L’Elysée à la Porte de Bagnolet, c’est pour quand ?

 

 

Et soudain, en regardant cette photographie, on comprend tout :

elyse

Le divorce entre le politique et le peuple, l’ahurissant décalage entre un pays supposé en crise et leurs représentants, accaparés par les ors du palais présidentiel, symbole criant de l’existence d’un anachronisme flagrant au sommet d’un état encrassé sous les vestiges sacramentels d’une monarchie qui partout ici scande sa présence continuelle.

Ces plafonds vertigineux de hauteur, ces délicates dorures aux liserés enluminés, l’infinie préciosité des meubles, la porte obscène de grandeur, le fauteuil en bas à gauche devant servir de reposoir au laquais dont on devine l’inutile présence en arrière-plan avec ses chaînes dégringolant sur son costume de livrée, le tapis aux contours parfaits, les bibelots inutiles, le lustre éclatant, le miroir où se reflète la parfaite ordonnance d’une société bien à l’abri des vicissitudes du monde extérieur.

Tout empeste ici l’esprit sacré de la monarchie, la France statufiée dans le marbre de sa splendeur révolue, la grandiloquence désuète d’un décor figé dans le vestibule du temps, l’intemporalité de l’exercice du pouvoir, le vertige de vivre claquemuré dans un palais où se chuchote, entre deux salons dorés, le récit magnifié d’une histoire de France dont on essaye de perpétuer la tradition à travers les siècles.

Cette photo n’a pas d’âge.

Elle aurait pu être prise il y a vingt ans, il y a cent ans, il y a mille ans.

Elle incarne à elle seule l’immanence absolue du pouvoir, son arrogance feutrée, sa propension à se penser éternel, sa croyance en sa toute puissance, son refus d’accepter le monde tel qu’il est, son aversion pour tout ce qui relève du normal et de l’ordinaire, son appétence pour l’opulence.

On ne peut pas saisir l’essence d’un peuple, ses tourments, ses aspirations, ses revendications, ses chagrins et ses espérances en évoluant dans un cadre tel qu’il vous berce de chansons intemporelles évoquant les dames de compagnie et les chasses à courre des Princes d’Aquitaine.

Ça doit finir par vous bouffer le cerveau.

Vous corrompre le cœur.

Vous étourdir de magnificence obsolète.

Vous empêcher de penser la réalité du pays.

Difficile d’exiger des gens des sacrifices perpétuels en continuant de parader dans un tel décor.

Il n’est pas question de céder à un populisme de bon aloi en invectivant les deux personnes présentes sur cette photo.

Elles ne sont que l’incarnation passagère d’un pouvoir qui se perpétuera au-delà de leur règne.

Mais plutôt l’occasion de se dire qu’il serait peut-être temps de rentrer de plain-pied dans la modernité.

De désencrasser la République. De la déversailliser. De la désacraliser afin qu’elle finisse par nous ressembler.

De cesser de la penser comme une opérette viennoise où virevoltent dans la grande salle du bal les dignes représentants des corps constitués qui du bout de leurs mains gantées décident de l’horoscope des potions amères que le peuple d’en-bas devra avaler.

De redescendre parmi le royaume des vivants.

De mettre au rebut cette opulence qui écœure.

Ce faste grandiose et saugrenu.

De quitter ces limbes dorés où s’assoupissent les désirs de vrais changements et les envies de chambouler les protocoles d’hier.

Ici l’esprit des lieux doit finir par vous figer.

Même le plus audacieux de nos politiques, le plus réformateur, le plus féroce dans ses déclamations de promouvoir une nouvelle république, une fois installé dans un décorum pareil, doit finir par renoncer, sans même s’en apercevoir, à ses envies de bousculer l’ordre établi.

La richesse finit toujours par rendre l’esprit le plus intrépide qu’il soit émollient et paresseux.

Elle achève de vous pétrifier et vous congèle de l’intérieur.

La prestation de Manuel Valls a donné entière satisfaction à l'Elysée.

Et, en se perdant dans la contemplation de cette photo éclaboussée de ces oripeaux dorés, on ne peut s’empêcher de penser que sur la table où dissertent nos deux gouvernants repose la feuille de route destinée à trouver ces fichus 50 milliards de réduction des dépenses publiques.

 

Ne cherchez pas plus loin : ils sont là tout autour de vous.

 

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27 commentaires pour “L’Elysée à la Porte de Bagnolet, c’est pour quand ?”

  1. Bonjour,

    Ce faste, ces grandeurs, ces bâtiments intemporels et démodés dont vous parlez, ne sont-t-ils pas le refuge d’une France en décadence?
    Un moyen de promouvoir avec aveuglement l’illusion d’un rayonnement universel terni par le présent. Des sortes de rêverie sacrée d’un pays à la pointe de “je ne sais quelle prééminence” culturelle et intellectuelle.

    Pour preuve, tous les questionnements pleins d’allusions sur l’identité nationale et les chimères d’une France qui se relèverait avec ardeur d’une période troublée par un métissage physique et idéologique méprisant ses codes et ses vestiges.

    En s’arrêtant à la forme, force est de constater que les Français rejettent un leadership “normal” et sans éloquence. Les temps d’élections présidentielles en sont un exemple tellement criant.

    Aujourd’hui, on nous propose de foncer dans le mur avec le sérieux d’un remaniement autoritaire (au point de fouler au pied les statuts du PS. #harlemdesir) sans répondre aux préoccupations des citoyens dans le fond.

    Peut-être, ce que je vois dans l’image “monarchique” est mal interprêtée et qu’une réponse à une époque pleine de tourments est espérée.

  2. suis pas sur qu’à Bercy ce soit aussi joli, pourtant…..

  3. Ça devient lourdingue. Si il y a bien quelqu’un qui n’en a strictement rien à foutre des dorures de l’Elysées c’est Hollande. Le problème est ailleurs. Par contre je ne suis pas contre raser ce machin qui n’est plus du tout un outils adapté à notre époque.

  4. raser, comme vous y aller, un musé au moins, non?

  5. La table fait vraiment tache.

  6. Visitez l’administration et le site de la Chancellerie fédérale d’Allemagne:
    ENG: http://www.bundeskanzlerin.de/Webs/BKin/EN/Chancellery/Virtual_tour/virtual_tour_node.html
    ALL: http://www.bundeskanzlerin.de/Webs/BKin/DE/Kanzleramt/Rundgang/rundgang_node.html

    Virtueller Rundgang durch das Kanzleramt

    Willy-Brandt-Straße 1 in Berlin-Mitte: Seit 2001 ist das imposante Gebäude im Spreebogen an der Nahtstelle zwischen Ost und West Regierungssitz der Bundesrepublik Deutschland. Sozusagen die Schaltstelle der Macht. Besuchen Sie das Kanzleramt in einem virtuellen Rundgang.

  7. En accord et en désaccord avec l’article.

    En désaccord :
    La grandeur, la prestance de la France, ce sont également ses dorures, ses lieux “versaillais” symbole de son histoire, de son héritage, de ses devoirs.
    Ferait-on une meilleure politique dans un open-space ou un bureau austère fait de meuble IKEA ?

    En accord :
    Effectivement, avec la crise, la distance entre le peuple et ses gouvernants se fait de plus en plus grande, notamment par ces signes ostensibles de richesse.
    Toutefois le problème n’est pas le lieu, mais ceux qui l’habitent. Ce sont eux qui sont pervertis par le pouvoir et, puis, par ses avantages (dont les lieux, etc.).

  8. sans intérêt, hyper-naze et démago, cet “article”…
    le décor on s’en f…
    La preuve, dans ce même décor il y a eu des gouvernements très proches des préoccupations du peuple et d’autres très hautains ! Vous allez faire le même article sur la Maison Blanche, le Bundestag, le Palais du Quirinal, le Palais de La Moncloa…?
    ça va être passionnant, je sens.

  9. Depuis quand un decor / batimet / bureau est la cause de l’immobilisme politique ? Ne devrait-on pas plutot fustiger un peuple irresponsable et idiot qui appel le changement mais pour le voisin et qui fustige toute reforme par une sanction electorale ?

    Quant au souhait de raser le dit palais ou d’en faire un musée, ne devrait on pas au contraire préserver ce luxe, memoire d’un passé grandiose ?

  10. @ Myself, cela nous en fait donc 3 sur la même photo.

  11. cet article me fait penser à ceux qui prônent de raser les églises, les temples et les synagogues au prétexte qu’elles ne sont pas occupé, ou si peu, d’y loger, comme proposait Mme Duflot, des SDF, car après tout, c’est vide !

    alors on met une Pyramide devant Versailles, les colonnes de Buren au Palais Royal, on bétonne les plage, on fout des éoliennes dans le Larzac pour la conscince du petit parisien écolo, etc… bref, on “dénature”, au sens propre du terme, le patrimoine que le monde entier nous envie et qui fait affluer chaque année des millions de touriste qui sont autant d’argent !

    on peut reproduire ce patimoine, ces paysages, comme le fait la Chine, mais on ne peut pas reproduire ce que les flots de tourites viennent chercher : la France éternelle, la France authentique.

    il ne faut pas vivre dans le passé, mais préserver notre héritage qui est un actif bien plus important, et si la différence est subtile, elle fait toute la différence entre une rébellion d’ado et la sagesse des anciens.

    et à cet attaque, on peut opposer que F.Hollande et M.Valls doivent trouver eux même ce décorum un peu lourd, mais qu’il vaut sans doute mieux pour l’image de la France et sa perennité recevoir des hôtes de prestige dans ce Palais qui a du cachet (!) plutôt que dans un bâtiment identique à celui d’une entreprise lambda.

    enfin, est-ce de la jalousie ? je préfère que l’on remercie nos élites, quel que soit leur politique, pour leur travail au service de la France, là où ils ne comptent pas leurs heures ! je préfère un président tout occupé à sa charge, plutôt qu’il n’ait à payé ses factures d’eau et d’electricité lui même, prendre le vélo, le train, et toutes ces hypocrisies.

    @Sagalovitch : totalement démago ! on ressort la guillotine et après ? au tien une poule aux oeufs d’or… petit ! … petit ! …

  12. Si ca vous plaît de payer des impôts pour rétribuer une personne dont le métier premier consiste à ouvrir la porte au président de la république et à la refermer derrière lui, libre à vous ! Plus sérieusement ( encore que ), je suggère simplement que de vivre dans un tel décor finit inexorablement par vous engourdir. Le passé nous surplombait de sa puissance se plaignait les Pompidou.

  13. ce dernier a d’ailleurs permit à des artistes contemporains d’aménager à leur guise l’un des salons du palais de l’Elysée.

    pour ce qui est de l’engourdissement, je pense que de deux choses l’un :
    – soit il s’agit d’un homme très intelligent, intègre et désintéressé s’il on est optimiste, ainsi il ne s’engourdit pas
    – soit il sagit d’un parvenu, et ainsi, il n’est pas à l’Elysée puisqu’il s’es engourdi bien avant d’y parvenir

    je peux paraitre naïf, mais un peu d’optimisme envers ceux qui nous gouvernent que diable !

  14. Je suis tout à fait d’accord avec la conclusion, le pragmatisme est la meilleure réponse à tout ce merdier. Les 50 milliards sont à prendre là où ils sont. Ca ce serait moderne et efficace, une vraie réforme digne de la grandeur de l’idée que l’on pourrait se faire de la France avec un grand F comme faire.

  15. j’ajouterai pour enfoncer le clou que je ne vois aucun inconvénient à ce que les champions en politiques bossent dans des bureaux ikéa.

  16. Tout le monde ne peut pas se le permettre.

  17. Inutile cet article, démago même ! Aberrant de voir une démonstration faite à partir de si peu. C’est comme disserter sur les glaces de Versailles ou la hauteur de la tour Eiffel. Ils sont là et représentent la France autant que le vin et le fromage. S’engourdir ??? prenez leur emploi du temps et on verra s’ils ont le temps !!! Démontrer ce qui ne va pas chez quelqu’un en s’attaquant aux apparences, c’est mesquin, vain et une preuve d’immaturité !

  18. La Porte de Bagnolet, aux édifices moins « dorés » que l’Élysée, moins saturés de cette « opulence qui écœure », viendrait-elle à bout du figement dont souffriraient les têtes de l’exécutif ? Ce serait conférer à « l’esprit des lieux » un pouvoir quasi magique. Ce procès fait aux palais de la République, selon l’expression consacrée, est une vieille lune. L’instruire à nouveaux frais est oublier que les occupants de l’Élysée actuels, et passés, ne sont de ces lieux fastueux qu’éphémères locataires. Et non les maîtres qui y seraient nés. Leur prêter l’éventuelle graisse mentale et affective – refroidie, donc figée – dans laquelle supposément se vautrèrent les aristocrates… avant la lanterne du chant révolutionnaire, paraît inapproprié.

    Mais libre à chacun de penser ce qu’il veut, et croit être la vérité.

    Tout au plus pourrait-on avancer, en leur supposant une mentalité de parvenus – ce serait peu charitable – que les résidents de l’Élysée et de l’Hôtel de Matignon jouiraient de… péter dans la soie et les ors d’Ancien Régime. Rien ne permet de le penser. En divers autres lieux, en revanche, lieux souvent marqués du sceau anguleux et frisquet d’un modernisme architectural de bon aloi, quelques élus se gobergent, allant même jusqu’à s’offrir, en des lieux proprement personnels, des services réglés par le citoyen contribuable…

    Alors, faire au sens propre table rase de la multitude d’édifice qu’un passé royal et doublement impérial transmit à la France s’impose-t-il ? Fût-ce au motif qu’une vision psychologique sommaire le prescrirait ? Jusqu’à la Russie soviétique conserva maints édifices de son très long passé prérévolutionnaire, substituant parfois au nom ancien de villes riches de grandioses palais – encore visités par force… prolétariens touristes de toutes provenances – un nom plus « Octobre 1917 ». En somme, une table rase purement symbolique.

  19. Athletico-Chelsea et Real-Bayern ?

  20. Ou alors on trouve un compromis : “Porte dorée” ?

  21. J’ai lu un papier de l’arrivé à l’Elysée de Hollande, alors que ses collaborateurs se réjouissaient lui ne s’est pas emparé des lieux, ils auraient pu se trouver dans un Formule 1 que ça n’aurait rien changé. Ce qu’il voulait c’est être Président, le pouvoir, mais sait il l’exercer? On peut critiquer ses consensus sans fin, ses procrastinations ou encore son optimisme béat mais dire que les dorures l’ont endormi je n’y crois pas. Si par le passé l’or était synonyme de puissance desormais elle se manifeste autrement, le rococo est désuet. Même si il est social démocrate il a un logiciel un peu vieillot à la base dont il n’arrive pas à se séparer ou du moins à faire évoluer.

  22. BINGO ! 🙂

  23. Y’a pas un mégaloto ou un truc dans c’genre ce week-end ?

  24. Vince, malheureusement, statistiquement ça va se gâter… Là il n’y avait que 4 équipes…

  25. Jalouse.

  26. C’est sur que l’espingouin et le gros zerolandais ne sont pas à leur place…
    Plutot que de changer le décor, ne faudrait il pas plutôt changer les acteurs ?

  27. Si on était encore à Versailles, d’accord oui mais là ce n’est pas Versailles. Alors c’est quoi la proposition? On passe tout ce mobilier dans un musée pour qu’il reste sous verre et on dépense des sous pour tout réaménager, ou essaye de rentabiliser l’existant et de l’utiliser puisque c’est sa fonction.
    Est-ce que si on déménage tout ce monde dans des locaux à la Défense ou dans un immeuble à Bagnolet, on aurait plus d’efficacité? A part les transformer en hauts fonctionnaires, cela ne changera rien.
    Et à être dans un lieu d’exception comme cela, peut-être que cela peut aussi leur faire prendre conscience qu’ils sont dans un lieu chargé d’histoire, qu’ils n’occupent pas n’importe quelle fonction et donc qu’ils ont des responsabilités importantes.
    Ce n’est pas avoir un gouvernement dans des bureaux Ikea qui va plus contribuer au rayonnement de la France.
    Si la richesse de ce palais n’était pas le fruit d’un long héritage mais était nouvellement acquis sur le dos des Français, alors oui y’aurait de quoi être déconnecté de la réalité mais ce n’est pas le cas là. Ce n’est pas ça qui fait qu’on est déconnecté ou pas, c’est si on reste ou pas dans sa tour d’ivoire, que ce soit au palais de l’Elysée ou dans des bureaux à Bagnolet…

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