Dernière collection de Dai Fujiwara pour Issey Miyake avec qui il a développé l’original concept A-POC. La recherche, l’innovation, mais aussi les mathématiques ont souvent droit de cité dans une mode qui explore son époque pour imaginer le futur. En préambule au défilé, des personnes, de noir vêtues (à la façon des kuroko du théâtre japonais, mais à visage découvert) ont plié des bandes de papier en zig-zag et les ont transformé en vêtements.
Pliage, plissage, des thèmes chers à l’univers Miyake. La maison explique également de nouvelles préoccupations : « Ce principe de création permet de limiter les chutes de tissu, ce qui répond à notre souci constant de proposer des produits « éco-raisonnables ». » L’inspiration se poursuit aussi avec un imprimé chevrons qui se métamorphose en tulipe, « comme dans le gravures de M.C. Escher où les poissons se métamorphosent en oiseaux ». la géométrie est là, en trompe l’oeil graphique.
En bande son, des airs de piano aux souvenirs de comptines. La mode est aussi un jeu.
Décidément à part, le duo formé par Inés Kaag et Désirée Heiss a toujours des idées originales et atypiques pour ses présentations ; en parfaite adéquation avec leur mode à la fois conceptuelle et très confortable. Leur style se dessine entre masculin et féminin, entre fonction et fantaisie. La collection N°43 s’intitule Know Howowow (de l’expression « Au-wowow » usitée par les grands-pères en Allemagne pour encourager leurs petits enfants dans leurs oeuvres). Dans une maison parisienne, des groupes de « mannequins » devisent, se promènent, vaquent à leurs occupations, pratiquent la conversation entre amis, grignotent. Ils portent les modèles de la collection. Devant eux des groupes d’étudiants en art les dessinent, réalisent des croquis des modèles. Une façon de « reabstractiser » la collection dit Désirée Heiss. Elle explique que le point de départ d‘une collection classique est souvent le dessin (pas chez Bless) ; pour elles, cette saison, ce sera le point d’arrivée avec leur lookbook de dessins pris sur le vif. Les modèles sont confortables, intimistes avec leurs formes amples, pratiques. A noter les très amusantes chaussures à poils de laine qui pourraient servir à patiner tout en prenant les poussières. Se compose une palette sourde avec des couleurs de l’univers de la chasse, vert loden, camel, rouge sombre, velours vert foncé… Le vêtement pour homme s’écrit dans de belles matières et s’adoucit d’une touche de féminité.
I love Bless.
En attendant les dessins, photos Heinz Peter Knes
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C’est magique ! Fantasque, le couturier indien continue d’insuffler une précieuse touche de couleurs dans le paysage de la mode parisienne. Sa collection débute par un tour de magie. Un prestidigitateur aux allures de Raspoutine pose une cage en fer, y met le feu, la couvre d’un tissu opaque et dévoile le premier modèle.
Le ton est donné à une collection gaie et colorée. En interlude, la femme sera aussi coupée en deux.
Manish Arora a imaginé la garde-robe d’une gitane new age, mais aussi glamour et élégante. La silhouette conserve ses allures structurées en volume avec une base un peu corsetée d’éléments rigides et ses petites épaules marquées.`
Le pliage, façon origami, anime les tenues dont les volumes semblent se déplier. Une inspiration parfois aux allures médiévales télescope un futur imaginaire. Des motifs travaillés avec une artiste berlinoise complètent l’univers de Manish Arora, géométrique, bariolé. Incroyables et multicolores, les broderies sont toujours à l’honneur, sans oublier une touche de doré.
Des armures pour nouvelles amazones en métal travaillé oblitèrent le vêtement.
L’Inde colorée fusionne avec le vêtement occidental dans un improbable futur, délicieux univers manishéen.
Photos Yannis Vlamos
lire le billetBonheur de retrouver Martine Sitbon, elle est chez elle dans ses locaux de la Rue du Mail et nom de sa marque. Reine de la robe, la créatrice l’a imaginée avec fantaisie et géométrie. Plane un esprit art nouveau aux allures de vitrail ainsi qu’un art déco très géométrique. Martine Sitbon a un sens du graphisme et des découpes géométriques qui lui appartiennent. Une maille orange subtilement ajourée.
Un poil de fourrure vient habiller les manches. Une maille douce et confortable. Une très jolie veste kimono joue l’oblique. Des tenues se soulignent d’empiècements de satin (le nouveau noir, c’est le marine, oui !). Tissus laqués, orange dissocié du noir.
A l’aspect graphique s’opposent des touches plus délicates, comme de petites fleurs, mais sans romantisme, précieuses et raffinées.
Fin grillage découpé, assemblages de panneaux ; blanc, noir, gris, presque Kupka en paillettes, tableaux géométriques.
Et puis le graphisme s’adoucit, remonte le temps ; l’art déco s’oublie et les formes ondulent. L’art nouveau s’impose, plus vitrail que nouille. Des cernes soulignent et les motifs se découpent, toujours graphiques. Une belle collection.
lire le billetDepuis plusieurs saisons Felipe Oliveira Baptista est considéré comme un talent prometteur. Sa nomination en tant que directeur artistique de Lacoste le propulse dans une autre galaxie tandis que, sous son nom, son aventure continue. Rigoureuse et construite, sa collection joue de transparence tandis que les détails en paillettes colorées posent un esprit papillon gai et joyeux. Des blousons très structurés, sanglés et avec une touche d’asymétrie dans la fermeture oblique. Les grandes manches en fourrure réchauffent l’allure parfois un peu militaire (kaki) de sa femme à la silhouette de conquérante. Des superpositions de vestes très réussies. Une légèreté vaporeuse avec transparence et volants, mais la géométrie reste maîtresse du jeu.
lire le billetPour son défilé, Dries van Noten imagine un « dialogue entre Ziggy et Diaghilev », le résultat est surprenant d’audace graphique. Le créateur belge ose les rencontres les plus inattendues, les télescopages de styles, de matières dans une collection haute en couleurs. Patchworks, kaléidoscopes, le géométrique dispute la vedette aux motifs floraux. Un imprimé « bonsaï », des influences ethniques avec une inspiration ikat, des motifs années 50 et l’envol de « plumes ». Des rayures zèbres ondulent, Op art sous LSD.
Brocards artisanaux, jacquard de Lyon, soies (twill, shantung…) privilégient les belles matières. Pour les accessoires, une touche de plexi modernise le talon d’une chaussure habillée de couleurs tandis que des détails en carapace de tortue signent sacs et souliers. Toujours remarquable par son sens de la couleur et des mélanges, surtout dans ses inspirations ethniques, Dries van Noten le prouve une fois encore mais dans de multiples registres. Des chevrons, des paillettes et toujours des superpositions.
Un poil de fourrure et des métissages de quatre-cinq tissus différents. Du noir, du gris, du blanc, du bleu et beaucoup de caramel, ocre. Une touche de doré pour l’inspiration baroque.
Un joyeux éclectisme pour raffinement exquis.
lire le billetAvec sa collection d’hiver autour de l’ « Intimité de la lumière », Anne Valérie Hash privilégie une douce féminité. Le détail de ses emmanchures, basses et délicatement travaillées, donnent à la silhouette une jolie décontraction. Si les matières sont légères, fluides, elles croisent aussi sur leur chemin de la laine, des fourrures. Sobre et sourde, la palette décline gris souris, taupe, sable, marine (en guise de noir), beige, vieux rose …
Un imprimé particulier a été imaginé avec le travail d’un artiste : Huang Zhi Yang. Des superpositions, des ouvertures, des effets drapés, du chiffonné, du non finito en bords francs… Et toujours dans le détail, la fantaisie d’un trompe-l’oeil, d’une robe qui se dédouble… Si les modèles sont très travaillés, l’impression qui demeure avec plaisir est celle d’une collection empreinte de douce légèreté.
Marcel Marongiu pour Guy Laroche poursuit la construction d’un univers pour citadine élégante. Une coupe construite et des modèles avec patchwork de découpages géométriques. La maille des pulls compose des tableaux proches d’une nouvelle abstraction géométrique.
De très beaux pulls avec des effets « boules » et des trous anarchiques dans une robe blanc ivoire.
Une touche de fourrure pour l’hiver et des passages de couleurs dont un rouge vif, flamboyant.
Une silhouette à la fois sharp et près du corps, avec séduction.
lire le billetHors calendrier, Guillaume Henry pour Carven avait choisi de présenter au Palais de Tokyo dans une scénographie où les mannequins circulaient de porte en porte. Mise à carreaux du rouge dans des mini-robes, jupes à godets, quelques touches de fourrure. L’allure est très épaulée, mais sans démesure. Si le noir est présent, les tons de moutarde montent au nez, l’ocre est mis, le bordeaux jusqu’à la lie. Des vestes très courtes semblent suspendues sur la silhouette. Robes et jupes boules. Un hommage au style des années 40 et une inspiration militaire dans le choix des couleurs et des matières, fonctionnelles. Un brin rétro, mais revisité avec jeunesse.
lire le billetDepuis 2007 Damir Doma a créé sa marque, sous son nom. Un travail rigoureux et poétique construit une silhouette qui pourrait être intemporelle et se dessine entre le masculin et le féminin avec des formes graphiques aux coupes très travaillées. La collection d’hiver s’inspire du Versailles Unseen de Deborah Turbeville. Des variations autour du blanc et du noir. Chemises amples, petits caleçons de cyclistes. Du près du corps et des formes plus amples. Magnifique long manteau noir.
Un jeu de superpositions de longueurs associe et dissocie blanc et noir.
Détails de matières ajoutées, une finition presque tuxedo, mais en col. Très joli esprit cape, un poil de fourrure, agneau de Mongolie. Sans oublier les coiffes en résille sur queues de cheval et les jolies bouches noir laque.
La délicate austérité se réveille avec les motifs fauve tacheté sur poulain. La couleur s’impose : ocre, marron, cuivre, orange mettent le feu à la palette bichrome.
En détail des bracelets aux souvenirs ethniques ajoutent une touche tribale et donnent encore plus de charme à une collection magnifiquement construite et très réussie.