Le chômage augmente ? M’en fous, je n’ai jamais travaillé

 

Je l’avoue bien bas : l’annonce des derniers chiffres du chômage, qui désormais provoque chaque mois dans tout le pays une poussée de fièvre équivalente à l’attente du résultat du Grand Prix d’Amérique, ne m’a guère ému.

Et pour cause : de toute ma vie je n’ai jamais travaillé. A l’heure où j’écris ces lignes, je ne travaille toujours pas, et vu comme c’est parti, avec un peu de chance,  je ne travaillerai jamais jusqu’à ma mort quand sonnera l’heure de prendre un repos bien mérité.

Je n’ai jamais mis les pieds dans une agence de Pôle Emploi.

Jamais passé un entretien d’embauche.

Jamais envoyé un cv avec ma tronche de juif acariâtre épinglé en haut à gauche de la liste de mes diplômes obtenus se résumant à mon seul certificat de Bar Mitzvah, décroché avec mention Casher, lors de la très difficile session de juin 1981.

Histoire de rassurer le français de souche qui, suite à une erreur d’aiguillage googlesque, se serait égaré sur ce blog en tapant les mots clefs suivants, juif, con, chauve, je m’empresse d’ajouter que je n’ai jamais touché le moindre kopek des Assedics.

Ni le RMI ni le RSA ni la CMU ni la soupe populaire ni les tickets de rationnement.

Je n’ai rien coûté au pays où j’ai eu la mauvaise idée de naître.

Je n’ai jamais demandé à un improbable chef la permission d’aller lire l’Equipe aux toilettes ou de partir cinq minutes avant la fermeture du magasin pour m’en aller prendre le RER B de 17h59 afin de pouvoir rattraper la correspondance avec le TER 2514 à la hauteur de Châtenay-Malabry.

Jamais ordonné à un blanc-bec à peine débarqué de son école de commerce d’appeler ma femme pour l’avertir de dire à mes enfants que leur papa les aimait beaucoup mais que ce soir le Chaperon rouge resterait en carafe au bureau à jouer de la cithare avec sa comptable en chef.

Je n’ai jamais su ce que j’allais faire de ma vie sauf que je n’allais jamais jamais jamais travailler.

Ma mère m’a supplié à genoux, mon père m’a promis de me déshonorer, ma sœur a changé le nom de son poisson rouge affublé du même prénom que le mien, ma tante m’a répudié, ma cousine m’a dénoncé au fisc, mon oncle d’Amérique a changé d’adresse, mais j’ai tenu bon.

 

Je trouvais la vie assez pénible comme ça pour ne pas de surcroît me fatiguer à passer mon existence claquemuré entre les quatre murs d’un bureau même pas climatisé à entendre les jérémiades d’un collègue de travail remonté contre son garagiste coupable d’avoir salopé la remise en forme de sa berline d’occasion.

Ou à subir les mouvements d’humeur d’un supérieur hiérarchique me convoquant dans son bureau pour m’intimer de cesser de le regarder de travers quand je le surprenais en train de lire le Figaro Magazine.

Je préférerais être pauvre comme Job, affamé comme un sud-soudanais, fagoté comme un vagabond polonais, coiffé comme un hooligan, me savonner à la pierre ponce et biberonner du whisky breton acheté chez Leader Price plutôt que d’attendre de recevoir à la fin du mois une fiche de paye correspondant au nombre d’heures perdues à ruiner ma vie auprès d’une compagnie d’assurance spécialisée dans le fret maritime.

Je n’ai jamais compris comment la notion de travail et de labeur pouvait revêtir un caractère vertueux.

J’ai appris à vivre de peu, à me contenter d’un rien et à choisir des compagnes fortunées qui, contre la lecture d’un poème de ma composition dédié à leur éternelle beauté, me susurrent, entre deux étreintes diaboliques, le code secret de leur carte de crédit.

J’ai appris à rédiger avec succès des demandes de bourse concernant mon domaine de compétence, lequel demeure encore très flou, discipline quasi-olympique dans laquelle je continue à exceller.

Certes, je crains fort de ne laisser à mon chat aucun château en Espagne où il pourrait se reposer en se souvenant, ému, de la gratitude de son maître adoré.

Je ne possède rien. Absolument rien.

Ni voiture, ni sicav, ni plan d’épargne logement, ni stock-options, ni dettes de jeu, ni maîtresses à gâter, ni points pour la retraite, ni fonds de pension, ni coupons de réduction pour la Halle aux chaussures.

Rien.

Rien si ce n’est cette fierté, car c’en est une, de n’avoir jamais vraiment travaillé.

 

( Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )

 

45 commentaires pour “Le chômage augmente ? M’en fous, je n’ai jamais travaillé”

  1. vous êtes ? vous êtes ? un passager clandestin !

  2. tout va bien dans votre petite vie, sauf la dernière ligne : la fierté. Ca gache tout.

  3. bon je sais, je suis en retard mais à écouter d’urgence, des p’tits jeunes qui n’en veulent totalement hors des sentiers battus.
    http://www.youtube.com/watch?v=RyuUNeCrAn4
    https://www.youtube.com/watch?v=HMpmedi_pH4#t=109
    sinon, le soir en partant du travail j’écoute le dernier opus d’étienne daho au demeurant fort sympathique.je précise le soir parceque le matin c’est plutot techno péchue histoire d’avoir la pêche!

  4. A force de ne pas travailler, vous vous faites chier et vous abusez du blog…résultat, les articles se multiplient plus vite que les petits pains chez certains…
    Vos billets peuvent être parfois vraiment excellents mais d’autres mériteraient sans doute un peu de travail…alors au boulot !

  5. vous usez vos doigts sur le clavier de votre ordinateur et vous appelez çà vivre?
    vous ne connaissez pas le bonheur des embouteillages le matin, la mauvaise humeur du patron (ou du supérieur), les ragots des collègues…
    vous ratez votre vie!

  6. Réponse de la travailleuse smicarde qui n’a pas choisi les responsabilités qui lui échurent : que dire, veinard ?

  7. Je crois que, concernant la relation entre la travail et la vie, certaines personnes sont peut-être nées sur Terre pour nous servir d’exemple. Regardons donc Liliane Bettencourt, une femme aussi connue que charmante et qui n’a probablement jamais travaillé de sa vie. Liliane est-elle malheureuse pour autant ? Je ne le crois pas ! Je suis même persuadé que c’est une femme tout à fait heureuse, peut-être même la femme la plus heureuse du monde, qui le jour va profiter du soleil en compagnie du sable fin et des oiseaux sur son île, et qui le soir s’en va rejoindre le château familial pour goûter un moment de contemplation…

  8. Vince, Diana aussi était heureuse en faisant bronzette en Sardaigne le jour et diner au Ritz le soir. Et puis il y a eu la rencontre…

  9. Liliane est veuve.

  10. et m’siou Sagalo va lui murmurer des poêmes.

  11. @Nico : et ?

  12. @Baby, Nico travaille surement chez Meetic 4eme age

  13. ok, j’avais pas compris ! Mais la belle a l’air de préférer les joyeux lurons qui la divertissent aux vieux ronchons. Notre hôte n’a guère de chances.

  14. Travail vient du” trepalium” qui était un instrument de torture chez les Romains. E n russe, travail on dit rabota, qui vient de “rob” (esclave) ! Donc, effectivement, il n’y a aucune fierté dans le fait de travailler, il ne faut pas se leurrer !

  15. l’idée me plait, mais prosaiquement, comment faites vous ? (manger, boire, se loger, acheter un ordinateur…..)
    Pas d’assedic ? Que des compagnes riches ?

  16. @Sarah : en plus d’un certain dédain, il y a un peu de frime dans cette chronique : critique littéraire, auteur de romans, ce sont des boulots comme les autres : avec des avantages et des inconvénients. Et accessoirement ça permet de remplir le verre de bourbon.

  17. J’ai des porte-paroles maintenant, c’est fabuleux !

  18. @baby, l’argent, le travail…tout ça ne fait pas le bonheur 🙂
    Et Slativozitch est écrivain, le “métier” le plus cruel qu’il soit, certains disent même que ça sert juste à rester en vie.

  19. @ Nico : on prend une com ?
    :o)

  20. C’est gratuit 😉

  21. paresseux , gratteur, scribouillard…ton épitaphe promet d’être gratinée…..

    ci gît laurent sagalovitsch , enfin propriétaire de sa première (et dernière ) demeure…
    ” la paresse nous l’avait enlevé bien avant la mort…”

  22. heureux branleur qui contemple son trou de balle.

    veinard.

    et souple.

  23. Le monde du travail c’est des plantes vertes qui dépérissent et du café dégueulasse. Vous ne loupez rien. C’est combien pour le poème susurré au creux de l’oreille ? Je viens de toucher mon treizième mois.

  24. Pour les allumés qui veulent voir comment défoncer la fonction d’onde, voir mon blog. Tranquillement.

  25. @Vince, vous avez un blog!!?? et l’adresse alors!!

  26. @the red : la voilà :
    http//www.acheter-ma-matiè[email protected]

  27. Joli hommage à Debord.
    “Ne travaillez jamais”

  28. Bon, j’ai tapé “juif + con + chauve” dans google, on trouve d’abord le site :
    http://www.jetenculetherese.net/societe/je-perds-mes-veuches-la-calvitie-quest-ce-que-cest/
    et en deuxième position effectivement on tombe sur Sagalo ! Bien vu, les clics vont doubler !

  29. @O5Live : sinon vous tapez Norvège + fils + mariage et vous tombez sur juif + con. La connerie étant la chose la mieux partagée au monde.

  30. “tombée d’un gratte-ciel”

  31. Est-ce que le gratte-ciel venait de se prendre deux avions dans la gueule ? Auquel cas on pourrait penser que c’est un complot de la CIA.

  32. Nico : je suis contre le nivellement par le bas. Un juif con sera toujours un peu moins con qu’un goy con, puisqu’il est juif. Logique non ?

  33. “Je n’aimais pas les ors de l’Élysée. L’Inde, c’est un retour vers la liberté, loin du monde politique et de ses trahisons”

    Encore une qui va nous expliquez que le chomage lui va bien. L’époque est à l’indécence, voire à la vulgarité.

  34. Ca va bien les gringos ?

  35. @Vince, jolie courbe
    @Olllllive, WTF?

  36. @vince, non ça ne va pas, je n’ai pas l’adresse de votre blog….

  37. @rakam, il faut cliquer sur le vince gris…
    Quelqu’un a lu son horoscope? http://www.courrierinternational.com/horoscope
    Vous saviez que Slate est Verseaux? Ferait bien de le lire, sont créatifs comme du béton.

  38. @Nico, merci!!

  39. J’entends parfois parler de “français de souche”, et je me demande : il faut creuser jusqu’à quelle profondeur pour l’avoir la souche ? C’est genre 50 cm, un truc comme ça ? Non parce que si c’est plus profond j’vous le dis tout de suite c’est pas pour moi c’truc même si Gégé il a un pote qui bosse dans le BTP et p’têt il pourrait me prêter genre un tractopelle contre un bouteille de pif.

  40. pourquoi Jourdan n’est pas en gris?……ouarf!!!
    désolé…..

  41. De rien! Maintenant Slate fait dans les enfantillages de psychologie de comptoir. C’est marrant. Moi aussi je sais le faire! http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/charles_baudelaire/le_tonneau_de_la_haine.html

  42. Marche pas. Ça faisait longtemps.

  43. Bon bah j’suis pas débordé, j’ai déniché ce truc http://www.cahiersdujournalisme.net/cdj/pdf/13/04_Labasse.pdf il est écrit d’une par que “la réalité ne tient pas en un feuillet ou en une minute d’antenne. Seul un extrait de réel peut être présenté, mais celui-ci, par définition, lui est aussi semblable qu’un steak haché est semblable à une vache.” et d’autre part “ce que les hommes de presse devraient savoir et que le
    public devrait en attendre». http://www.ajspi.com/comment-devient-journaliste-scientifique/foire-aux-questions/comment-devient-journaliste Voilou, voilou.

  44. Vince, vot’truc de principe d’équivalence là, ça pourrait pas aider not’président qu’est dans la mouise avec ces courbes ?

  45. @ achtung : il y a plus simple, il suffit de dire qu’il y a 90% d’actifs ou lieu de dire qu’il y a 10 % d’inactifs, et hop ! le tour est joué.

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