C’était difficile de faire pire, mais ça fait plaisir de voir mieux. J’ai beau râler contre The Following, cette mi-saison US est comme attendue bien meilleure que la rentrée. Je ne dis pas que tout est bon, mais l’arrivée du câble dans la bataille fait un bien fou, et promet éventuellement des séries à suivre — ce qui est un peu le but des séries. Nous voici déjà en semaine 3, avec trois nouveautés dont deux étaient attendues de pied ferme, The Americans et surtout House of Cards, la première série produite et réalisée par David Fincher. Do No Harm d’NBC complète le programme. Alors, heureux ?
THE AMERICANS (FX)
Que quoi ça cause. 1981. Phillip et Elizabeth Jennings sont des voisins ricains comme dans les pubs. Ils sont beaux, plein de vitalité, ont deux enfants formidables, une jolie petite maison, et des flingues planqués partout. Ils aiment aller manger des glaces, se balader dans le centre commercial du coin, et kidnapper des agents doubles. Bref, ce sont des Américains modèles, sauf qu’ils sont Soviétiques, et qu’ils sont en mission d’infiltration de longue halène chez l’Oncle Sam. Leur affaire se complique quand un agent du FBI s’installe à côté de chez eux, et que Phillip commence à se dire que l’Amérique, c’est pas si mal…
Comment je la sentais. Sur le pitch, pas mal. Fecility ayant joué un petit rôle dans ma sériephilie, j’étais intrigué de voir ce que Keri Russel ferait dans le rôle d’Elizabeth Jennings. Et puis j’ai vu le pilote en octobre, au MIPCOM, à Cannes, et j’ai été un peu déçu. J’ai trouvé ça trop soft pour du FX, un peu mou, un peu chiant. Du coup, je triche un peu avec le “comment je la sentais”, mais quand j’ai revu ce pilote, je voulais juste m’assurer que je n’étais pas fan…
Ce que je pense du pilote. Et bien, en fin de compte, c’est pas si mal. Keri Russel et Matthew Rhys ne sont pas terriblement convaincants en espions russes infiltrés… mais on peut se dire que c’est justement le but, pour passer inaperçu — si Dolf Lundgren emménageait à côté de chez vous, vous auriez des doutes. Rythmé, divertissant, amusant, un poil tiré par les cheveux, The Americans se laisse suivre sans déplaisir. Mieux, l’ambiguïté de la relation du couple central (ils ont été mis ensemble de force, pour la mission) et leurs sentiments incertains apportent un peu d’humanité à l’ensemble. On ne se fait pas happer comme après le pilote de Homeland, mais en Homeland du pauvre (j’entends, comparé à la saison 1 de Homeland, hein), pourquoi pas ?
Ma note : 6,5/10, pour la solidité narrative du pilote et les multiples pistes de lecture et d’action qu’il ouvre.
DO NO HARM (NBC)
De quoi ça cause. Jason Cole est chirurgien de 8h25 à 20h25. Il est sympa, mais un peu chiant et pas très causant. Après, de 20h26 à 8h24, il fait la teuf, se paye des putes, boit, fait flamber la CB. Du coup, il devient fun, mais aussi un peu violent, surtout avec les filles. bref, Jason a lu L’Étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde, et il s’est dit que ça ferait une bonne série télé.
Comment je la sentais. Attends, j’ai pas fini. Il s’est dit que ça ferait une bonne série, sauf qu’il n’a aucune culture, parce qu’un bonne série, ça a déjà été fait, par Steven Moffat, avec James Nesbitt. Du coup, un nouveau Jekyll & Hyde, je n’en avait pas besoin. Surtout pas avec un énième chirurgien. Do No Harm fait partie de ces nouveautés dont je n’avais absolument rien à faire — et encore, je suis poli.
Ce que je pense du pilote. Si je l’avais vu sur NBC, je pense que mon double maléfique aurait rapidement zappé. Ou alors il serait allé aux toilettes en attendant la pub. Do No Harm n’est pas vraiment un nanar, parce qu’elle sait, comme la majorité des séries de network, aller tellement vite qu’on n’a pas le temps de s’endormir. Mais elle est mauvaise. Mauvais scénario, donc, mauvais dialogues, mauvais acteurs (Steven Pasquale, ex Rescue Me, n’a pas les épaules d’un premier rôle, et Alana de la Garza, qui joue sa belle, n’a aucun charisme), vilaine réal, moche photo, et surtout personnages transparents. Or, pour nous faire accrocher à cette histoire avant tout humaine (Jason va-t-il réussir à vaincre sa part d’ombre ?), il fallait des personnages attachants, originaux, épais. Tabassée par la critique américaine, Do No Harm va disparaitre très, très vite des écrans US : elle a réalisé le démarrage le plus mauvais de l’histoire des séries US de network, avec 3,1 millions de téléspectateurs seulement !
Ma note : 2/10, parce qu’elle est rentrée dans l’Histoire, quand même ! (même si des séries bien plus mauvaises auraient mérité cette humiliation).
HOUSE OF CARDS (NETFLIX)
De quoi ça cause. Frank Underwood (Kevin Spacey) s’attendait à ce que le nouveau Président, fraichement élu, lui offre le siège de Secrétaire d’État (en gros, de Ministre des Affaires étrangères). C’était un promesse. Sauf que le nouveau Président ne tient pas sa promesse. Du coup, Frank, pas content, décide de détruire la carrière de tous ceux qui l’entoure et l’ont trahi. Il se fait aider d’une jeune journaliste aux dents longues (Kate Mara) et de son épouse, encore plus machiavélique que lui (Robin Wright). P.S : c’est un remake d’une minisérie anglaise de 1990.
Comment je la sentais. David Fincher. Sérieusement, ces deux mots là devraient suffire. Bon, ajoutons Spacey, Wright, et une flopée de “petits” noms d’Hollywood : Corey Stoll, Kate Mara, Constance Zimmer, Michael Kelly… Vous en voulez encore ? Alors précisons : Washington, les dessous de la politique. Encore un peu ? Une première historique, les débuts de Netflix dans les séries inédites, et donc une diffusion d’un genre nouveau, pas à la télé, qui va se développer avec Amazon dans le futur… N’en jetez plus : House of Cards est sans nul doute l’événement sériel de cette année 2013.
Ce que je pense du pilote (des deux premiers épisodes, en fait). C’est beau. Fincher offre (une fois de plus) une leçon de réalisation. Pas un plan à jeter. Tout est mesuré, millimétré, utile, et magnifique. Du coup, House of Cards donne une sensation d’extrême efficacité, alors qu’elle n’est pas pour autant pressée. Rarement (jamais ?) une mise en scène aura autant compté dans une série. On a déjà vu des merveilles (le travail de Gus Van Sant pour Boss, dont on va reparler ici), mais pas un langage visuel aussi fort, véritable chef d’orchestre de la narration. La narration, justement, est aussi impeccable… mais n’évite pas quelques facilités, quelques clichés (notamment chez la journaliste). Je ne suis pas certain que le principe qui veut que Underwood nous adresse régulièrement la parole, face caméra, soit une si bonne idée (elle est reprise de l’original). On s’en lasse très vite. Autre élément perfectible, l’interprétation. Kate Mara est formidable, les seconds rôles sont irréprochables, mais je trouve Kevin Spacey, pourtant parfaitement casté, légèrement à côté. Parfois même un peu faux. Robin Wright, elle, paye la froideur de son personnage, très mécanique, et du coup compliqué à incarner. Je cherche des poux à House of Cards, mais c’est indéniablement une très belle série. Dans un univers comparable (quoi que plus extrême et dramatique encore), Boss reste à mon sens supérieure. Voyons où nous mènent les 13 épisodes de cette première saison (tous mis en ligne en un coup, par Netflix), et reparlons-en…
Ma note : 8/10, parce que Fincher est un grand réalisateur, et que cette histoire-là a un sacré potentiel. P.S : C’est Canal+ qui diffusera House of Cards chez nous.
Image de Une : House of Cards (Netflix, Sony, Canal+)
Je me suis enfiler les 13 épisodes d’un coup en profitant du 1er mois gratuit chez Netflix en passant par un proxy US.
Et je suis conquis, moi qui sortait à peine de deuil après l’annulation de BOSS, je retrouve en House of Cards une série de très très bon niveau, pleine de cynisme et de rebondissement.
Je suis encore plus comblé que l’aparté, une de mes techniques dramatiques préféré, est utilisé par Underwood (Spacey).
Le casting en béton et la réalisation top notch font de cette série mon coup de coeur de la saison.
La question maintenant c’est quoi faire pour les 12 prochains mois en attendant la prochaine saison…