Itw : Anthony E. Zuiker, le créateur des Experts, cause webséries

Ce mardi, Yahoo! Cinéma, branche de la marque internet, lance une webséries en trois épisodes de 30 minutes, Cybergeddon. Derrière ce titre à la Michael Bay, Anthony E. Zuiker, créateur des Experts, producteur et scénariste. Soutenu par les antivirus Norton et une pléiade de sponsors, il tente l’expérience websérie, histoire de voir si la toile peu lui apporter un peu d’air frais… et un demi milliard de clics. Lancée simultanément dans une grosse vingtaine de pays à travers la planète, Cybergeddon suit un agent spécial piégée, accusée à tort de “cybertrahison” (Missy Peregrym, l’héroïne de Rookie Blue) et qui va devoir arrêter un méga supervirus informatique qui menace l’équilibre de la planète. Une websérie blockbuster, au modèle économique incomparable à ce qui se fait en général sur la toile, que Anthony E. Zuiker est venu présenter la semaine dernière à Paris. J’ai pu le rencontrer.

Les webséries sont traditionnellement le terrain de jeu de créateurs amateurs. Qu’est-ce qui pousse un poids lourd de la télé comme vous à vous y mettre ?
Il y a douze ou treize ans, quand j’ai créé Les Experts, j’étais au plus près de l’évolution de la criminalité. Je veux reproduire cette révolution avec Cybergeddon, qui met en scène une criminalité représentative de notre époque, la cybercriminalité. Ce qui me motive le plus, c’est d’innover, y compris dans la façon de raconter une histoire. Nous ne voulions pas nous contenter de sortir un film, nous voulions faire un blockbuster de 90 minutes, boosté par la puissance de frappe de Yahoo, qui contrôle (sic.) des dizaines de millions de personnes, tout en lançant un site interactif, avec des épisodes bonus, des making-ofs, ainsi que 250.000 applications pour smartphones et tablettes… tout cela simultanément, dans 25 pays, en 20 langues, avec pour objectif d’atteindre un demi milliards de vues.

Vous ne vous êtes jamais dit qu’une websérie, c’est moins prestigieux qu’une série télévisée ?
Jamais. J’ai toujours pensé que la meilleure diffusion d’une fiction se fait en ligne. Impossible de toucher plus de gens à la fois autrement qu’en passant par internet. Vous connaissez un autre média qui puisse être vu au même moment aux quatre coins du monde ?

Les webséries sont-elles l’avenir des séries… ou, du moins, l’avenir des séries est-il en ligne ?
Sans aucun doute. La diffusion traditionnelle, les grilles de programmes, c’est archaïque. Les gens veulent choisir ce qu’ils regardent. Même aller au cinéma, s’asseoir avec des inconnus pendant 2 heures, ça sonne vieux jeu pour moi. C’est peut-être parce que je suis un fan de technologies, mais le futur de la fiction, pour moi, c’est plutôt une œuvre qu’on peut voir partout, sur n’importe quel support, à n’importe quel moment.

Les webséries semblent plaire aussi parce qu’elles sont fauchées et qu’elles ont une liberté et des idées que n’ont pas les séries télé. Produire une webséries à coup de millions, n’est-ce pas risquer de « corrompre » le format ?
C’est dur à dire. Personne n’a pu encore décrypter ce qui fait qu’une série « fait le buzz. » Les vidéos qui font exploser les compteurs sont souvent bidouillées par des amateurs, qui se rependent sur la toile comme par magie. Si vous écrivez et que vous produisez une websérie avec pour objectif de « créer le buzz », de faire 10, 20 ou 30 millions de clics, il y a peu de chance que vous y arriviez. Nous allons essayer avec Cybergeddon, avec l’aide de nos sponsors, mais personne ne détient la recette du « buzz. »

Avez-vous du changer radicalement votre manière d’écrire et de travailler pour faire cette websérie ?
Au départ, nous devions faire 10 épisodes de 9 minutes, et j’ai donc conçu une narration avec un cliffhanger à chaque fin d’épisode. Finalement, le projet s’est transformé en trois épisodes de 30 minutes… Au-delà de ça, nous avons fait le maximum pour que Cybergeddon soit accompagnée d’une « expérience » qui en fasse quelque chose de très différent de ce que vous pouvez voir à la télévision ou au cinéma.

Avez-vous réfléchi aux supports sur lesquels les gens vont voir votre websérie ?
Absolument. Nous sommes parti du plus petit, les smartphones, et avons fait en sorte que les comédiens soient filmés d’assez près pour que ceux qui suivent la série sur leur téléphone puissent les distinguer clairement. Tous les plans ne sont pas si serrés, mais nous avons fait en sorte de ne pas oublier le cadre – littéralement le cadre – particulier de cette expérience.

Quel a été votre budget, comparé à un épisode des Experts ?
Nous avons eu un peu plus de 3 millions de dollars pour faire 90 minutes, c’est à dire un budget proche d’un épisode des Experts moitié long. Ça nous a forcé à faire très attention à notre budget. Le gros de ces 3 millions, vous le voyez à l’image. Une attention particulière a été portée aux bandes-annonces, pour promouvoir Cybergeddon. Franchement, elles sont aussi impressionnantes que les trailers d’un blockbuster cinéma. Les producteurs ont été peu payés, tout est allé dans la mise en scène et les acteurs.

Nous sommes dans les locaux de Norton, à Paris, la série est sponsorisée par Norton et… elle parle d’un virus informatique ! Ça ressemble à une pub déguisée !
D’abord, l’idée de Cybergeddon vient de moi, pas de Norton. Ils ont rejoint le projet quand je cherchais des sponsors. Ensuite, ils ont eu l’intelligence de ne pas prendre cette webséries pour une vulgaire pub. Il n’y a rien de plus agaçant, pour le public, que d’avoir l’impression de regarder une pub déguisée. Je vous promets que ce n’est pas le cas ici. Norton nous a aidé à rendre crédible l’histoire, leurs ingénieurs nous ont conseillé sur le tournage… Y a-t-il des références à Norton dans la série ? Bien sûr, mais elles sont raisonnables. Les spectateurs les verrons, mais ne penseront pas qu’on insulte leur intelligence.

Le sauveur de l’humanité n’est donc pas un gars de chez Norton…
Non ! Enfin, il y a un employé de la marque, mais c’est plus un hommage à Norton…

Le sponsoring est-il un bon modèle économique pour les webséries ?
Nous n’aurions pas pu faire une websérie de l’ampleur de Cybergeddon sans Norton. Ils ont non seulement sponsorisé la série, mais il font de la pub sur les boites de leurs antivirus, ils organisent des événements, et ils nous fournissent du matériel pour le tournage. C’est du donnant-donnant : nous voulons avoir de bons produits dans notre webséries, et ils veulent avoir une nouvelle visibilité. Les pubs font de moins en moins d’effet sur les consommateurs, du coup, les entreprises comme Norton se tournent vers des supports comme Cybergeddon pour faire la promotion de leurs produits. D’autres marques, comme Nissan et HP sont aussi engagés dans cette websérie.

Que répondriez-vous aux créateurs de webséries qui n’ont pas de budget et qui vont devoir affronter votre webséries lourdement sponsorisée ?
Que votre budget ou le nom de votre producteur n’a finalement pas beaucoup d’importance. Ce qui compte, c’est que vous soyez authentique, vrais et… bon. N’importe quel type qui a une caméra chez lui peut faire un carton. Youtube a prouvé qu’un amateur avec une bonne idée peut faire des millions de clics de plus que je n’en aurai jamais. D’ailleurs, vous savez quoi ? J’essaye d’être comme ces amateurs…

Pour voir Cybergeddon, c’est par ici.

Un commentaire pour “Itw : Anthony E. Zuiker, le créateur des Experts, cause webséries”

  1. Le début est sympa même si la VF est assez atroce… Pour l’instant, les placements de produits ne sont pas trop gênants et, même si ça ressemble très fort à Alias mais que ça n’en a pas la saveur, ça se regarde tranquillement…

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