Une tablette améliore-t-elle la lutte pour la sauvegarde de l’environnement ?

 

Les NTIC  peuvent-elles incarner l’écologie du XXIe siècle ?

Le débat s’ouvre progressivement, parallèlement à l’émergence à grande échelle des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) depuis les années 1980. La tablette, nouvel outil au service du grand public, permet une inter connectivité de la majorité de la planète ainsi qu’un rapprochement des mondes.
Désormais, l’autre, le barbare de la Grèce antique, est devenu un semblable, certes éloigné géographiquement mais proche, à nos côtés, par la technologie. Il y a donc une proximité certaine. Cette technologie a participé à l’apparition du monde que nous connaissons : la mondialisation.
Par ailleurs, cette mondialisation débouchant sur une concurrence effrénée, a admis par l’innovation (moteur de l’avantage stratégique) l’instauration de nouvelles technologies informatiques à la disposition du grand public, comme l’ordinateur, les smartphones ou les tablettes. La mondialisation n’est pas exclusivement née des NTIC, mais celles-ci en constitue sans aucun doute le symbole le plus puissant.
La tablette, dernière arrivée sur le marché il y a quelques années, est-elle bénéfique pour l’environnement ?

Il apparaît certain que la tablette offre de nombreux avantages.
En effet, le support numérique permet sans aucun doute d’économiser pour le grand public bon nombre de papier. Plus besoin d’imprimer un livre, ou d’acheter un cahier pour écrire. La tablette fait donc l’économie de beaucoup d’arbres, d’espaces verts ou de zones protégées. A l’échelle de la France, cela représente quatre millions de tablettes vendues en 2012 ; autant d’arbres en moins à couper. L’avantage est donc certain.

Néanmoins, ces nouvelles technologies numériques n’empêchent pas pour autant de détériorer l’environnement. L’ensemble de ces outils numériques fonctionnent avec de l’étain, de l’aluminium ou du lithium. Or l’extraction de ces terres rares coûte très cher à l’environnement, avec un fort prix à payer en termes de pollution. L’exemple de l’île de Bangka, en Indonésie, est révélateur. Cette immense mine d’étain fonctionne à plein régime, lié à la forte demande mondiale (plus particulièrement des pays émergents), générant des dégâts sans précédent pour les populations locales. Selon Pie Ginting, directeur de l’ONG les Amis de la Terre en Indonésie, « 65% des forêts et plus de 70 % des récifs coralliens auraient été contaminés […] l’accès à l’eau potable est devenu problématique sur l’île, à cause de la contamination des rivières par les déchets miniers ». Les vertus de la tablette sur l’écosystème doit donc être relativisé, car ces outils miniaturisés exigent l’utilisation de nouveaux matériaux (coltan, étain, lithium) dont l’extraction est particulièrement nocive pour la planète.
De plus, il faut agréger le fait que ces tablettes ont une durée de vie très courte (inférieure à trois ans) et ne sont généralement pas réparés, car les matériaux utilisés pour leur fabrication sont d’une part très coûteux, et d’autre part les réparations sont jugées trop complexes et non rentables.

L’ajustement réside donc à l’échelle de l’entreprise. En 2012, 93% des tablettes produites sont destinées au grand public. Or, l’impact écologique le plus néfaste reste l’activité des entreprises. En ce sens, la numérisation de l’entreprise pourrait générer à grande échelle d’importantes économies. L’autre variable d’ajustement de cette équation réside dans le recyclage de ces appareils.
Le défi est immense, sachant que le marché des tablettes s’est fortement rapproché de celui du PC portable. Il s’est vendu 5,5 tablettes par seconde en 2013.

L’enjeu revient donc à déplacer le problème. Certes, on limite certains impacts liés par exemple à la déforestation, mais on intensifie l’extraction de terres et métaux rares. Autrement dit, on limite l’impact sur le bois pour détériorer le sol.
Les gains, si on peut les nommer comme cela, sont bel et bien minimes.

Une variable pourrait donc aider à solutionner ce problème. La mécanique théorique de l’économie circulaire résous un certain nombre de problèmes liés dans ce cas de figure au recyclage. En effet, le principe d’une économie circulaire est un mécanisme économique s’inscrivant dans le cadre d’une économie durable. On est donc dans un cycle quasi fermé où tout ce qui est utilisé pour la production est conservé afin de ne pas être perdu. Autrement dit, on cherche à optimiser les capacités de productions en annihilant ou pour le moins en limitant les émissions toxiques pour l’environnement.
Citons par exemple en Europe le cas de papetiers comme Arjo Wiggins pour le papier recyclé, ou les fabricants de moquette comme Interface et Desso. Par ailleurs, Israël a développé un système de production agricole qui consomme très peu d’eau, ou le Danemark qui à légiféré pour une politique de développement « zéro déchets ».
Rapporté aux enjeux liés aux nouvelles technologies, il est tout à fait concevable de mettre en place une politique très ambitieuse de limitation des déchets.
Cependant, la concurrence économique actuelle et les sommes en jeu n’incitent pas à voir émerger ce phénomène dans un futur proche ; l’action serait efficace à condition que la politique sur le sujet soit globale.

Le défi écologique sur les tablettes à court et moyen terme est donc immense et les solutions  respectueuses de l’environnement très limitées. Elles ont au moins le mérite d’exister.

Hugo Dubert

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