Identité Nationale et Extrême-Orient

Credit photo: candidlee

Pour les Français, je suis Français. Rien de plus logique lorsqu’on est né à Paris, éduqué à l’école de la République et nourri aux sandwichs rillettes-cornichons. Parfois je tente de faire valoir ma particularité coréenne. Mon entourage français l’acceptera bien volontiers, mais ponctuera mes revendications coréennes par un : “oui, mais tu restes quand même Français, regarde comment tu descends ton verre de Morgon…” en me resservant un verre de Morgon.

Pour les Coréens, je suis Coréen. Rien de plus logique lorsqu’on a des parents coréens et que par conséquent, du “sang coréen” coule dans mes veines. Parfois je tente de faire valoir ma particularité française. Mon entourage coréen l’acceptera bien volontiers, mais ponctuera mes revendications françaises par un : “oui, mais tu restes quand même un Coréen car ton sang est coréen que tu le veuilles ou non…” en me resservant un verre de Soju.

Cette conception de la nationalité est la même au Japon, dont le Ministre des Affaires étrangères Maehara vient de démissionner pour endosser la responsabilité du financement illégal d’une de ses campagnes électorales. En cause, un financement étranger (interdit par la législation japonaise) d’un montant de 500 euros. Ce don étranger proviendrait d’une connaissance d’enfance du Ministre de nationalité coréenne. Jusque là rien d’anormal même si l’on pourrait penser que vu le montant, ce financement étranger n’a pas dû jouer un rôle majeur dans le déroulement d’élection en question.

Cette “connaissance coréenne” du Ministre est en fait l’un des 670 000 coréens résidant au Japon, et qui représentent aujourd’hui sa plus importante minorité ethnique. Ces Coréens sont ce qui reste des quelques 5,4 millions de Coréens ayant immigré au Japon ou y ayant été enrôlé dans le cadre de travaux forcés, lorsque la Corée était sous occupation japonaise entre 1910 et 1945.

Théoriquement, ces Coréens étaient donc des (sous-)Japonais, qui lors de l’indépendance de la Corée sont subitement devenus des étrangers. Toujours est-il que la plupart ont vécu au Japon une grande partie de leur vie, voire y sont nés pour les générations récentes. D’ailleurs, nombreux sont ceux qui ne parlent même plus la langue coréenne et viennent en Corée pour prendre des cours de langue durant les vacances d’été. Bref la plupart sont aussi Japonais que moi-même je me considère Français, et pourtant ils ne peuvent pas participer normalement à la vie politique du pays où ils résident.

Bien sûr, les Coréens vivant au Japon dénoncent leur situation de citoyens de seconde classe et revendiquent les mêmes droits civiques que les Japonais. Il faut également noter que l’assimilation de cette communauté coréenne à la société japonaise s’accélère, notamment au travers de mariages mixtes. Mais ici, cette récente affaire et le fait que le financement ait été “étranger” ne fait que peu de controverse. Car pour être Japonais ou  Coréen il faut que ses ancêtres le soient.

3 commentaires pour “Identité Nationale et Extrême-Orient”

  1. merci pour cet article , cependant vous laissez entendre que ces Coreens residents au Japon sous statut special n`ont pas acces a la nationalite japonaise.
    Ceci est faux. Ils peuvent a tout moment decider de demander la naturalisation (de plus en plus choisissent cette voie, il n`y a qu`a observer le nombre decroissant des Zainichis).

    La raison pour laquelle un grand nombre de ces Coreens ne font pas cette demande est que le Japon n`aceptant pas la double nationalite, ces Coreens devraient en cas de naturalisation renoncer a leur citoyennete coreenne, ce que semble-t-il tous ne sont pas pres a faire.

  2. Oui vous avez tout à fait raison. Les Zainichis pourraient troquer leurs passeports coréens pour la nationalité japonaise, mais le refusent, notamment les sympathisants du Nord pour qui le Japon est toujours l’axe du Mal au même titre que les US.

    Le problème réside donc plus dans les mentalités et les blessures de l’Histoire que dans la législation japonaise. Mais les choses changent comme vous le dites. Et c’est tant mieux!

  3. Le droit du sang a existé aussi pendant longtemps en europe, dernier pays en date, l’Allemagne, qui n’a reformé sa législation que récemment. On pourrait faire le parallèle des coréens au japon, avec ceux des turc en allemagne.

    D’ailleurs, là aussi l’intégration pose aussi un problème au pays d’origine des migrants, le premier ministre ayant déclaré “Oui à l’intégration, […], mais non à l’assimilation”. Je vous renvoi à l’article sur ce sujet paru sur ce même site, le 5 mars “Le Premier ministre turc ravive le débat allemand sur l’intégration”.

    Les états d’origines préfèrent garder une diaspora, intégrée dans le pays accueillant, qui peut lui servir de relais d’influence politique, diplomatique ou commerciale.

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