Allo ? Philippe Starck répond présent sur le projet de la Feuille d’eau tout en prolongeant sa collaboration à l’eau de source Saint-Georges. Au-delà du paradoxe, deux belles histoires d’eaux.
En 1998 Philippe Starck signe pour les eaux Saint Georges en Corse des bouteilles extrêmement simples. Un bouchon noir dans l’esprit corse et, mis en évidence, un T passant à l’orange. La prochaine bouteille va encore plus loin dans le minimalisme avec la suppression de l’étiquette, toutes les données indispensables figurant sur le seul bouchon (Starck aurait même rêvé d’un bouchon de liège où, par transparence dans le goulot, auraient pu se lire les mentions légales). Une belle histoire d’eau minérale « qui jaillit du granit » et se corse.
Aujourd’hui, c’est une nouvelle histoire d’eau que signe Philippe Starck avec son implication citoyenne dans le projet « Porteurs d’eau ». Le designer a créé très simplement une bouteille, une « feuille d’eau » que chacun peut à loisir remplir pour mieux comprendre l‘importance de ce « bien commun de l’humanité » qui « n’a pas de prix ». A titre indicatif, la consommation de bouteilles d’eaux minérales en France est de 5 milliards de bouteilles ! Pour soutenir le projet a été conçue une campagne d’affichage avec un visuel photo de Dominique Issermann.
Cette opération autour de l’eau fait songer aux essais en Asie pour lutter contre la surconsommation de baguettes jetables qui participent à la déforestation (en bouleau, peuplier, bambou…) : 25 milliards de paires jetées chaque année au Japon, plus de 60 milliards fabriquées en Chine… Greenpeace a proposé aux Chinois de ne pas jeter les baguettes. Au Japon la campagne « Chacun ses baguettes » a tenté d’inciter chacun(e) à transporter ses couverts au quotidien. Certains fabricants ont même imaginé de nouvelles voies. Mais à quel saint se vouer entre le civisme et la plaisanterie avec le port de baguettes intégré au soutien-gorge, un prototype Triumph !
En France, les feuilles d’eau (flacons en PET recyclable) sont vendues 5 euros dont 2 versés à France Libertés pour soutenir des projets visant à améliorer l’accès à l’eau en Bolivie, au Brésil, en Inde,…
Sur wwwfrance-libertes.fr et dans les boutiques Agnes b.
Design et écolologie font bon ménage.
lire le billetSAperLip0PETTE.
Shanghai, Exposition universelle, la France s’expose. Capitale de la mode, Paris peut-elle se reconnaître dans la salopette bleu, blanc, rouge que portent gentiment les jeunes Chinois qui accueillent les visiteurs ? Béret sur le coin de la tête, il ne manque que la baguette et le litron pour terminer la panoplie de l’image d’Epinal cocorico. Partenaire, Armor Lux s’est inspiré de l’élégance, « héritée de l’histoire maritime française ». Quelques créateurs hexagonaux n’auraient-ils pas pu donner un petit coup de crayon pour échapper au cliché ? L’exercice de l’uniforme n’est sans doute pas simple, seuls les militaires échappent parfois à la caricature où s’engoncent hôtesses d’accueil ou techniciens de surface.
Pour son pavillon, l’Italie n’a pas hésité à choisir une de ses marques les plus connues et très pointue en création. Prada a conçu un tailleur assez strict et classique dans des tons de rose. Une touche de blanc et une pointe de gris en camaïeux pour une deuxième proposition de jupe complètent la tenue.
La Suisse a organisé un concours gagné par de jeunes étudiants de mode (école Head de Genève). L’inspiration mêle le style des costumes traditionnels transposés dans une nouvelle urbanité. Le tout dans le code couleur du drapeau : en rouge et blanc.Pour la tenue des guides, en noir et blanc, l’identité suisse est révélée par la présence d’un semis d’edelweiss sur la chemise !
Weiss&Edel, (blanc et chic) M. Schneuwly et N. Mischler (Design mode, Head Genève)
Brrh chez les Norvégiens avec un uniforme inspiré du confort des anoraks, mais dans un rouge vif en hommage à la Chine. Baptisée +47, la collection reprend la terminologie du code indicatif téléphonique.
Du côté chinois, on est loin de la petite veste Mao. Les bénévoles sont en blanc et vert avec une touche de bleu, tandis que se profile en dessin le monde et la Chine (la grande muraille n’est-elle pas la seule oeuvre humaine qui se distingue depuis l’espace ?) avec pour emblème l’idéogramme du coeur. Pratique, l’uniforme s’adapte au temps avec manches et jambes amovibles.
Le costume du pavillon chinois hybride l’Orient et l’Occident et se démarque du rouge omniprésent (et qui habille le grand pavillon chinois) avec le choix d’un bleu marine. Si les motifs plongent leurs racines dans la richesse de l’écriture et des idéogrammes, la planète n’est pas oubliée avec le choix de matières écologiques.
Si le paquebot (pavillon) France n’est pas désagréable à regarder et les jardins verticaux plaisants, c’est l’espace d’exposition lui-même qui manque de vision globale et se présente presque comme une foire commerciale où les sponsors montrent directement leurs produits (voiture, pneu, valise, cuisine…). Si bien sûr une exposition universelle ne peut s’envisager sans sponsors ; là, ils sont très présents. Dans la partie culture les sept chefs d’oeuvre du Musée d’Orsay semblent presque égarés. L’âge d’airain de Rodin serait devenu L’âge de bronze (une conséquence du voyage ?) ; une chance que l’Angélus de Millet ne soit pas devenu la prière !
L’exubérante forme d’oursin du pavillon de la Grande-Bretagne pique la curiosité. L’idée du lieu est brillante : les 60.000 tiges d’acrylique qui composent l’architecture recèlent des graines, porteuses d’une nature en devenir. Des lumières LED ajoutent de l’éclat. Le lieu se complète par une collection de plantes. Une belle pensée pour la planète et mère nature.
Végétal, le pavillon espagnol est couvert à l’extérieur de panneaux en osier. L’intérieur se découpe en trois espaces mis en scène par trois cinéastes : Bigas Lunas (auteur de Jamon Jamon), Basilo Martin Patino et Isabelle Coixet. Le thème raconte la ville, de celle nos pères à celle de nos enfants. Dans une atmosphère d’Altamira, l’homme primitif s’éveille, danse le flamenco tandis que les taureaux passent et que Rafael Nadal monte au filet. Une deuxième salle orchestre un kaléidoscope d’images, mémoire des villes, d’un pays. Dans la troisième, le temps est remonté jusqu’aux origines de la vie. Le petit Miguelin (Gullivero aurait été bien porté) grassouillet et charmant babille du haut de ses 6,5m de haut.
Pas vu la Belgique, mais merci pour le chocolat offert aux Chinois.
Ancré dans la révolution industrielle, le concept même des expositions universelles a eu du sens à ses origines. Tant que les voyages étaient longs et les technologies de communication balbutiantes, l’événement permettait des découvertes; mais aujourd’hui, avec un oeil occidental, le concept peut sembler un brin désuet. A l’échelle de la Chine qui s’est ouverte, l’exposition universelle de Shanghai a sans doute encore de la pertinence et permet aux Chinois de découvrir d’autres contrées. Mais il faut aussi que chaque pays privilégie la carte de la culture, de la civilisation et ne fasse pas de son pavillon une simple galerie marchande, les « malls » sont là pour ça.
lire le billetSi dans les années 70 mes yeux n’étaient tombés sur les coutures à l’envers de Sonia Rykiel, jamais sans doute je n’aurais regardé la mode avec intérêt. Avec cette idée originale et novatrice, la créatrice de Saint-Germain-des-Prés a ouvert la voie à un style où la femme gagnait en indépendance, plus intello que femme objet. Reine du tricot, Sonia Rykiel a aussi imaginé de laisser les bords vifs, sans ourlets ; elle a ajouté des strass, écrit des mots, des slogans, inventant sa « démode ». Le style Rykiel s’est aussi très vite associé à l’émergence du prêt-à-porter qui allait définitivement détrôner la haute couture en termes de tendances, prescrivant le nouvel air du temps après mai 68. Aujourd’hui encore les défilés Rykiel sont innervés d’une belle énergie tandis que les mannequins rient sur les podiums. Mais Sonia Rykiel, c’est aussi une plume (Et je la voudrais nue, L’envers à l’endroit…) et des dessins. Les femmes (essentiellement) de Sonia Rykiel ont de l’allure ; leur silhouette s’étire, mince, mutine, coquine, drôle… souvent juchée sur des jambes sans fin, « fil de fer ». Une pointe d’humour, un zeste de tendresse, quelques couleurs et le noir, cher à Sonia, dessinent ses filles de papier. Les emblématiques rayures signent l’étoffe de la diablesse qui s’habille en Rykiel. Quelques traits au feutre, un crayonnage de pastels, des silhouettes stylisées, la femme Rykiel s’expose en deux D pour la première fois en deux cents dessins à Saint-Germain-des-Prés.
Jusqu’au 24 juillet. Galerie Catherine Houard 15 Rue Saint-Benoît Paris 75007