Cette illustre phrase qui donne son titre à ce billet, je l’avoue bien bas, je l’admets, je le confesse, oui c’est moi et personne d’autre qui en est l’auteur.
Un cœur qui bat c’est une âme qui respire.
Elle figure dans mon troisième roman, l’inoubliable Loin de Quoi ?, œuvre magistrale qui signala mon entrée dans le club très fermé des romans s’étant vendus à moins de trois exemplaires, les deux courageux acquéreurs recensés étant mon frère et ma mère, même si je soupçonne cette dernière d’avoir menacé mon frère de le priver de couscous jusqu’à la fin de ses jours s’il ne se décidait pas à l’acheter.
C’est au début du livre.
Le personnage principal vient d’arriver à Vancouver, il est assis sur un banc face à l’océan et devant lui il voit défiler la moitié de la population de la ville affairée les uns à courir, les autres à pédaler sur leurs vélos supersoniques, les uns et les autres à pagayer sur l’eau et, confronté à cette débauche d’énergie des plus saugrenues, le voilà qui passablement énervé s’exclame :
On tourne un spot pour la santé civile, c’est ça ?
Un cœur qui bat, c’est un cœur qui respire.
Cette phrase, je tiens à le dire, était de toute évidence écrite sur un ton volontairement ironique, férocement comique, même Franck Ribéry s’en serait rendu compte sans l’aide d’un dictionnaire.
Pourtant, quelqu’un, je ne sais qui, ma mère peut-être ou alors mon frère dans un désir de se venger d’avoir dû débourser quelques euros afin de pouvoir continuer à s’empiffrer du couscous maternel, en a décidé autrement.
La prenant pour argent comptant, un infâme personnage, un traître, un félon, l’a détourné de son contexte, l’a isolée du roman, et sans mon autorisation, l’a consacrée comme un modèle de sagesse toute orientale.
Depuis, cette vraie-fausse citation d’une niaiserie sans nom, je la retrouve un peu partout.
Dans un blog consacré aux bienfaits de l’amour tantrique, au beau milieu d’un article sur le don d’organes, au détour d’un site venant en aide aux fumeurs désireux d’arrêter la cigarette, en propos liminaire d’une dissertation sur les palpitations sentimentales, en tête de gondole d’une fondation pour la venue de Bouddha sur terre, en première ligne d’une ligue anti-avortement.
Me voilà devenu bien malgré moi l’égal de Confucius, l’alter ego de Paulo Coelho, le frère siamois du Dalaï-lama.
Des jeunes filles en pleine pâmoison amoureuse récitent mon mantra à longueur de journée devant mon portrait accroché à côté de celui de Justin Bieber.
Des fumeurs, quand ils songent à replonger dans l’enfer de la cigarette, se reprennent au dernier moment en se remémorant mon sermon.
Je figure désormais en bonne place dans le dictionnaire des citations les plus illustres de la littérature française.
Le cœur à ses raisons que la raison ne connaît pas. Blaise Pascal.
Rodrigue, as-tu du cœur ? Pierre Corneille.
Un cœur qui bat, c’est une âme qui respire. Laurent Sagalovitsch.
Ce sera, je le crains, mon épitaphe.
Les futures générations la liront sur le fronton des écoles, des églises et des hôpitaux.
Le pape Raymond XXIII s’en servira pour mieux évangéliser des troupeaux égarés.
Dire que je ne suis même pas certain de croire en l’immortalité de l’âme.
D’ailleurs est-ce qu’au moins j’en possède une, d’âme ?
Et si oui, loge-t-elle dans mon cœur ou dans mon ventre comme les Amérindiens le pensent ?
Je songe désormais à publier un recueil de maximes du même tonneau.
Un couscous qui se réchauffe, c’est une cuisine qui respire.
Un chauve qui se gratte la tête, c’est un cerveau qui respire.
Et surtout,
Un pied qui démange, c’est un tibia qui respire.
Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )
Jamais je n’aurai eu à penser qu’un être de style si raffiné pouvait pondre un titre qui ne signifiait rien en gros. Vous commencez à exceller dans ça aussi. Cependant, vous êtes le borgne d’une humanité garée au bâbord de l’idiotie intellectuelle. Êtes-vous idiot Mr Sagalovitch comme Ribéry,
“Tout autre que vous l’éprouverez sur l’heure”.
Vous savez quoi ? [Ainsi dit-on aujourd’hui, au lieu par exemple, de : « Savez-vous à quoi vous me faites penser ?] Votre idée est géniale, et vous devriez savoir grand gré à votre maman, ou à votre frère friand de son couscous, ou même à « l’infâme personnage » (sic), inconnu, dont vous pourriez fleurir, en un lieu et à une date de votre choix, le discret cénotaphe que vous élèveriez par reconnaissance à sa mémoire. Car cette matrice : « Un/Une… qui…, c’est un/une… qui… », est d’un usage aisé. Elle est rechargeable à l’infini, telle une arme : « Un manchot qui geint, c’est un homme qui souffre du bras perdu ». Vous en avez sans difficulté retenu la musique : vos trois citations en fin de post sur le couscous, le chauve et le pied l’attestent.
Pourquoi dès lors ne pas utiliser vos nom et prénom authentiques comme pseudo, car c’est sous eux que l’on vous cite, et produire industriellement des dictons ? Vous éviteriez ainsi un désagrément : l’emploi d’un nègre, puisque le maniement aisé de la matrice permet de produire industriellement des dictons – lesquels assureraient des profits très substantiels ; lesquels, enfin, vous laisseraient tout loisir d’écrire votre chef-d’œuvre sous le pseudo de votre choix. Quelque grand prix littéraire une fois obtenu, une fuite, discrètement distillée, ne tarderait pas à faire identifier le porteur dudit pseudonyme au fécond producteur des nombreuses et appréciées pensées : Laurent Sagalovitsch.
Le tour serait joué. Mieux, ce passage de deux auteurs à un seul imposerait réédition de tous vos ouvrages. Et l’on évoquerait dans les gazettes littéraires l’épiphanie d’un nouveau Gary/Ajar. Il existe des évocations moins élogieuses.
« La balle est dans votre camp », comme on dit au stade Geoffroy-Guichard.
Cher illustre auteur,
Une petite dénonciation, je ne suis ni votre frère, ni votre mère mais j’ai lu votre livre : Loin de quoi ? [L”ayant acheté d’occasion, je suppose que cela signifie que l’un de vos parents l’a revendu :-]
D’ailleurs j’ai bien aimé et je m’apprête à acquérir le 2nd.
Je me demandais d’ailleurs si l’adresse email qui figure à la fin fonctionne vraiment.
Sinon j’adore votre blog.
Bien à vous
Davka
Merci, je suis sur que c’est mon frère ! Bonne lecture
Je suis quasiment sûre que nous ne sommes pas parents et j’ai malgré tout consacré quelques euros à l’achat de “Loin de quoi” ce que je n’ai jamais regretté. J’avais beaucoup apprécié le passage de la location de l’appartement où tout se passe tellement facilement que ça en devient extrêmement louche… pour un Français. Je peux même dire que je l’ai recommandé et prêté. Quant à “Dade City”, aucun regret non plus. Et celui là, je l’offre même parfois. Et à des gens bien ! Allez continuez à râler vous le faites mieux que quiconque !