Y’a des séries comme ça, qui vous hérissent le poil, qui vous agacent, que vous détestez, que vous ne souhaiteriez même pas à votre pire ennemi. Des séries qui révoltent vos goûts, qui agressent votre intelligence critique, qui vous font bondir sur votre compte twitter pour déverser un torrent de grognements. Pour moi, il y a eu Spartacus, en une moindre mesure Les Tudors et Pretty Little Liars. Des séries au fond divertissantes, mais qui révèlent sous leurs atours des mécaniques vulgaires et une vilaine tendance à flatter les téléspectateurs à coup de provoc’ gratos et autres ficelles grosses comme un câble de téléphérique. Mon nouveau souffre-douleur s’appelle American Horror Story, et il l’a bien cherché.
Sur le papier, j’étais preneur. Le 29 août dernier, j’écrivais, enthousiaste : « Ryan Murphy, qui en a sans doute marre des gamins de Glee (il n’est pas le seul) se remet au drame psycho. Le malade mental qui dort en moi est aux anges. En plus, le casting est à tomber (même si j’ai du mal avec Dylan McDermott). » Malgré mon aversion pour Murphy, à mon sens un poseur, fin commercial mais certainement pas génial – et, du peu de temps que j’ai passé avec lui lors des interviews, un type peu cordial – j’étais près à m’amuser, à faire passer Nip/Tuck pour une bluette d’ABC Family, à me scarifier avec ma télécommande en gueulant les paroles du dernier Marilyn Manson face à ma télé.
La provoc’, j’étais pour. Mais pas celle-là. Et pas comme ça. Par où commencer ? Tiens, au hasard, par le commencement. J’ai vu le pilote. Je n’ai pas aimé, mais je me suis dit : Murphy veut mettre le paquet, provoquer le puritain qui dort en chacun de ses compatriotes, chauffer les associations conservatrices, et faire dire aux critiques dans mon genre : au moins, il n’y va pas de main morte, c’est osé, excessif, baroque, etc. Ce que j’ai dit, sans grande conviction sur le fond. Car déjà AHS était vide, c’était une coquille, certes chiadée, avec de beaux plans et de beaux comédiens, mais vide de chez vide.
Pour ne pas passer pour un râleur, j’ai poursuivi. Sans succès. Comment faire une série pareille, aussi grossièrement phagocytée, avec de telles cartes en mains ? FX, une des meilleures chaînes du moment, et un casting à faire pâlir d’envie la concurrence ? Réponse : en p… plus haut que son c… ! Ce que Murphy sait faire mieux que quiconque. AHS est un hommage aux films d’horreur ? Soit. Alors au moins devrait-elle faire peur. Dans le genre hommage, Red is Dead est plus à mon goût. Je trouverai sans doute un connaisseur du genre pour me décrypter l’hommage et me prouver par A+B que Murphy est un sacré geek. Formidable, mais hermétique. Je ne suis pas un connaisseur de l’horreur, alors je n’ai pas le droit d’apprécier AHS ? Dommage.
En reconnaissant la démarche de Murphy, qui au moins ne fait pas les choses à moitié – comme dit plus haut – tout ce que j’ai pu voir dans sa série m’insupporte : dialogues caricaturaux et pseudo-poétiques ou pseudo-métaphysiques, conflits sentimentaux banals – en gros, c’est l’histoire d’un mec qui a trompé sa femme et de sa femme qui ne s’en remet pas – rebondissements bidons, personnages poussifs, tous fous furieux et incarnés par des acteurs de talents forcés au cabotinage – la pauvre Connie Britton est la seule à s’en sortir, même Jessica Lange, pourtant juste, est crispante – musique assourdissantes et omniprésente… Et ce n’est pas tout.
La provoc de Murphy, qui avait fini par plomber Nip/Tuck, elle aussi finalement transformée en coquille vide, est ici poussée à un paroxysme grotesque : adultère, avortement, assassinat, masturbation, viol, maladie mentale, Murphy fait mumuse avec son « freak show » en réussissant l’exploit de ne presque laisser aucun repos au téléspectateur, assommé de crises de nerfs et de descente à la cave – ceci n’est pas une métaphore – pour tomber sur un fantôme qui BOOUH ! avec tellement de finesse qu’on tord à peine un orteil. Le pasteur ultraconservateur verra là l’œuvre du Malin, l’expression télévisuelle du Mal, une effrayante série, hystérique, possédée. Moi, j’y vois un amas de grimaces sur fond de crissements de violons et d’intrigue horrifique aussi fine qu’une analyse menée par un étudiant de première année de psycho – et encore, un cancre.
En vous rappelant que tout ça ne regarde que moi, et qu’aimer American Horror Story n’est pas le signe d’une maladie grave mais celui de goûts différents des miens…
La preuve que je ne suis pas rancunier : American Horror Story débutera le 5 mai à 20h40 sur Ciné+ Frisson.
out à fait d’accord sur la série mais je sauve le générique qui est superbe !!
Je n’ai pas réussi à dépasser le pilote de cette série, Idem pour spartacus et house of lies.
J’ai aimé, j’ai même beaucoup aimé malgré certains défauts. C’est une jolie anthologie de l’horreur à l’américaine (clin d’oeil à American Gothic). il y a toujours une scène par épisode qui produit un “beurk” (Vivian mangeant de la cervelle crue..).
Les acteurs sont impeccables et les retournements de situation (Violet), surprennent vraiment car on sent qu’ils étaient prévus car finalement, il n’y a aucun espoir. MEttre le Black Dahlia, les allusions à Rosemary’s baby et je passe d’autres clins d’oeil (Beetlejuice) sont autant d’éléments qui participent de ce que représente le genre horrifique à l’américaine. Et contrairement à Nip/tuck qui devenait une inulte au spectateur tant il n’avait pas d’idée, Murphy en a une profusion et il faut attendre la fin pour que tout soit bouclé et qu’on quitte le syndrome “ghost-of-the-week” du milieu de saison.L’esthétique et cette ambiance Elroyienne des années 2010, hommage à tant de genres, m’ont vraiment convaincu. Pour l’anecdote, je suis prof d’anglais et j’ai fait une séquence dessus, avec achat de la maison et différentes manifestations.
Les histoires de fantômes sont un classique Britannique et Murphy a réussi l’exercice. J4attends la saison 2 avec les mêmes acteurs dans d’autres rôles. On verra bien à ce moment là pour réviser son jugement
Même avis. Mais moi, je n’arrive pas à dire si j’aime ou je déteste AHS. Pire encore, j’ai peur d’aimer certains trucs pour de mauvaises raisons, la série sait flatter de bas instincts. Et je vais aller plus loin, je trouve que c’est la même chose pour Treme et Boardwalk Empire, qui hormis leur thème-support servant de justification à la série, ce sont aussi de belles coquilles vides. Sauf si on me prouve le contraire, ce que personne n’a su faire jusqu’à présent, à part me dire qu’il y a du fric dedans et des acteurs formidables. LOL Parce que comme si cela suffisait à faire une grande série.
Et Murphy en tant que showrunner ne vaut pas Whedon ou Carter. D’ailleurs, j’ai tendance à penser que si les années 90 ont permis à beaucoup de Grandes séries d’exister, c’est qu’il y a eu convergence sur la même période de Showrunners talentueux, ce qu’on a un peu perdu.