La protection de la nature : à quel prix ?

Sans titre1               © by Marc Eliot

Autrefois déifiée, la nature, désormais menacée, tend à se financiariser. Parce que la nature ne possède pas de valeur économique intrinsèque, la pollution de l’environnement a longtemps représenté des « externalités » résultant de nos activités tant personnelles que professionnelles, oubliées dans nos analyses de risques et prises de décisions. Pourtant, la destruction des écosystèmes a un coût tant environnemental que social, économique et humain. Désormais, l’internalisation de ces enjeux passe par une triple initiative de financiarisation : de la nature, des causes du changement climatique (les émissions de carbone) et de ses conséquences.

Quel coût carbone ?

La financiarisation de la nature et le financement de l’adaptation au changement climatique sont pourtant sujets de controverses. C’est ainsi que lors du dernier Forum économique de Davos, la question du coût carbone fut de nouveau érigée en priorité par les chefs de gouvernements, à quelques mois maintenant de la 21ème Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Paris.

Des chercheurs de l’Université de Stanford ont récemment publié un rapport mettant en évidence 4 façons d’évaluer le coût du carbone : via son prix sur le marché, sa valeur tutélaire, son coût social ou le coût des mesures d’atténuation nécessaires suite aux variations que les émissions seraient susceptibles d’entraîner sur le climat.

La méthode approuvée par la Banque Mondiale est la suivante : « on identifie les « coûts externes » des émissions, c’est-à-dire les coûts supportés par la collectivité de manière indirecte (pertes de récolte et frais de santé découlant des vagues de chaleur et des épisodes de sécheresse, dommages causés aux biens par les inondations et l’élévation du niveau de la mer, etc.), puis on associe ces coûts à ceux qui en sont à l’origine en établissant un prix pour le carbone. » Le coût carbone doit ainsi permettre d’afficher un « signal-prix » clair tout en étant reconnu par l’ensemble des acteurs de sorte à inciter les prises de décisions globales en faveur de la limitation des émissions de dioxide de carbone et de gaz à effets de serre de manière plus générale. Une fois déterminé et accepté de tous, ce coût peut servir à la mise en place d’un marché carbone, système d’échange de droits d’émissions de CO2, ou à la mise en place d’une taxe sur les émissions de CO2.

Une difficile internalisation du coût carbone à l’échelle mondiale

La reconnaissance d’un coût carbone unique à l’échelle mondiale semble pourtant compromise du fait des désaccords entre Pays du Nord et Pays du Sud sur la question de la responsabilité des pays au développement plus précoce, mais également au niveau national. En 2013, suite à la révision des estimations du coût social du carbone, les élus républicains américains avaient attaqué le mode de calcul choisi et le manque d’explication de la hausse de ce coût.

En Europe, les disparités nationales en matière de fiscalité environnementale sont toujours présentes et le marché de permis européen (ETS) rencontre certains dysfonctionnements. Le nombre de quotas en circulation, souvent attaqué, expliquerait l’inefficacité relative du mécanisme. Selon l’économiste Christian de Perthuis « en Europe, la crise est un des facteurs de l’affaiblissement de ce marché, mais la cause principale de l’échec de l’ETS est politique : il n’y a pas d’engagement politique fort en faveur du marché carbone européen. Or, ce qui fait le prix, c’est la rareté. Et la sur-allocation des quotas a compromis le mécanisme ».

Alice Pauthier

Sources : Arte, euractiv.fr, bulletins-electroniques.com, actu-environnement.com, news.stanford.edu, Rapport du Sénat, Rapport de la commission présidée par Alain Quinet La Documentation française

 

 

 

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