repris, mais le modèle est réalisé sur de la soie. Modèle des années 80.
Costume de cour, ce modèle incarne un vêtement de la période de Heian dans une pièce inspirée du Genji Monogatari (importante oeuvre du XIè siècle écrite par une femme). L’inspiration du Genji est arrivée tardivement sur la scène du kabuki en raison des lois somptuaires (trois pièces dans les années 1950). Modèle à motifs de fleurs et dragons des années 90.
Kamakura Gongoro Kagemasa de la pièce Shibaraku, costume du guerrier courageux qui intervient pour empêcher une exécution. Des couleurs sobres, mais une forme arrondie et un décor d’armoiries. Années 80.
Dans la pièce Shibaraku également un personnage de grotesque, Kashima Nyudo Shinsai avec un magnifique poulpe et des coquillages (modèle des années 80). Le poulpe est un élément important de la culture culinaire et humoristique du Japon ainsi l’Oodako de Dragonball ou encore un des personnages de L’été de Kikujiro de Kitano surgissant de l’eau, coiffé d’un poulpe.
Motif de pins sous la neige avec un faucon, l’hiver japonais dans sa splendeur, modèle des années 40.
Fondation Pierre Bergé Yves saint Laurent Jusqu’au 15 juillet
Photos Shôchiku Costume C° et Luc castel.
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Passerelle entre art et mode, l’exposition Helmut Newton est l’occasion de la réédition d’un tee-shirt à imprimé photographique de Comme des garçons. Limitée à 400 exemplaires, l’édition est proposée par la Réunion des Musées nationaux. Sur fond noir se dessine le visage au contour déformé et à la bouche surlignée d’un trait rouge, originale bavure anarchique.
Au fil des ans, Rei Kawakubo a multiplié les rencontres avec des artistes pour des éditions d’objets, de vêtements ou encore lors d’expositions dans la boutique de Tokyo.
En 1990 y ont été montrées les réalisations de Line Vautrin. Après avoir travaillé très brièvement (quelques jours !) pour Schiaparelli, Line Vautrin a créé des collections de bijoux, des miroirs (dans les années 50), des rébus, en utilisant de précieux matériaux, mais aussi le talosel (sorte de résine).
Pour le dernier parfum Comme des garçons (il n’a pas de nom), Katerina Jebb a réalisé une vidéo mettant en scène des étendues d’eau et le flacon tourbillonnant.
Fin 2011 Comme des garçons rendait hommage à Keith Haring avec une série de pulls reprenant des motifs de ses petites silhouettes dessinées en blanc sur fond noir.
En 1997, Alison Berger réalisa une installation de verres, un hommage à Giacometti et ses cages et écho au travail de Rei Kawakubo.
Art et mode, un beau mariage.
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Avec un univers poétique, original, Christophe Coppens créait des accessoires et surtout des chapeaux depuis 20 ans. Dans un univers de plus en plus dur pour les indépendants et surtout pour la vraie création, Christophe Coppens a choisi de jetter l’éponge juste au moment où, Rue Saint Honoré, était annoncée l’ouverture prochaine de sa première boutique parisienne.
Il publie dans Le Soir et sur sa page Facebook une lettre :
« A la veille de l’ouverture de ma boutique à Paris et malgré une nouvelle augmentation de capital en juin dernier, je choisis d’arrêter toutes mes activités de créateur et de déposer le bilan de ma société.
Parce que cela suffit ».
… « C’est difficile depuis 21 ans. Cela l’a toujours été, mais c’était de l’ordre du possible. Aujourd’hui, cela ne l’est plus, c’est devenu inhumain. … »
Chaque maillon de la chaîne se débat dans cette crise économique : les banques ne jouent plus leur rôle de banques, les fabricants tentent de survivre, ne peuvent plus prendre de risque et demandent dès lors d’être payés à 100% avant livraison.
…
« Mes idées sont autrement différentes que ce que le marché demande.
Les boutiques préfèrent des accessoires moins coûteux, des gimmicks ou tout ce qui ressemble à la hype du moment. Je ne propose rien de tout cela dans mes collections.
…
C’est un cercle infernal que je ne parviendrai pas à briser.
Mon dilemme entre mode et art est aujourd’hui à son paroxysme. Je suis totalement perdu, tiraillé sans cesse entre ce qui est et devrait être.
.. Ma décision est lourde de conséquences, à tous les niveaux et d’abord envers ceux qui ont toujours cru en moi –mes collaborateurs fidèles, mes fournisseurs, mes clients, mes partenaires financiers.
La déconstruction es totale ».
S’il est triste de voir la disparition d’un créateur de talent, la décision de Christophe Coppens est malheureusement une des conséquences du monde impitoyable de la mode aujourd’hui et le reflet d’un nivellement par le bas que l’on rencontre dans de nombreux secteurs : télévision, magazines féminins… Satisfaire un grand nombre avec des propositions consensuelles, voire racoleuses (un modèle acquiert de l’intérêt s’il passe par la case people), faire de l’audience, du chiffre…
Où est aujourd’hui la place pour la création en mode ?
Elle est de plus en plus réduite. Il faut remplir les cases de la rentabilité, des ventes, du succès rapide…
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