A la frontière entre mode et design, Maurizio Galante célèbre le rouge, flamboyante couleur de vie et de mort, dans un grand livre qui retrace son parcours, ses créations au fil de ses rencontres, notamment avec des photographes.
Rouge est la couverture, rouge est la tranche qui colore les trois cents pages de « Maurizio Galante Regard transversal Haute couture, Design, Architecture ». Un fac-similé d’une page de dictionnaire passe au rouge les définitions du mot et s’ouvre une riche symbolique. Archétypal, le rouge est dans toute civilisation la première couleur qui s’impose, survenant juste après la distinction entre clair et sombre, blanc et noir.
Ce rouge vif et puissant souvent innerve la mode du couturier. Les modèles se redécouvrent avec des photos de défilés depuis 1992 jusqu’à l’année dernière avec la magie du concert de June Anderson, mannequin unique, en passant par l’exquise présentation à la Fondation Cartier sur des silhouettes de bois à l’échelle 1/5.
S’admirent les pliages origamis, les mille–feuilles de soie, les savantes découpes, les formes enveloppantes, rassurantes mais aussi originales. Serait-ce les volutes d’un champignon ? Une spirale de fougère ? Dans cette mode raffinée, délicatement architecturée, souvent s’exprime le rouge.
S’il est resté fidèle à la mode avec la Haute couture, Maurizio Galante s’exprime aujourd’hui beaucoup dans le secteur du design. La Chaise Valentina C se découvre dans une version rouge où des fleurs de tissu viennent recouvrir sa structure de métal. Au Grand Palais en 2009 Red room, une installation, mit en scène une architecture souple et douce de tissus rouges. Le rouge de 5h (une couleur de cristal propre à Baccarat) a inspiré un magnifique tigre de 2.500 feuilles de tulle, traversant un cercle de verres sur fond rouge. Pour le Mudam au Luxembourg, alors dirigé par Marie-Claude Beaud, Maurizio Galante compose un minestrone solide en cube où s’affiche le rouge de la tomate. S’esquisse l’esprit des couleurs du drapeau italien qui aurait pu inspiré à Roland Barthes une suite de son décryptage des publicités Panzani. Pour Cerruti Balleri Maurizio Galante crée aujourd’hui des poufs, les tatotatoo aux imprimés originaux, poisson (carpe japonaise), lapin, cactus …
Couleur fascinante pour le créateur, elle est « la seule couleur qui contient des messages contradictoires et donc incarne l’équilibre. » C’est avec cette couleur « violente et très tendre » que le créateur a entièrement tapissé de rouge son show-room parisien.
Le livre (HC Editions) réunit des photos de Bill Cunningham, Deborah Turbeville, Javier Vallhonrat, Satoshi Sakusa, Sarah Moon, Tyen, David Bailey, Denis Chapoullié,… autant de talents différents qui proposent chacun différentes lectures de son travail.
Cerise rouge sur le livre, une édition limitée propose, outre des tirages de Sarah Moon et des pages cousues à la main, une réplique d’un boléro miniature en origami de soie rouge.
Talent original, atypique, Maurizio Galante appartient à la famille des créateurs, des artistes, les vrais. En mode, ce ne sont pas aujourd’hui les plus médiatisés.