En noir est blanc, op et géométrique. Ophélie Klere et François Allary signent leur nouvelle collection avec le même esprit qui les anime. Jeux de rayures, mais aussi d’imprimés photographiques, d’explosion de nuages (atomiques ?) ou de paysages plus calmes, voire bucoliques.
Du satin noir brillant, de sages petits cols claudine se mixtent aux imprimés et encadrements noirs. Allover graphique, maille noire ajourée. Les tissus se dévorent de signes, sigles allant du crâne au smiley en passant par la croix.
Une douceur aux clins d’oeil punk et gothiques.
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Oblitérés d’une résille opaque, les têtes des mannequins du défilé de Josephus Thimister déambulent avec une allure quasi monacale ou moyennageuse. Opposée à la douceur biblique des formes amples, la force guerrière s’amplifie avec les accessoires en cuir, corsets, ceintures, cartouchières… Les modèles se déclinent en une sobre et belle palette : noir, marron, rouille et écru majeur. Des coupes amples, enveloppantes, souvenir de manches kimono, dessinent une mode confortable pour voyageurs intemporels. Un modèle demi-short et demi-jupe longue esquisse une belle asymétrie. Des jeux de drapés. Un côté bords francs, effilochés, une traîne en plissé, des jeux de drapés; le style Thimister.
J’achète : le grand trench blanc avec au dos un pli creux.
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Du soleil levant est venu Commuun. Des formes très géométriques, un travail sur le carré de couleurs qui se délave tout en gardant sa pure géométrie. Des jeux de longueurs, de superpositions, l’opposition entre transparence et opacité se souligne de zips. Une touche de doré, un zeste de vinyle seventies et un imprimé à vol d’oiseaux, très japonais.
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Lauréat de l’Andam, Anthony Vaccarello confirme saison après saison son talent. Sharp et sexy (mais sans vulgarité), sa collection est très structurée. Construites, les coupes sont travaillées dans le détail, notamment la délicate incrustation d‘empiècements de dentelle. Quasi monolithique dans sa perception, la collection se consacre essentiellement à un bleu sombre, nuit profonde. S’ajoute un imprimé noir/blanc et une touche de noir. La silhouette ose le très très court ou alors le short avec des modèles près du corps, féminins en diable.
Des zips visibles, des découpes autour d’une mise en valeur du corps qui se découvre, se dénude. L’audace s’affirme avec une robe ouverte jusqu’à l’aine, dégageant joliment une jambe pour nymphe disco à la cuisse légère.
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Brooke Taylor et Nana Aganovich ont confirmé, avec brio et intelligence, que leur duo faisait partie des nouveaux talents à suivre avec une collection légère, poétique et géométrique.
Exquis, le carton d‘invitation est un des plus beaux (si pas le plus beau avec un gant de Galliano et une boîte à mystère d’Angelo Figus, sweet memories) jamais reçu. Ici un petit châssis façon toile rend hommage à Bacon et au décor de ses portraits. Un nouveau personnage s’inscrit, sa tête reprend l’orb qui signe le travail des créateurs. Une tête de chou, le monde, la technologie, chacun peut se réapproprier la sphère, le globe qui est, chez Aganovich, la transposition en dessin par Clifford Harper (illustrateur et anarchiste britannique) d’une vieille boule de pétanque trouvée sur un marché ! Brooke Taylor explique que l’orb n’a « pas de signification précise sauf que l’on adore les sphères et les cercles. »
Sur le carton argent, en exergue, une phrase de Francis Bacon donne le ton : « If you can talk about it why paint it ».
A l’entrée du défilé (une galerie d’art) une baraque à bacon venue de Londres distribue des sandwiches au bacon. Cette joyeuse transposition dadaïste autour d’un jeu de mot ajoute une cocasse dose d’humour à un univers qui souvent en manque.
Un petit texte donne la clef des inspirations. Le point de départ est Kowloon avec sa cité enclavée entre Chinois et Britanniques. La cité emmurée fut détruite en 1994 pour devenir un parc. S’ajoute la relecture de Au Coeur des ténèbres de Conrad, une sorte de retour au primitivisme. Et enfin Francis Bacon choisi notamment pour sa palette de couleurs très chair.
Le défilé commence par un monologue entre l’artiste et son interviewer (muet). Outrageusement grimé en clown blanc et triste, vêtu d’une salopette éclaboussée de peinture, l’artiste est coiffé d’une perruque de femme de traviole. Ambiguïté des sexes et discours sérieux (voix off du peintre) sur la création et de ce qui l’aide parfois :« drink help me… »
Un ballet de miroirs vient ensuite s’orchestrer sur le podium en cercle, des formes concaves et convexes. Les mannequins vont tourner autour, leurs silhouettes déformées, distordues, sauce Bacon ?
Mais tout ce dispositif ne cannibalise pas l’attention sur la collection, il vient l’enrichir avec intelligence et esthétique.
Le travail sur le puzzle se continue, construction, déconstruction, découpages, superpositions, jeux sur les longueurs, une pointe d’asymétrie. Une matière maîtresse : l’organza, choisi pour sa transparence, ses jeux possibles de cache-cache du corps, s’opposant à l’opacité du satin brillant. La palette est au départ chair, blanche, délicate mais s’accentue de traits rouges, parfois comme des nervures ou alors de grands pans géométriques. Le noir aussi est mis, s’opposant au blanc.
Art + création + style, la mode façon art total.
-Les sièges : chaises pliantes.
-Cadeau Bonus : une petite figurine Pixi avec un effet miroir.
-J’achète : une robe marron avec une pointe d’asymétrie dans la construction et un bras recouvert.
Photos Patrice Stable
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Artiste, mais aussi Toulousain, Damien Aspe a imaginé un original ballon de rugby avec la marque de vêtements Serge Blanco et le fabricant de ballons Gilbert (fournisseur de la coupe du monde). A la lumière du jour, le ballon ovale semble « all black », mais quand la nuit tombe, pas besoin d’être nyctalope, le ballon devient phosphorescent. Un dessin en découpes géométriques, quasi façon latitudes et longitudes d’un monde d’ovalie. Travaillant souvent les nombres, le système binaire, Damien Aspe s’est penché sur une nouvelle géométrie : « Le concept était de revenir au degré zéro du ballon de rugby, en partant du fondement de la 3D informatique, le dessin filaire, qui constitue la structure primaire de tout objet. Le but était de faire apparaître et de mettre en exergue tout ce qui disparaît au moment de la fabrication d’un ballon… Phosphorescent le ballon disparaît dans l’obscurité, mais laisse place à son squelette informatique, c’est-à-dire la structure filaire 3D. »
Une série de 400 exemplaires. P.V. 99€.
www.sergeblanco.com
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Symbole de beauté, de jeunesse, la rose est reine des fleurs. De Ronsard à Gertrude Stein, elle inspire les poètes qui questionnent le temps, l’espace de la vie. Pour Marcel Duchamp, elle se teinte d‘érotisme avec son alter ego de Rrose sélavy (qui figure aussi sur L’Eau de voilette Belle haleine).
Vingt photographes lui rendent aujourd’hui hommage dans l’exposition Rôses By…. orchestrée par Lancôme. La marque de parfums et cosmétiques a pour symbole, depuis ses origines en 1935, la rose. Le sujet, sans doute, intimide, ne prête pas à l’humour ou à la fantaisie débridée. Les photographes (Brigitte Lacombe, Jeff Burton, Josh Olins, Mark Segal, Patrick Demarchelier, Solve Sundsbo, Dominique Issermann, Nick Knight, Jennifer Lund…) ont tous à un moment été liés à Lancôme. Ils ont choisi de magnifier la rose, de lui rendre hommage, à ses pétales, à sa délicatesse exquise et à sa féminité.
Jennifer Lund et “sa” rose
Accompagnée, la rose se pose et oblitère parfois le corps de femme fleur. Poésie et féminité sont les registres privilégiés par les artistes. Eric Maillet a lui imaginé une forme de géométrie de la rose en ses épines. Des éclats de couleurs au sobre noir et blanc, a rose is still a rose.
Rôses by… jusqu’au 22 septembre à Artcurial et ensuite à New York, Beijing.
C Hondodigital pour Lancôme
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Jambes, pieds, chaussures, escarpins participent à la séduction. Déjà Truffaut et aujourd’hui Christophe Honoré leur font la part belle. Dans L’homme qui aimait les femmes, Charles Denner les imagine en robes légères et talons hauts : « Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le monde globe terrestre en tout sens lui donnant son équilibre et son harmonie » tandis que les images de Truffaut s’attardent sur des jambes élancées.
Dans Les Bien-Aimés de Christophe Honoré, les chaussures sont au coeur de l’histoire. Son héroïne jeune (Ludivine Sagnier) travaille dans une boutique de souliers ; son destin bascule avec le port d’un paire de chaussures dérobée. Avec son escarpin à boucle, le modèle « Chiquette », elle se transforme, devient objet de désir et, accessoirement, une « occasionnelle ». Son premier client lui propose : « 50 francs, ça vous va ? ». Sa fille (Chiara Mastroianni) raconte sa vie plus tard : « Maman calculait tous les escarpins qu’elle allait pouvoir s’acheter ».
Dans le film, la jeune vendeuse travaille chez Roger Vivier.
Nom mythique de la chaussure, Roger Vivier a débuté dans les années vingt avec Mistinguett, Joséphine Baker. Pendant la guerre, aux Etats-Unis, il réalisa aussi des chapeaux avec Suzanne (Rému). Véritable inventeur de talons allant des plus extravagants aux plus classiques (l’aiguille en 1954 c’est lui, le virgule, le polichinelle, l’étrave, le choc… ). Il est aussi l’auteur des bottes cuissardes créées pour Yves Saint Laurent qui permirent à Brigitte Bardot de ne reconnaître personne en Harley-Davidson. Pour le couronnement en 1953 de la reine Elisabeth II il racontait que l’un des paramètres les plus importants fut le travail sur la stabilité puisque la couronne de la souveraine était extrêmement lourde. Il créa des chaussures pour les plus grands couturiers : Christian Dior, Yves Saint Laurent…
Dans les années 60 (l’époque où débute le film d’Honoré), il avait effectivement pignon sur rue avec une boutique à son nom. En 1963 sa boutique était rue François 1er et c’est là qu’il lance en 1965 sa chaussure à boucle en métal. Ce type de chaussure est aussi celui que portait Catherine Deneuve dans Belle de jour (1967).
Il s’est ensuite retiré près de Toulouse où il continuait à faire ses collages. A plus de 80 ans il dessinait encore des modèles et fut choisi par Myris pour lancer une collection accessible en 1997.
Aujourd’hui son nom magique a été racheté par le groupe Tod’s. Le président Diego Della Valle a choisi Bruno Frisoni pour relancer la création tandis qu’Inès de la Fressange assure la communication. Une belle endormie désormais réveillée et révélée et qui figure joliment au générique du film.
www.youtube.com/watch?v=i9Fe5ufBzfk
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Présent dans la collection des 100 masques pour le Japon, Daniel Jasiak a imaginé une Maskarade, jouant sur les origines arabes du mot qui s’approche de la notion de « ridicule » et devient tromperie au figuré. Le choix du mot résonne et se dresse en constat. Daniel Jasiak a toujours eu des affinités avec le Japon où il avait lancé il y a quelques années une marque aux réminiscences françaises dans le nom : Pas de Calais et il n’oublie pas l’archipel.
Pour le projet des 100 masques, son travail a débordé le cadre rectangulaire du masque pour en concevoir une accumulation de plusieurs dizaines. Si son œuvre ressemble à un col construit en volume, il n’a qu’une manche et ne peut se porter : « sans issue », explique-t-il.
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Artistes, créateurs de mode, designers ont créé, customisé des masques qui seront exposés et mis en vente le 21 septembre aux Musée des arts décoratifs de Paris. Le but de l’opération est de soutenir Enfants sans frontières KNK Japon, une ONG qui se consacre aux enfants. Les séismes, le tsunami, Fukushima, c’était il y a six mois, mais l’aide demeure encore indispensable au Japon.
Ce petit masque blanc jadis associé à la pollution par ceux qui ne connaissaient pas bien le Japon est utilisé par mesure d’hygiène (ne pas partager ses microbes) et de politesse dans l’archipel.
Les oeuvres seront exposées pendant deux jours les 20 et 21 septembre avant d’être mises aux enchères sous le marteau de Maître Cornette de Saint Cyr.
L’association Asia Mix Culture et le magazine web Minimix a orchestré le projet auquel Shisiedo, le grand groupe japonais de cosmétiques, s’est associé. Mariages frères, Laurent Perrier apportent aussi leur soutien.
Les masques
Les rectangles de tissu blanc, pages vierges d’un nouveau décor, s’attachent avec deux élastiques sur le côté. Reflet du style des artistes, les oeuvres sont personnelles, mais s’inscrivent aussi dans des courants d’inspiration. Beaucoup ont choisi un esprit poétique, une forme de douceur, de gaieté avec notamment le choix de fleurs ; d’autres sont plus graphiques, quelques eux ont osé l’humour mais avec délicatesse.
Le masque de Christian Lacroix (ci-dessus) joue l’ethnicité dans un travail couture.
Le masque de Philippe Starck s’est perforé de deux trous, symbolisant les yeux.
Jean Colonna a surchargé l’objet de fils, de perles, nouvelle amulette porte-bonheur pour conjurer les mauvais sorts ? Son oeuvre a un côté tribal.
Victoire de Castellane a imaginé des rangées de petites fleurs.
Inga Sempé a transformé le masque en lit de cap miniature, écho utilitaire à une situation d’urgence ?
Sonia Rykiel joue la féminité avec l’empreinte d’une bouche cigarette aux lèvres et strass de rigueur ; le superflu, chose nécessaire.
Marithé et François Girbaud ont choisi d’être graphiques et géométriques dans leur dessin qui fait penser à un origami de casque de samouraï.
Adeline André a imaginé un opulent conte floral.
Kuntzel + Deygas ont repris leur dessin de l’ours et la poupée.
Un masque m’a particulièrement touché : celui de Christian Astuguevieille. Entouré de cordelettes tressées (un leitmotiv dans son oeuvre), son masque est un écho précieux aux attaches, aux ligatures qui innervent la culture japonaise que ce soit autour des arbres ou encore le bondage. Surgit aussi le souvenir des rochers de Meoto Iwa non loin d’Isé avec le shimenawa, immense corde de paille de riz tressée unissant deux rochers dans la mer, symboles des deux divinités fondatrices du Japon : Izanagi et Izanami. Il y a quelques mois, juste après le 11 mars, le créateur avait exposé des objets créés pour la porcelaine de Sèvres et avait déjà choisi une présentation en écho à la culture japonaise, une jolie façon de saluer l’archipel et de le soutenir.
Au Musée des Arts décoratifs les 20, 21 septembre.
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