Le dégoût du football

 

Année après année, le football s’éloigne de moi.

A la longue, il finirait presque par me donner la nausée.

Trop, beaucoup trop d’argent, ont (presque) fini par avoir raison de mon amour, de ma dévotion pour lui.

Ce n’est plus un sport, c’est devenu une mère maquerelle d’une vulgarité inouïe, une pute de luxe, une catin assoiffée de bijoux et d’oseille, qui exhibe chaque semaine son veau d’or devant lequel, nous autres amoureux transis de la prose footballistique, seraient censés nous prosterner et remercier des capitalistes plus ou moins véreux de nous offrir un tel spectacle.

Les clubs de football, autrefois étendards et porte-paroles d’une ville, d’une histoire, d’une mémoire, d’une culture, sont devenus de simples caisses enregistreuses, des entreprises sans cœur ni âme qui se contentent d’aligner des millions avec une ostentation obscène afin d’attirer dans ses filets les meilleurs joueurs de la planète.

Tout en se moquant éperdument de respecter les valeurs intrinsèques des couleurs qu’elles sont censées représenter.

Capables d’évoluer sans l’ombre d’un joueur formé au club, vague agglomérat d’individualités amoureuses de leurs nombrils, venues chercher non plus la gloire, non plus la communion avec le public, non plus la reconnaissance de leurs pairs, mais juste de quoi engraisser encore un peu plus leur mirobolant compte en banque.

Les joueurs s’échangent comme autrefois les vignettes de nos collections Paninis et changent de club avec la même avidité qu’une call girl délaisse un hôtel pour en coloniser un plus prometteur.

Sans aucun scrupule, on les voit passer d’un club à un autre avec une déroutante désinvolture, capables d’une année sur l’autre de déclamer leur amour éternel pour une équipe qu’ils quitteront sans regrets quelques mois plus tard.

De rouler une pelle à l’écusson de leur maillot après chaque but marqué, comme pour mieux signifier leur appartenance inébranlable à son histoire, avant de s’en servir la saison suivante comme torche-cul à leur collection de lingots d’or.

Les clubs ne représentent plus rien si ce n’est des ribambelles de millions qu’on dépose sur les pelouses en offrande à des joueurs mercenaires qui viennent goulûment se servir avant de décamper ailleurs.

Le football, sport hier encore incertain, plein de surprises et de rebondissements, est devenu affreusement prévisible.

Chaque année les mêmes équipes, les plus fortunées, les plus encrassées d’argent, les plus dégoulinantes de fric, se disputent les titres nationaux et européens, finissant par constituer une élite consanguine renouvelée à grand-peine et entretenant en son sein des connivences coupables.

Les joueurs changent mais l’argent reste.

D’une année à l’autre, une équipe peut se permettre de bouleverser la moitié de son effectif sans rien perdre de son prestige, juste en procédant à des transferts juteux à même de leur permettre de figurer en bonne place dans les compétitions disputées.

Les entraîneurs sont désormais des stars à part entière dont on se complaît à examiner la gestuelle sur leur banc de touche afin de mieux saisir l’essence même de leur supposé génie.

Tous les samedis, c’est la foire aux vanités recommencée.

Les gens ne vont même plus au stade, ils vont au zoo assister aux pitreries de joueurs transformés en homme-sandwichs, tous plus ahuris les uns que les autres, bien plus préoccupés de l’apparat de leur ahurissante coupe de cheveux ou de la dernière version de leur tatouage que de parfaire leur technique balle au pied.

L’amoureux du football lui, cherche encore des raisons d’aimer son sport.

Il regarde mais ne s’enthousiasme plus.

Il n’assiste plus à des matchs mais à des performances.

Il cherche en vain un joueur capable de lui redonner le frisson de son enfance ou une équipe susceptible de lui ressembler.

Il est orphelin.

Quelque chose s’est cassé.

 

En même temps, jeudi soir, Saint-Etienne se déplace à Qarabag (???) au Stade Tofiq-Béhramov à Bakou pour le compte de la première journée de la Ligue Europa.

 

Ça va chauffer nom de Dieu !

 

Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

 

8 commentaires pour “Le dégoût du football”

  1. Merci d’avoir trouvé les mots pour exprimer ce que m’inspire le foot d’aujourd’hui. A part les deux dernières phrases, tout est là.

  2. Ah la bonne vieille époque de la caisse noire, ça ça avait de la gueule !

    (ok, c’est du réchauffé, mais vous aussi…)

    A part ça d’accord, tout ça est du business.
    Pour la coupe de cheveux, il devrait y avoir un dress code dans le règlement, ça devient n’importe quoi.

  3. Vous restez fan de (et accro au) football : « eux » trahissent, pas vous !

    Vos considérations sont pertinentes. Mais pourquoi ne mentionnez-vous pas l’emprise des chaînes de télévision sur le football professionnel ? Sans cette monumentale place des retransmissions, les grands clubs seraient moins prisonniers de la course à l’argent, joueurs inclus. Sans doute formeraient-ils tous de jeunes espoirs, au lieu d’en acheter à d’autres clubs ou à l’étranger.

    Vos comparaisons : prostitution et mercenariat de luxe, stigmatisent sévèrement les joueurs et, moderato, vous ne loupez ni le narcissisme, ni la vanité tant des footballeurs que des entraîneurs. Cependant, un profond coup de griffes pour les dirigeants des clubs, et les diverses fédérations (nationales, européenne, mondiale) n’aurait pas été excessif : beaucoup s’engraissent sur les joueurs. Et, parfois, les privent de pelouse bien hâtivement. Sans parler des trafics et congédiements brutaux de jeunes recrues, soustraites au continent africain.

    Ce football est bien celui des sociétés de consommation : on exhibe le « Veau d’or » sur les stades (et les écrans) aussi souvent que possible. Mais, comme disent quelques journalistes spécialisés : sans ce fric (dont ils vivent), on retournerait au foot de pépé, qui n’était pas si mal : les joueurs se reposaient davantage – et sans « séances de récupération ».

    Et le foot de pépé n’aurait même pas empêché pas l’A.S. Saint- Étienne d’aller à Bakou…

  4. @ puycasquier : si les chaines achètent c’est que le public regarde non ? Le coupable, c’est l’abonné à Canal. Les autres acteurs (joueurs, entraineurs, présidents, intermédiaires) sont des opportunistes, et on ne peut guère leur en vouloir, leur “objet social” étant de faire du fric.

    En toute logique la bulle finira par éclater, comme toutes les bulles. Et les mouches iront ailleurs.

  5. cet amour pour Saint-etienne te fait tant ressembler au prince Charles…
    lui qui sous prétexte d’avoir été dépucelé il y a 40 ans par Camilla Parker Bowles continue encore maintenant de la regarder avec une béatitude incompréhensible.(les yeux de Chimène)
    et, malheureusement, le saint-etienne d’aujourd’hui, comme la vieille Camilla n’ont plus grand chose à voir avec ce que l’une et l’autre furent par le passé, au glorieux temps de leur apogée …. mais apparemment, comme pour le prince Charles, la puissance des souvenirs de jeunesse occulte et surpasse tout, et vous empêche tous deux d’être objectivement lucides ((et de passer à autre chose …))

    “Qarabag”???…..(quel déclin)

    “épouser une maîtresse, c’est mettre en hachis les restes d’un vieux gigot”

  6. Merci d’aimer le football au point de le vomir et d’en parler brillamment.

  7. @ achtungbaby

    Une cause (retransmission des matchs) peut être l’effet d’une ou d’autres causes (l’appétit de spectacle footballistique ; le coût prohibitif, pour pas mal de spectateurs, des places dans un stade, etc.). Cela dit, si la télévision ne s’était pas précipitée, telle la misère sur le pauvre, pour mettre dans sa poche les amateurs de foot en les aguichant avec force images et écrans de matchs, et les ferrer ensuite avec des abonnements… monnayés, probablement que les stations assises et/ou allongées devant un écran où des sportifs, eux, “évoluent” – curieuse activité pour des fans de… sport, vous me l’accorderez – baisseraient en quantité et en durée.

    Qui sait ? Au profit peut-être de l’exercice personnel de joueurs amateurs pratiquant les pelouses des petits stades. Et n’objectez pas que l’on peut être et fan et pratiquer le sport correspondant. C’est exact… jusqu’à un certain âge.

    Quant aux “bulles” qui éclatent toutes, maints exemples, à commencer par ceux de la Bourse, attestent que certaines ne tardent pas à se reformer – avec, bien entendu, les complicités de ceux qui en tirent profit.

  8. Oui c’est vrai, ces types trop payés ne font qu’environ 2 heures de vrai travail par semaine, il faudrait pouvoir les savater…. Si vous voulez une ambiance saine, il vous reste encore les divisions d’honneur….. mais haaaan arrêtez de cracher dans la soupe, vous êtes un parieur invétéré, donc vous faites votre beurre grâce aux noirs et aux beurs, ils triment pour vous !

Laissez un commentaire

« »