Prends ton bob et ta crème solaire

Entre Morzine et Saint-Jean-De-Maurienne, le 13 juillet 2010. REUTERS/Francois Lenoir

Entre Morzine et Saint-Jean-De-Maurienne, le 13 juillet 2010. REUTERS/Francois Lenoir

Cette semaine s’arrête vendredi. En juillet, le premier samedi du mois, c’est plus seulement un film pour Pascal Feindouno, c’est le début d’un nouveau calendrier. Samedi, c’est Tour de France. Plus de dimanche mais des jours de repos – cette année les lundi, des étapes de transition – « je suis libre jusqu’à 16 heures » – ou étapes de montagne «busy de midi à 17h30».

Sur ce blog, on vivra donc à ce rythme, tantôt devant l’écran, tantôt sur la course. On donnera la parole aux acteurs et aux techniciens, ceux qui savent pourquoi un tel n’a pas roulé avec tel autre (le cyclisme est un sport d’équipe), pourquoi le peloton a ralenti à tel moment (le cyclisme est un sport tactique) ou comment on peut être largué un jour et brillant trois semaines plus tard (le cyclisme est parfois déroutant).

On ne va pas tenter de vous vendre le duel entre Alberto Contador et Andy Schleck. Les deux bretteurs sont trop polis pour enlever la mouche, qui permet, dit Wikipedia, « les assauts courtois ». Contador et Schleck s’excusent de s’attaquer et respectent la priorité au sommet du Tourmalet.

On ne va pas non plus se convaincre que cette année, c’est sûr, regardez sa cadence, ses grimaces, le vainqueur du Tour est propre. Le cyclisme est depuis 13 ans dans l’ère du soupçon et n’en sortira plus, ce qui gâche un peu le plaisir.

Parenthèse: c’est un peu de sa faute. Quand on cherche du dopage, on en trouve. Quand on trouve, on en parle. Et quand on ne trouve pas, on en parle aussi. Tout le monde est négatif ? Ce serait la preuve que les tricheurs passent entre les mailles du filet; pas qu’ils sont moins nombreux.

Jeudi dernier, l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) présentait son rapport d’activité. Aux côtés des dirigeants de l’AFLD ont pris place le conseiller scientifique et le responsable de la communication de l’Union cycliste internationale (UCI), mais pas Michel Platini. Ça n’a pas surpris grand monde. Cyclisme et dopage se sont mariés dans les années 90 et il n’y aura pas de divorce par consentement mutuel.

Citons pourtant le président de l’AFLD, Bruno Genevois:

« Le chef de l’Oclaesp, le colonel Thierry Bourret, a dit urbi et orbi qu’aucune discipline n’était à l’abri du dopage. L’Agence mondiale antidopage (AMA) dit que le dopage a davantage cours dans les sports d’endurance et qu’il concerne davantage les hommes que les femmes. On sait enfin que, là où les intérêts économiques et financiers sont importants, c’est quand même une incitation au dopage. Ce sont les trois critères. »

«Mais alors, c’est dans le football qu’il devrait y avoir le plus de dopage!», relançait un collègue. Et le tennis, murmurais-je. Elémentaire. Et pourtant, le soupçon nous effleure rarement lorsque l’on voit jouer Nadal ou Messi. L’inégalité de traitement a eu de quoi indigner le docteur Eufemiano Fuentes (1). Ce tranquille gynécologue espagnol faisait des miracles auprès des cyclistes, on l’a su grâce à l’affaire Puerto. Mais il s’est offusqué qu’on oublie sa contribution au tennis, au football et à l’athlétisme.

Pas d’illusions au sujet des tous meilleurs, donc, mais pas non plus question d’oublier que des mois d’EPO, de clenbutérol et de transfusions autologues ne me feraient pas tenir dix kilomètres dans un peloton. Un docteur plus un fainéant ne feront jamais un champion. Le cyclisme est un sport de masos et les coureurs du Tour de France en bavent. Particulièrement à l’entraînement, lorsqu’il faut se lever à l’aube pour aller rouler avant l’arrivée des fortes chaleurs, ou lorsqu’il faut s’entraîner seul sous la pluie. Perso, quand il pleut fort, je prends le métro.

On peut lire le classement général avec un sourire en coin mais se passionner pour les multiples enjeux du Tour. Lutte pour le maillot jaune, pour les victoires d’étapes – la seule accessible aux coureurs français, pour arriver dans les délais après trois cols hors-catégorie , lutte pour passer à la télé ou pour décrocher un nouveau contrat.

Voilà ce qui rend passionnant le Tour de France, pour ceux qui s’y intéressent. Pour les autres, il reste toujours le plus sûr moyen de faire la sieste en été.

Clément Guillou

(1) : Le magazine Pédale, réalisé par l’équipe de So Foot, tire un portrait très documenté de l’animal. Cinq euros, c’est une pinte de moins mais du bonheur en plus.

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