Identification d’une femme américaine

Le Metropolitan de New York raconte la femme américaine au fil du temps. Tandis qu’elle traverse les décennies, son vêtement habille l’époque, souligne les mouvements sociaux, les comportements, l’évolution des moeurs (l’émancipation). Se dessinent les archétypes d’une féminité en mouvement outre-atlantique, mais avec une mode qui doit encore beaucoup, via la couture, à la France.

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Lucile Brokaw Photo Martin Munkacsi

The heiress. L’exposition débute par les héritières, des femmes encore très ancrées dans l’esprit du XIXè siècle et vêtues de somptueuses robes d’apparat dont un des meilleurs représentants est C.F. Worth, pionnier de la haute couture en France. S’il a joué un rôle majeur dans l’évolution de la mode, la faisant passer de simple artisanat à art, Worth fut aussi le premier à véritablement signer ses créations. La maison a ensuite continué son histoire avec ses fils, Jean-Philippe et Gaston. Ce premier espace dévolu aux héritières a été imaginé comme le souvenir d’une salle de bal.

La Gibson girl. Typiquement américaine, la Gibson girl fait référence à  la personnification de la jeune femme imaginée par l’artiste (illustrateur) Charles Dana Gibson et qui caractérise la fin du XIXè siècle aux Etats-Unis. Si elle est mince, ses formes sont néanmoins encore généreuses tandis que sa taille demeure enserrée dans un corset. Mais le grand air n’est pas loin, souffle le vent des sports avec les maillots de bain, les tenues d’équitation, la bicyclette… La Gibson girl est en mouvement.

The bohemian. Cette nouvelle femme (début 1900) ajoute une touche de fantaisie et d’exotisme à sa façon de s’habiller. La mode s’inspire d’un ailleurs, se source auprès de l’Orient des mille et une nuits, s’évade vers l’Inde, la Chine tandis que le vêtement se libère de ses contraintes physiques et se « lâche ». L’exotisme à la Poiret est plus décontracté, en mouvement, les pantalons des soeurs Callot sont bouffants ; l’Orient inspire. Pour cette nouvelle « bohémienne », le décor rend hommage à un studio façon Louis Comfort Tiffany.

american bohemian

The suffragist/The patriot. La femme participe ensuite à sa propre évolution, elle joue les féministes avec le mouvement des suffragettes qui, s’il est né en Grande-Bretagne, eut un grand retentissement outre-atlantique avec des manifestations notamment dans les rues de New York. Avec la première guerre mondiale, certaines militantes furent d’avis de suspendre hostilités et revendications tandis que d’autres continuèrent le combat. Le style évolue avec une femme qui se rend utile, travaille, se transforme en infirmière… La femme participe désormais plus activement à la vie de la société, moins « vitrine » exposée (même si consentante) des richesses de son époux. Des extraits de films d’actualité montrent la progression de l’émancipation de la femme via ses vêtements à cette époque.

The flapper. Avec le terme flapper qui qualifie la nouvelle femme des années vingt se dessine une gamine un peu ambiguë qui bouscule les codes, aime la musique, danser, boire, fumer…  (l’équivalent de la garçonne en France). Le mot flapper trouve son origine dans le titre d’un film éponyme de 1920 réalisé par Frances Marion avec Olive Thomas. Le style s’illustre par les robes chemises de Patou ou encore des robes du soir brodées de Lanvin ou Molyneux dans un décor de peintures de Tamara de Lempicka. Plus tard, d’autres actrices créèrent des rôles dans la même mouvance : Clara Bow et surtout la remarquable Louise Brooks dont le style particulier fascine encore aujourd’hui. Les années vingt sont magnifiques en style avec la mode du charleston, les robes droites sont souples, faciles à porter mais peuvent encore être somptueuses dans le détail des broderies, des paillettes…

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Robe Jeanne Lanvin                              Louise Brooks Photo ER Richee

The screen siren. Les héroïnes de cinéma, les stars s’habillent avec éclat ; les créations de costumes pour les films sont à leur apogée et leurs créateurs aussi connus (davantage encore aux Etats-unis) que les couturiers. Adrian habille ainsi Jean Harlow dans Dinner at eight de Cukor. Veronica Lake est, elle, habillée par Edith Head dans This gun for hire (Frank Tuttle). Les robes en biais seconde peau (que reprendra plus tard John Galliano) sont incontournables comme celle dessinée par Travis Banton pour Anna May Wong dans Limehouse Blues.

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Travis Banton Robe portée par Anna  May Wong

Passionnante dans son lien avec l’époque, l’exposition du Metropolitan de New York met en scène avec éclat l’évolution du rôle de la femme dans la société. L’exposition du Brooklyn Museum complète l’histoire, mais dans une version plus « couture » et glam sous le titre High Style.

American Woman : Fashioning a National Identity. Metropolitan de New York jusqu’au 15 août.

3 commentaires pour “Identification d’une femme américaine”

  1. […] antigone пишет: Mais le grand air n’est pas loin, souffle le vent des sports avec les maillots de bain, les tenues d’équitation, la bicyclette… La Gibson girl est en mouvement. -The bohemian. Cette nouvelle femme (début 1900) ajoute une touche de … […]

  2. Hello Antigone, j’ai vu l’expo en juin, elle m’interessait tout particulièrement car je viens de terminer une bio de Helena Rubinstein qui sort le 1er octobre chez Grasset et je me suis beaucoup documentée sur l’évolution de la mode et de la beauté des deux côtés de l’Atlantique.

    Cette expo est magnifique et trés bien faite mais elle m’a laissée sur ma faim, je m’attendais à plus d’ampleur et de commentaires.
    Et surtout pourquoi s’arrêter aux années 30? Il y avait vraiment de quoi dire et surtout de quoi faire sur la mode des années de guerre avec Rosie the Riveter et ensuite, bien sûr,les années 60 etc..
    Qu’en penses tu?
    By the way je t’embrasse
    Michèle Fitoussi

  3. Bonjour Michèle
    Tout à fait d’accord avec toi, mais j’ai été ravie de voir une expo pas uniquement mode et qui reliait le vêtement à l’évolution de la femme. Et continuer, bien sûr…
    By the way je t’embrasse aussi
    Antigone

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