Le féminisme à toutes les sauces


A force d’assaisonner le féminisme à toutes les sauces, moi j’y perds mon hébreu.

Bon, donc ce matin, je me lève.

Ça m’arrive parfois.

J’essaye de lutter contre cette bien fâcheuse habitude mais pour l’instant sans succès ; mon corps, tel Lazare, se lève tout seul sans que je ne lui aie rien demandé.

Et moi, comme un brave toutou, je le suis.

Bref, nous voilà débarquant dans la cuisine, mon corps et moi.

Café, jus d’oranges, tartines, croquettes pour le chat, sourire à ma voisine, grattage de couilles, internet.

Et là, crack, boume hue, je tombe direct sur la une de Paris Match, avec Filippetti enceinte et son Montebourg affalé comme un Gatsby de pacotille sur un transat.

Je vomis mon café d’indignation.

Et le respect de la vie privée ? Et que sont-ce ces manières de traquer un couple de la sorte et de prendre des photos à la dérobée sur leur lieu de vacances ? Vous n’avez vraiment pas autre chose à foutre de votre vie ? Et qui sont-ce donc tous ces couillons qui vont débourser quelques euros pour acheter ce ramassis de torchon de souillure de magazine ? Et on n’a tout de même pas pris la Bastille pour subir ce genre de vilenies qui bafouent la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Et puis, dans la foulée, déjà bien échauffé, j’enchaîne sur une interview d’Aurélie dans Libération et là, re crack, boume, hue, je lis de mes yeux lus : ” Chaque femme a le droit de disposer de son corps. Ce type de photo est une atteinte à la dignité, toutes les femmes peuvent se sentir atteintes. Imaginez ce que cela fait de se retrouver en maillot de bain à la une d’un magazine. Par ailleurs, je suis une femme politique, députée depuis huit ans. On doit respecter mon mandat, ma fonction. Il y a une lecture féministe et politique de cette une de Match.”

Mais alors, l’eût-on photographiée en bermuda, qu’elle n’eût rien trouver à redire Aurélie?

Mais alors le Président, quand dans un autre torchon, a été photographié en simple slip de bain, c’était aussi une atteinte à la dignité dans la mesure où tous les hommes pouvaient se sentir eux aussi atteints ? (Ce qui fut mon cas, je dois en convenir. D’ailleurs, depuis, je n’ai toujours pas remis les pieds à la piscine municipale. J’ai le fantôme de François en maillot de bain qui me poursuit)

Et puis quel rapport avec le fait qu’elle fut une femme politique politique, une députée ?

Eût-elle été une actrice, une chanteuse, une présentatrice de journal télévisé, une journaliste, une écrivaine, une soprano, que cela n’eût pas prêté tout autant à conséquence ?

Mais de quoi parle-t-elle au juste quand elle évoque une lecture féministe de cette une ?

Serait-elle entrain de suggérer que de la prendre en photo enceinte constitue une circonstance aggravante dans la mesure où, avec tous les efforts du monde, Arnaud, même après avoir avalé une marmite entière de fondue bourguignonne, ne pourrait prétendre à présenter un ventre aussi rebondi et que partant il existerait une différence de traitement qui laisserait supposer que la femme est tout juste bonne à pondre tandis que l’homme a tout le loisir de se relaxer sur un transat pendant que madame supporte tout le poids de la grossesse ?

Ce qui empiriquement est tout à fait exact mais de là en tirer des conséquences sur les supposées visées sexistes d’un hypothétique rédacteur en chef qui, dans la solitude de son bureau, aurait tout comploté afin de de porter préjudice à la gent féminine, tout de même Aurélie, cela ne serait pas un tantinet tiré par les cheveux cette mise en accusation ?

Je m’y perds en conjectures.

On ne peut quand même pas tout ramener au féminisme.

Cette une est abjecte parce que c’est une photo volée qui n’a pas lieu d’être. Enceinte ou pas. En maillot de bain ou en vareuse. En été comme en hiver. Hommes et femmes confondus. Sous toutes les latitudes.  

Point barre.

Du coup, je me suis recouché.

J’en avais trop vu.


Et pour une fois, c’est mon corps qui m’a obéi.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                   Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

2 commentaires pour “Le féminisme à toutes les sauces”

  1. Certes. Mme Filippetti donna déjà des gages – comme ministre d’ailleurs – de sa maladresse. Est-ce cependant une raison pour, sans habileté évidente, lui faire grief d’alléguer en l’occurrence sa féminité ? Alors qu’en effet la photo volée d’instants privés eût suffi à justifier sa décision de porter plainte contre « Paris-Match » ?

    Le féminisme, à l’instar de puissantes épices prodiguées à l’excès, peut faire grimacer maints amateurs de sauces ou vinaigrettes relevées – mais aussi jubiler des misogynes à l’affût de la moindre occasion.

    Aussi consacrer la quasi-totalité d’un post à l’instrumentalisation (vénielle) du féminisme – instrumentalisation inutile puisque l’atteinte caractérisée à la vie privée suffisait –, n’est-ce pas est faire la part belle aux agités du « scoop » photographique ? D’autant plus qu’il eût peut-être été tout aussi « porteur » d’en rester à la politisation de son mécontentement par Mme la députée.

    Femmes et hommes publics, les politiques attisent souvent la curiosité des gens. Une immense majorité des corps d’entre eux n’apparaît jamais en « une » des magazines et quotidiens. Pour les autres, ils « font » ladite « une » le corps vêtu : bien souvent, leur visage suffit à attirer l’attention. Celles et ceux qui sont montrés en tenue de bain pour la première fois doivent – immédiatement – attaquer la publication en justice pour atteinte à la vie privée et non-respect de la propriété de l’image personnelle. De grassouillets dommages et intérêts leur seront en général consentis pour ces griefs. [Le justiciable ordinaire ne recourt pas toujours à un tel moyen de protection de sa vie privée, faute de ressources équivalant à une indemnité de ministre ou de parlementaire.]

    Les fous du clic-clac récidivant, il faudrait se demander si un inconscient exhibitionnisme – ou encore l’on ne sait quel souci électoraliste – de la personne politique concernée pourrait expliquer l’acharnement des Robert Capa des tenues de bain. Dans la négative, la Justice condamnera encore l’employer des chapardeurs de clichés qui finiront par se lasser devant l’ascension (souhaitons-la himalayenne !) des dommages-intérêts consentis…

    Il serait tout de même odieux que l’on se lance dans une étude sur le goût plus ou moins développé (et avisé ?), chez nos politiques, des narcissiques mises en scène !

  2. On a fait rentrer les femmes en masse dans les médias et la politique afin de tout rendre complètement con et dérisoire, et force est de constater que le plan a fonctionné au-delà de toute espérance.

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