Rita, leçon danoise

Je sais pas vous, mais j’ai l’impression que les nordiques seront bientôt la grosse tendance des séries télé (rires). Après The Killing et Borgen, on a peut-être trouvé le prochain beau succès from Copenhague : Rita. Déjà achetée par Canal+ (je la sens bien sur Canal+ Séries, tenue à des quotas européens), déjà remakée aux Etats-Unis par Bravo – mais pas encore diffusée – cette histoire de prof géniale mais immature a quelque chose de plus. Une énergie, une vibration, des personnages attachants, bref, de quoi, en un seul épisode visionné pendant le Festival Série Series – qui se termine ce soir à Fontainebleau – nous donner envie de voir la suite. D’où une petite preview, comme on dit, en attendant des interviews et tout le reste un de ces jours.

Rita (Mille Dinesen, vue dans Borgen, tiens tiens), la petite quarantaine, est prof dans une école de banlieue. Le genre super prof, qui connait tous les élèves, sais canaliser leur énergie, écouter, détendre l’atmosphère, mais aussi dire merde quand il faut dire merde. Le truc, c’est qu’elle dit merde un peu trop souvent. Merde à Rosa, une jeune élève surdouée et sérieusement agaçante, merde à ses parents, merde au principal de l’école – avec qui elle s’envoie en l’air, à l’occasion – merde à la vie en général. Rita est divorcée, a trois enfants ados et jeunes adultes, pourrait avoir tout pour être libre et heureuse, mais va mal. Elle clope, elle picole, elle fait comme tous les gens bien qui ne veulent plus qu’on les aime : elle s’enferme dans son armure, s’amuse, vit, joue, mais refuse de s’engager dans quoi que soit. Rita, c’est l’histoire d’une femme de bon conseil incapable de se donner de bons conseils à elle-même, d’une prof mature cachant une personne immature, d’une figure scolaire maternelle mais piètre mère à la maison. C’est une histoire d’adulescente, d’adulte à la fois pas finie et déjà brisée. Et tout ça est très touchant.

Voilà une série simple, au demeurant sans prétention autre que de raconter une histoire humaine, sans rebondissements ni complexité narrative monstre. On n’évite pas, dans le premier épisode, quelques caricatures, une impression que les profs sont un rien stéréotypés – Rita est quasi une superhéroïne de l’éducation, Sarah Connor des tableaux noirs (le physique de Mille Dinesen, qui a de faux airs de Linda Hamilton, n’y est pas pour rien) et elle est suivie de près par une collègue dépassée, débutante qui rappelle un peu la Zoey des débuts de Nurse Jackie. Pourtant, on sent bien que tout cela va se compliquer, que les personnages ont plus d’épaisseur, et on croit sur parole le créateur de la série, Christian Torpe, invité de Série Series, quand il nous explique que Rita va rapidement perdre son aura de super prof.

Drôle, enlevée, politiquement incorrecte par petites touches, bien aidée par de chouettes dialogues et des acteurs impeccables, Rita dégage cette même conviction, cette même énergie – c’est le mot clef de ce post – qui porte Borgen. Il n’est pas autant question ici d’éducation que de politique dans la série vue sur Arte, mais sans précipitation la narration avance, les personnages rayonnent, sans longueurs. C’est une question de rythme, et un savoir-faire évident pour nous prendre par la main, nous faire adhérer à une histoire. Sans atteindre le brio de Borgen ou la complexité torturée de The Killing, Rita peut assurément entrer dans la liste de ses séries nordiques qu’on citera en disant : « mais pourquoi nous, en France, on n’arrive pas — ou peu — à faire ça ? » D’où vient cette énergie nordique, ce souffle passionné qui perce même dans les œuvres au concept simple comme Rita ? La réponse est infiniment complexe, mais espérons que les plumes françaises sauront un jour la trouver…

Un commentaire pour “Rita, leçon danoise”

  1. Ok ne va quand même pas nous resservir Pause Café !?!

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