L’antiaméricanisme ou la haine contre soi


C’est la plus grande ineptie des temps modernes, la plus infrangible, la plus répandue, celle qui met tout le monde à peu près d’accord, j’ai nommé l’antiaméricanisme, qu’il fut primaire, secondaire ou tertiaire.

La plus bête aussi, tant elle exalte ces parfums délétères de la jalousie la plus mesquine, de l’aversion instinctive du petit propriétaire terrien crevant de rage de voir son cul-terreux de voisin, pourtant parti de rien, réussir bien mieux que lui dans ses entreprises agricoles.

Cette schizophrénie toute européenne de toiser cette Amérique du haut de son historie millénaire, de lui infliger leçons de morale et cours de maintien, de l’invectiver sur ses mœurs supposées barbares, tout en rêvant secrètement de lui ressembler.

Cette petite haine ordinaire, qui ne peut s’empêcher d’ouvrir grande sa gueule pleine de poison dès lors que l’Amérique ose intervenir dans son pré carré, et exiger d’elle de circonscrire son champ d’intervention sous peine d’être taxée d’impérialisme.

Cette manière que possède l’Europe de la renvoyer dans ses pénates, de la prier de s’occuper de ses affaires mais de l’appeler au secours dès lors que les vents mauvais de l’Histoire se mettent à souffler, acceptant cette fois son sacrifice, tout en regrettant déjà d’avoir été libérée par ceux qu’elle exècre tant.

Que ce fut lors des deux guerres mondiales, ou encore cette semaine quand il fallut attendre l’intervention de l’administration américaine pour mettre à genoux la FIFA, cette institution vérolée que chacun savait être corrompue depuis la nuit des temps mais dont personne n’osait ou ne voulait convoquer à la barre de la justice pour lui demander des comptes.

”De quoi je me mêle ?” a-t-on encore entendu, ”ce n’est pas vos oignons, vous ferez mieux de régler vos problèmes raciaux eu lieu de venir nous emmerder avec vos mises en accusation qui d’ailleurs ne vous concernent pas vraiment.”

Il faut être singulièrement borné pour oser demander à l’Amérique des comptes sur son traitement réservé à la communauté afro-américaine.

Non pas qu’elle soit exempte de tout reproche, loin s’en faut, mais difficile de s’ériger en donneur de leçon quand par le passé de telles questions identitaires ou raciales furent réglées sur son propre territoire à coups de camps d’exterminations, de chambres à gaz et autres fours crématoires.

Honnir l’Amérique et tout ce qu’elle peut représenter et incarner à travers sa culture ou son industrie, dont on s’abreuve pourtant le gosier en continu et à grandes goulées voraces, c’est avant tout se haïr soi-même, se cogner la tête contre le mur de sa propre incapacité à s’inventer de nouveaux mythes afin de suivre le train de la modernité, retourner sa colère de n’être plus le centre du monde contre cette nation née pourtant à son origine du désir d’expansion de nombreuses nations européennes.

Et à qui on reproche aujourd’hui précisément et souvent à juste titre cette volonté d’asseoir ce même désir de domination hors de ses frontières.

Le retour du refoulé.

La haine toujours recommencée envers le fils prodigue à qui on a donné la becquée et qui, une fois devenu adulte, se permet de venir jouer dans la même cour de récréation où jadis on régnait en maître.

Ce n’est pas la vieille Europe percluse de rhumatismes qui aura la peau de la FIFA.

Les connivences avec elle sont trop étroites, les intérêts trop partagés, la veulerie des gouvernements trop prononcée pour permettre une refondation complète de son mode de fonctionnement.

Osera-t-on décréter, par le biais de ses fédérations nationales, le boycott de toutes les compétitions organisées par les Maîtres de Zurich jusqu’à nouvel ordre ?

La Coupe du Monde de football féminin commence le 6 juin au Canada sous l’égide de la FIFA.

Pourquoi ne pas conditionner la présence de ses équipes nationales à la démission de Sepp Blatter, et imposer une nouvelle manière d’œuvrer au rayonnement international du football ?


Faudra-t-il donc encore attendre que ce soit l’Amérique qui donne l’exemple ?


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4 commentaires pour “L’antiaméricanisme ou la haine contre soi”

  1. Les recours adressés aux États-Unis durant la Première puis la Seconde Guerre mondiale furent-ils de même nature et de même portée que la mise au pas d’une FIFA corrompue (et connue pour l’être depuis longtemps) ? La Realpolitik appliquée au sport est certes manifeste : chaque pays subordonne ses critiques (comme son vote ou sa « neutralité » en faveur de l’honorable M. Blatter) à ses intérêts nationaux. Les États-Unis d’Amérique n’en firent-ils pas autant avec le CIO – peu connu jusqu’ici comme agneau en matière de pots-de-vin – pour arracher l’attribution des Olympiades ou des jeux Olympiques d’hiver à telle ville étatsunienne ?

    Quant à la ségrégation des Noirs aux États-Unis et aux camps d’extermination en Europe – traitements au niveaux de gravité peu comparables –, est-il permis de rappeler que, si tous les Étatsuniens furent loin d’être membres du Ku Klux Klan, tous les Européens furent loin d’être des nazis exterminateurs ? Quant au « retour du refoulé », sans aucun doute indéniable, l’on croyait que ce concept trouvait plus grande pertinence, donc emploi plus justifié, dans des affaires autres que le football : sport mondial à n’en pas douter, mais qui ne doit pas mouvoir si massivement l’inconscient collectif européen qu’il puisse être placé au même niveau que la gigantesque dette, à deux reprises contractée auprès des États-Unis par l’Europe, pour recouvrer sa liberté.

    L’ouverture du marché européen aux multiples produits américains après 1945 ne saurait – sauf cynisme stupide – être comparée à l’investissement en matériels et, surtout, en hommes des États-Unis d’Amérique…

  2. Pour ce qui est de la Première guerre mondiale, les États-Unis doivent bien plus aux pays européens que l’inverse.

    Est-il nécessaire de rappeler qu’ils ont toujours refusé de s’engager dans la guerre aux côté de la Triple Entente ? Qu’ils ont déclaré la guerre à l’Allemagne uniquement et non à l’Alliance et non, comme on voudrait trop souvent le faire croire, pour protéger les pays démocratiques, mais pour sauvegarder leurs intérêts commerciaux ?

    Que malgré leur refus de s’allier aux pays de l’Entente ce sont ceux-ci qui lui fournirent le matériel leur permettant de mener à bien cette guerre ? Que leur armée n’intervint que face à une Alliance déjà exsangue et pour qui la guerre était déjà perdue ?

    Que c’est sur leurs insistances que les pays de l’Entente renoncèrent à imposer à l’Allemagne des conditions qui auraient empêché sa réapparition comme puissance militaire, ceci au profit d’une paix rapide qui devait être garantie par la SDN à laquelle les États-Unis refusèrent d’adhérer ?

    À un moment donné il va falloir arrêter de se foutre de la gueule du monde. C’est comme cette vénération qu’on leur voue pour leur rôle durant la seconde guerre mondiale, alors qu’on sait très bien que ce sont les russes qui leur ont permis de sortir triomphants de la guerre que leur avait déclaré M. Hitler ?

    Je n’ai rien contre les États-Unis, c’est un grand pays qui a produit nombre des intellectuels les plus brillants de notre époque. Mais je constate plus aujourd’hui une américanolâtrie qu’une américanophobie. Pour la plupart des gens il n’est de bons films qu’américains, les firmes les plus prisées du grand public sont souvent américaines, etc.

    Tout juste critique-t-on, en France, leur interventionnisme à tout va. Mais cela vient sans doute de cette tendance naturelle que nous avons à, oublieux de nos poutres, contempler avec satisfaction la paille dans l’œil de nos voisins.

  3. A noter, Eusèbe, que les USA n’ont absolument pas eu besoin des Soviétiques ni n’ont fait appel à eux pour guerroyer contre l’empire japonais dans le Pacifique…

  4. En fait si, les américains ont de nombreuses fois demandés aux russes d’intervenir contre le Japon, ce que Staline a toujours refusé. L’URSS n’est entrée en guerre contre le Japon qu’alors que la guerre était déjà gagnée. Cette entrée en guerre, réponse à tant d’insistance, a fait d’ailleurs plus de mal que de bien aux États-Unis : elle a permis au PCC les bases qui lui permettront de gagner la guerre civile et a eu pour conséquence la division de la Corée.

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