Il ne me manquait plus que cela.
Comme si ma vie n’était pas déjà assez décevante.
Comme si je n’avais pas suffisamment conscience de la totale insignifiance de mon existence, de mes échecs répétés, de mes fêlures qui jour après jour deviennent des crevasses dans lesquelles je m’embourbe de plus en plus, traçant avec une obstination rare le sillon de ma propre et infinie bêtise.
Visiblement non, ce n’était point assez.
Il a fallu que j’apprenne ce matin lors de ma rituelle séance de décrassage de la presse quotidienne, que mon chat, l’objet de toutes mes attentions, celui qui m’honore de sa présence pour attendrir mes chagrins, cette boule de poils que je jugeais de naissance supérieure, à qui je prêtais des élans vers la perfection, était en fait, comme tous ses congénères, un affreux daltonien atteint d’une myopie carabinée.
Un monde s’écroulait.
Ainsi donc quand durant de longues minutes nous échangions des paires de regard où je soupçonnais l’intensité des conversations qui devaient animer les disputes métaphysiques entre Sartre et Camus, je m’égarais puisque cette buse de chat dans ces instants partagés n’apercevait de ma personne qu’un halo trouble où mes yeux devaient ressembler à de vagues formes de croquettes allongées.
Que durant ces instants suspendus dans l’éther de l’éternité où il me fixait de ses ardentes prunelles, je le soupçonnais d’avoir accès à la clé mon âme, de connaître tous mes mystères et tous mes secrets, je me trompais lourdement puisque, myope comme une taupe, du regard pénétrant que je lui lançais, ce nabot à moustaches ne savait rien.
Ou bien alors quand rentrant d’une promenade, je l’apercevais sur le rebord de la fenêtre, je devinais à travers la fixité de son regard s’attardant sur moi, son contentement de me savoir de retour.
Alors que non, fatale erreur, cette buse de matou n’apercevait juste qu’une masse difforme s’agitant imbécilement sous ses yeux ahuris pour tâcher de lui adresser un salut dont il ne comprenait ni le sens ni la teneur.
Et que dire de ces voyages que nous effectuâmes lui et moi, moi et lui, dans des contrées lointaines où je ne manquais jamais de l’emmener, l’invitant à gambader dans des pelouses éclaboussantes de verdure alanguies le long de lacs bleutés, paysages somptueux dont j’aimais à penser qu’il ravissait chez lui son sens inné de l’esthétisme.
Alors que de toute évidence cette truffe de chat ne voyait dans ce vert éclatant qu’une infâme bouillie tirant au jaunâtre et de ce bleu ensorcelant qu’une vague étendue grisâtre.
Je savais mon chat fourbe, je le découvre menteur et affabulateur.
Je le pensais voyant, messager de Dieu sur terre, porteur de sagesse infinie, j’apprends qu’il ne voit pas à deux mètres, qu’il confond le rouge avec le noir, et partant, qu’il s’avère tout à fait inapte à saisir l’intensité de mon regard de braise.
Pour me consoler, l’article m’apprend qu’il excelle à voir de nuit.
Comme si je ne le savais pas!
Combien de fois me suis-je étonné de le trouver, au beau milieu de la nuit, campé sur le rebord de l’évier de la salle de bains à attendre d’étancher sa soif à l’eau fraîche du robinet alors qu’il m’avait fallu un temps infini à trouver mon chemin entre ma chambre à coucher et les toilettes, manquant à chaque fois de trébucher sur l’aspirateur ou de m’enfourcher sur le balai à brosse ?
Pas étonnant après cela qu’il passe ses journées à flemmarder.
A force de tout voir en flou, dans des teintes jaunes grisâtres, le réel doit l’ennuyer mortellement.
Finalement, il n’est pas si différent que moi.
Moi aussi parfois le réel m’ennuie.
Et combien de fois alors que dans le ciel sans nuages un soleil de feu plastronnait me suis-je surpris à trouver le monde alentour d’une noirceur désespérante ?
Accours-ici, mon beau chat, que je m’excuse d’avoir douté de ta splendeur inégalée.
Comment ca où suis-je ??? Mais là enfin, en face de toi, triple couillon de chat !
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Oui, votre chat et myope et Moïse était bègue, ça donne à réfléchir sur ce en quoi réside la perfection hein ?
Je mangerais bien une croquette géante moi… soit dit en passant.
Vous vous prenez pour Râblais? Mirbeau peut être? Vous n’avez plus d’humour? Ce papier est ridicule, c’est surtout vous l’ennuyeux.
Chose peu connue du grand public, les femmes ont le même problème de vision que les chats (d’où leur sens de l’orientation déficient, leur conduite automobile, etc… Vous pouvez faire le test n’importe où dans la rue : parlez à une femme au hasard, elle continuera sa route comme si vous n’existiez pas !).
et ta (votre) sœur ?
Libre à vous d’ignorer les enseignements de la science et de rester un idiot toute votre vie, monsieur “Jourdan”.
c’est vrai qu’on a tendance à transposer ( trop ? ) sur les chats et que leur réalité visuelle et spatiale doit être bien différente de ce que l’on imagine…en même temps je suis sceptique sur ce type d’étude qui prétend, à l’aide de montages, nous éclairer sur ce que voit un chat. le mystère réside dans les leurs yeux et c’est ce qui est fascinant.
quand je vais aux toillettes chez moi, souvent mon chat se met derriere la fenetre et miaule comme un taré pour que je lui ouvre la porte.j’ai beau lui répéter 10 fois, je finis et je t’ouvre, il continu à miauler comme un taré(on peu dire charé?) .j’en conclu que le chat est également sourd…….c’est nul un chat en fait…..
En même temps, de l’intérêt, pour un chat, de bien voir au milieu d’un paysage alpin, au sommet de gratte-ciels ou dans un hall de gare…
Moi ça m’défrise, vous avez de drôles de préoccupations.
salut, je suis hyper déçu également…. je prêtais les mêmes sentiments à mon greffier… (entre nous, dans votre profession de -mauvaise- fois, il y a un “s” de trop dans “je prendraiS un malin plaisir”… J’ai pris bcp de plaisir à vous lire…