Tu ne peux pas comprendre.
Ce qui unit un fan de base à Sandy Casar, c’est quelque chose de bizarre. Ce coureur n’est rien, mais il est tout, pour l’amateur de vélo. Ce n’est pas un grimpeur légendaire, du genre à placer une attaque au milieu de la Madeleine ; ce n’est pas un sprinteur, du genre qui te couche un peloton en étant plus gros que les autres ; ce n’est pas un coureur de classiques, à la Philippe Gilbert, tactique, puncheur au bon moment ; ce n’est pas un immense gars qui te met du palmarès plein la vue en te montrant, chargé comme une mule, que c’est le plus fort.
Casar, c’est le vélo, et c’est la France. Il est complet, polyvalent, malin, et surtout, il en veut. Il connait ses limites, les avoue et les montre, mais le surpasse avec talent, quand il le faut. Et souvent, il trébuche, il finit deuxième. C’est pas un souriant, aussi, bogosse du vélo et personal branding. C’est pour ça qu’il est beau, qu’il est comme nous, et qu’il me plait. Il n’est pas plein de morgue, il est plein d’envie, de stress, de peurs face à son sport. En tout cas, c’est ce qu’on lit quand on le voit courir. Et pourtant, il est grand. C’est un coureur sincère, pas faux, et qui sait te faire rêver quand même parce que oui, il gagne.
Même après des gadins.
Mais heureusement, pas aujourd’hui.
Et puis, il est mobile, il s’adapte. En début de Tour, il visait une place au général. Deux étapes, et l’objectif s’éloigne ? Hop, on remonte sur sa selle, et on change d’enjeu. Qui perd gagne. Et peut gagner encore. Une étape, comme celle d’aujourd’hui, c’est la classe, ça reste. Casar est comme nous, quand on est en forme : il rebondit, évolue, change. On aimerait être un français comme lui, plein d’envie, heureux de son taf, dur au mal, sachant économiser quand il faut, comme quand il flanche un peu sur la Madeleine, mais réservant son effort pour ce qui est important.
Faut dire qu’il a du passé, sur le Tour. Cinq fois deuxième, sur des étapes où il fait le boulot, et se fait bêtement moucher à la fin. On l’a déjà dit trop de fois, et trop l’ont raillé, pour ça. Ce n’est pas Poulidor pour autant : il en a moins à son actif, des deuxième, et sa concurrence n’a plus rien à voir. Il fait son boulot. A ceux qui lui promettent un avenir éclatant, quand, en 2002, il éclate sur Paris-Nice, il a répondu par le travail et la propreté, avec Madiot, son patron. Il a tenu sa place, avec envie, mais aussi, on le sent, en sachant que certains niveaux sont hors de portée, et que la gloire est là, dans ces autres choses que le grand classement.
Il est des seizièmes ou des douzièmes du Tour qui sont plus beaux que les patrons, parce qu’ils sont justes. Il est des premiers d’un jour qui font vibrer, grave, parce que leurs bras levés sont le fruit d’une intelligence et d’un style, mais aussi d’une sacrée vérité dans le cyclisme. Une simple vérité qui nous parle.
Bravo Sandy ! Un victoire de plus ! Et merci, tu es le vélo.