Comédies US : ça va mâle

J’ai hésité pour le titre. J’avais « Les comédies se font la mâle », « de mâle en pis », « même pas mâle », « mâle à l’humour » et tout un tas de jeux de mots foireux sur la « crise du mâle » qui touche les comédies en cette rentrée américaine. J’ai opté pour « ça va mâle », ce qui n’est pas beaucoup mieux que les autres choix, mais qui a le mérite d’être clair : ébranlé dans son orgueil, menacé par une flopée de comédies pleines de filles – et, horreur, parfois réussies – l’homo hollywoodus a voulu se rebeller. Il s’est laissé poussé la barbe, à mis de l’huile de vidange sur son jean, a écrit trois comédies, How to be a gentleman, Last man standing et Man up… et s’est planté sur toute la ligne.

Difficile de faire moins drôle, moins juste, moins subtil, moins bon – tout court – que ces trois nouveautés, assurément parmi les pires de la rentrée. Pourtant, il y a assurément là un excellent sujet : les hommes, depuis quelques années – difficile de dire exactement depuis quand – souffrent d’une remise en question, réelle ou fantasmée, de leur position dominante dans la société. On est encore très loin d’un monde égalitaire, mais les femmes, fort heureusement, reprennent du terrain dans à peu près tous les domaines. Nous ne sommes pas là pour discuter des détails techniques, mais plutôt d’un état d’esprit. Or, entre les faits, la pression médiatique, l’invention des métrosexuels et autres versions « féminisées » du mâle, l’homme n’est plus ce truc viril un peu bourrin qu’il était il n’y a encore pas si longtemps — en généralisant, bien entendu. Des bourrins, il en reste.

Ça s’appelle l’évolution. Il en fait un peu plus à la maison, il s’occupe plus des enfants, il écoute plus sa compagne, etc. Donc, concluront certains, il est « moins viril. » C’est con, mais c’est ainsi. Même le plus subtil des mecs – je sais, j’essaye de m’inclure ici, c’est affreusement prétentieux mais je me défend comme je peux – sent que les temps changent, et questionne sa position vis à vis du sexe opposé — position sociale, pas sexuelle; quoi que… La question est complexe, finalement assez grave – sans être vitale : il s’agit donc d’en rire. Avant de les voir, on se disait que ces trois comédies allaient toucher au sujet, on était donc enthousiaste. A tort.

Leur problème, c’est qu’elle réduise la quête d’une virilité « perdue » à un retour en arrière. Elles se demandent comment retrouver l’homme d’avant, ses réflexes vaguement machistes, ses signes d’autorité, sa présence censé rassurer le foyer, etc. Sans doute le font-elles avec une bonne dose d’autodérision et ne sont-elles pas de purs plaidoyers réactionnaires, loin de là – seule Last man standing, old school, y fait penser. Je n’ai vu que leurs pilotes, mais aucune d’entre elles n’a l’intelligence, semble-t-il, de chercher à peindre et à rire d’un “nouvel homme”, de questionner l’évolution de la virilité plutôt que sa disparition. Ne peut-on pas être viril et refuser de se battre ? Ne peut-on pas accepter que notre compagne nous donne un ordre sans se sentir merdeux ?

En pariant que les téléspectateurs masculins prendront du plaisir à rire de leur « faiblesse » et fantasmeront – même au second degré – une reprise en main de leur virilité d’antan, How to be a gentleman, Last man standing et Man up font selon moi fausse route. Peut-être en feront-elles rire certains – Last man standing a fait un beau score sur ABC, mais chute en deuxième semaine – mais ceux-là seront sans doute les plus âgés – Last man standing s’adresse clairement aux plus de 50 ans (que les plus de 50 ans ne se sentent pas insultés !). Ça n’engage que moi, mais je trouve bien plus d’échos à ma vie, et je ris bien plus en suivant les aventures de Jess, la New Girl, et de ses colocataires (tous des mecs, d’où l’identification). Même en comédie, la femme semble bel et bien être l’avenir de l’homme…

Images : Man Up ! (ABC), How to be a gentleman (CBS), Last Man Standing (ABC).

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