Il s’est passé quelque chose

Comment ça on s’ennuie la première semaine sur le Tour ? Première étape et paf, plus d’une minute de retard pour Alberto Contador. Le triple vainqueur du Tour, qui n’avait déjà pas envie de venir, s’est fait siffler par le public jeudi et a été pris dans une chute massive lors de cette première étape près de l’arrivée. Il commencera demain une course à handicap sur Andy Schleck. Contador doit se demander dans quelle galère l’a mis son manager, Bjarne Riis. Quant à ce dernier, pointilleux comme il est, il doit enrager de voir son leader pris dans une cassure dans les dix derniers kilomètres.

L’avantage pour l’Espagnol, c’est qu’il ne prendra pas de sitôt le maillot jaune. Il s’évitera ainsi les conférences de presse obligatoires et les affrontements stériles avec une partie des journalistes

Pour la victoire d’étape, Philippe Gilbert a fait, comme on s’y attendait, une démonstration. Le peloton étant une machine à soupçons, il ne doit pas être facile pour lui d’être tellement au-dessus du lot. On est aussi un peu perplexe de voir un coureur si dominateur se teindre les cheveux couleur argent, comme, jadis, Dario Frigo et Richard Virenque, deux symboles du dopage sur le Tour de France. Son conseiller en communication n’a pas dû être consulté.

 

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Et ça continue encore et encore

Cérémonie d'ouverture au Puy du Fou, le 30 juin. REUTERS/Pascal Rossignol Les jours précédant le Tour de France suivent un rituel immuable: entre mardi et jeudi, les coureurs et journalistes arrivent au Grand départ, se rencontrent lors de conférences de presse — artisanales ou à grand spectacle selon l’équipe —, les favoris promettent que ce sera une sacrée bagarre et les newbies ouvrent des yeux écarquillés. Mais surtout, chaque semaine pré-Tour de France a son affaire de dopage.

Des scoops plus ou moins valables et retentissants que des journaux gardent, disent les mauvaises langues, pour les sortir quelques jours avant le Tour. Ça fait le buzz et, au pire, ça anime les deux ou trois premiers jours de course. L’an passé, c’étaient les nouvelles accusations de Floyd Landis contre Lance Armstrong, parues dans le Wall Street Journal la veille du départ. Aussi inattendues qu’un contrôle positif de Riccardo Ricco.

En 2009, la presse prenait ses quartiers à Monaco lorsqu’est tombée la décision du Tribunal arbitral du sport (TAS) de laisser Tom Boonen prendre le départ du Tour contre l’avis des organisateurs, après un contrôle positif à la cocaïne hors compétition. En 2006, la veille du départ, l’affaire Puerto a offert à la salle de presse du départ du Tour ses heures les plus folles, avec l’éviction des principaux favoris, tous clients présumés du docteur Fuentes, et le départ de l’équipe Astana-Würth, qui avait tellement de coureurs cités dans l’affaire qu’elle n’en avait plus assez pour prendre le départ.

Cette année, on fait dans le bas de gamme mais pas forcément dans l’anodin. Ça, on le saura dans de longs mois. Mercredi, la presse flamande a révélé que les douanes belges avaient saisi il y a deux semaines dans un aéroport flamand un colis contenant des doses de TB-500, des hormones peptidiques en provenance d’Australie.

Leur destinataire, Wim Vansevenant, trois fois lanterne rouge de la Grande boucle – ce qui est, sans rire, une vraie performance — a confirmé qu’il avait bien commandé ce produit destiné aux chevaux. Parce qu’il «se sentait vieux» et «voyait son corps dégénérer». Un coureur retraité depuis trois ans a donc commandé en Australie un produit pour les chevaux (ce qui semble assez clair sur ce site), parce qu’il perdait ses muscles à force de regarder la VRT. Pourquoi pas. Les culturistes semblent en être friands eux aussi.

L’affaire tombe mal en tout cas pour l’équipe Omega Pharma-Lotto, où évoluent Philippe Gilbert, le meilleur coureur de l’année, et Jürgen Van den Broeck, cinquième du Tour l’an dernier. Car Vansevenant, s’il n’était pas le plus talentueux, n’était pas le plus discret des coureurs: durant ses six années chez Lotto (2002-2008), il a fait de très nombreux kilomètres en tête du peloton au service de ses leaders. En guise de remerciement, l’équipe l’avait engagé pour assurer ses relations publiques – ce qu’il devait faire pendant le Tour.

Ce matin, les deux mêmes journaux flamands — Het Nieuwsblad et De Standaard — ont sorti une autre affaire.  Les autorités belges ont arrêté lundi un soigneur, destinataire présumé de 195 doses d’EPO interceptées… il y a plus d’un an et demi. Sven, de son prénom, est arrêté à cinq jours du départ du Tour et aurait avoué avoir passé cette commande. Pourquoi ? Pour relancer sa carrière de cycliste. Louable intention, mais était-il nécessaire de commander presque l’équivalent de ce que trimbalait Willy Voet lorsqu’il a été intercepté par les douanes en 1998 ?

La vie est mal faite pour la BMC, l’équipe de Cadel Evans, qui lui avait offert quelques piges la saison dernière et cette saison. Il avait encore accompagné l’équipe il y a deux semaines en Italie.

Pas suffisant pour être connu du manager de l’équipe, Jim Ochowicz, l’un des premiers entraîneurs de Lance Armstrong : «Un soigneur occasionnel pour nous ? Son nom ne me dit rien», a-t-il réagi.

Epilogue (pour l’instant): les deux hommes ont perdu leur colis, leur travail, et la BMC et la Lotto quelques heures de tranquillité précieuse avant le départ du Tour.

Promis, dans les prochains jours, on essaiera de parler de vélo.

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