Neil Armstrong, le criminel de l’espace

Non ce ne fut pas un petit pas pour l’homme et un grand pour l’humanité. Tout le contraire. Ce fut l’ultime croche-patte que l’homme, dans toute sa crasseuse vanité, s’infligea pour s’automutiler sur le dôme du progrès.

Non seulement l’exploration de la lune ne nous rapporta rien, absolument rien, si ce n’est de lustrer de gloire les étoiles pâlissantes du drapeau américain, mais elle assassina l’une des plus belles et des plus évocatrices rêveries que l’homme n’ait jamais eue.

Pendant des siècles, la lune fut cet astre merveilleux, énigmatique, fascinant que l’homme aimait à contempler quand le chagrin se faisait trop lourd. Quand la pesanteur de vivre nous engourdissait de trop. Quand la réalité prenait les traits cauchemardesques d’une existence moisie que rien ne venait éclairer dans sa torpeur d’un quotidien effarant d’ennui.

Alors, par la lucarne de sa fenêtre, il pouvait se perdre à loisir dans la contemplation émerveillée de cette féerie ensorcelée et sans cesse changeante que dessinait cet astre rêveur, cette lune suspendue dans l’immensité du ciel étoilé se penchant avec sollicitude sur nos peines de cœur et sur nos amours défunts.

La lune confidente de nos pensées les plus secrètes.

La lune amicale comme une grande sœur attentionnée.

La lune tendre comme une amante délicate.

Sitôt que Neil Armstrong a posé ses godillots sur le ciel lunaire, il a souillé à jamais ce rêve d’un astre dont le mystère avait constitué tout au long de l’histoire de l’homme la source de tant de rêveries et de tant de fantasmagories.

Il ne fallait pas dépuceler la Lune.

Aujourd’hui quand on la contemple, maintenant qu’on sait à quoi elle ressemble, vaste et terne champ de cailloux gris, elle ne nous inspire plus rien. Tout juste si on prend le temps de la contempler. A quoi bon ? Elle reste là plantée dans la voûte du ciel comme un astre ahuri et encombrant.  Tout juste si elle ne gêne pas.

Elle est devenue cette femme fantasmée  à qui pendant des siècles on a écrit des lettres tremblantes d’amour et dont on découvre, une fois que son vrai visage nous a été révélé, qu’elle ne ressemble en rien à l’image qui peuplait notre imaginaire.

D’un coup, elle a perdu tout de sa magie et de son pouvoir d’évocation ou de séduction. Elle ne nous enchante plus.  Ne nous emeut plus.

Elle reste là, hagarde et déboussolée, perchée au-dessus de nos têtes, se cherchant une raison d’être, ne la trouvant pas.

Elle ne sert plus à rien.

Mon père était un chercheur d’or, l’ennui c’est qu’il en a trouvé chantait Brel.

Et Dylan, comme toujours, mieux que personne, dans sa chanson Licence to Kill, a dit notre désenchantement et notre désarroi :

Man thinks ’cause he rules the earth/ He can do with it as he please / And if things don’t change soon he will/ Oh, man has invented his doom / First step was touching the moon.

Armstrong a peut-être décroché la lune.

Il a surtout assassiné la part d’enfance qui sommeillait en nous.

A trop vouloir repousser les frontières, l’homme atteint à sa finitude. Bientôt il ne lui restera plus que la nostalgie pour rêver.

20 commentaires pour “Neil Armstrong, le criminel de l’espace”

  1. Ce billet est bien poétique !!

  2. Temesta, temestaaaaaaaaaaaaa !!!!!!!!!!!!

  3. Tiens je l’avais raté celui la, le meilleur pourtant.
    Non contents d’avoir défloré la lune ils iront chatouiller Mars, moi j’attends celui qui va se brûler les ailes trop près du soleil.

  4. pluton mourir!

  5. la lune ne m’a jamais fait rêver, peut être un peu trop l’air d’une planète morte mais c’était inéluctable comme objectif de mettre les pieds sur le satellite si proche et familier même si cela n’a pas été d’un grand apport scientifique ce qui est sans doute faux, ne serait ce que les études réalisées pour s’y rendre cela a forcément servi la recherche
    et rien sur Louis ? :p

  6. @sophie.k
    on a piraté votre blog belle sophie?

  7. Je ne voyais pas ça comme ça. La lune ce vieux caillou ennuyeux est toujours ma confidente. Dimanche elle était parée d’un voile cotonneux d’une blancheur macabre. Elle fait souvent preuve d’une trop grande pudeur, cette fois elle se dissimulait dans une nuit funèbre qui masquait à peine sa tristesse. Son amant disparu lui manque, celui qui brisa ses chaines obscures. Elle sera bientôt de nouveau pleine et rayonnante, plaisir nocturne toujours fécond. Origine des périples qu’il nous reste à parcourir, miroir de l’imagination, plongée dans les réflexions solaires, voyage au fin fond du temps, « To risk all is the end all and the beginning all ». Être, là, l’espace d’un instant. On n’a pas fini de rêver. Merci Neil.
    http://www.youtube.com/watch?v=jtx3MWEPN5Q

  8. Donc Neil a massacré nos rêves de gosse que Lance a su redoper en leur donnant le meilleur de lui-même.

    J’attend votre prochain article sur Georges… mais vous remarquerez qu’il y aura concurence.

  9. @Saga : c’est un coup à devenir mainstream ça, en tous cas ça me rappelle de très bonnes planches de Goltib à propos de ce petit voyage.

    “http://brickenvrack.canalblog.com/images/lune_gotlib_02.jpg”

  10. Bonjour M. Sagalovitsch

    La lune ne vous fait plus rêver… en tous cas elle n’empêche pas, les écrivains , les cinéastes, et artistes en tout gente de talent de trouver leur inspiration . Et les sujets sont très nombreux : monde la nuit, space opéra, récits historique , anticipation…..

  11. “Non seulement l’exploration de la lune ne nous rapporta rien, absolument rien, si ce n’est de lustrer de gloire les étoiles pâlissantes du drapeau américain”

    La conquête de la lune a permis d’améliorer ou de faire parvenir au grand public les techniques suvantes :
    – la lyophilisation
    – le Téflon
    – le gore tex
    – la couverture de survie
    – l’enduit protecteur de nos lentilles de contact actulles
    – perceuse sans fil
    – etc

    Même votre calvitie s’inspire de la surface de la lune

  12. Impressionnant en effet!!!

  13. La lune ne vous fait plus rêver… en tous cas elle n’empêche pas, les écrivains , les cinéastes, et artistes en tout gente de talent de trouver leur inspiration . Et les sujets sont très nombreux : monde la nuit, space opéra, récits historique , anticipation…..

  14. je crois que “perceuse sans fil” va devenir une phrase générique dans mon vocabulaire. Une sorte de private joke entre me, myself and I, en souvenir de cette belle tranche de rigolade qui va me permettre de me coucher le sourire aux lèvres malgré le tas de poussière oppressant au dessus de ma tête.

  15. On ne se moque pas. Que serait-on sans une perceuse sans fil ? Je vous le demande Toto Chichi

  16. La perceuse sans fil permet tout comme l’utilisation de votre vibro-masseur de s’en servir sans se prendre les pieds dedans.

    Autre chose, “Impressionnant en effet!!!”, un seul point d’exclamation est amplement suffisant (!)

  17. Vous m’inspirez, mon “Kamsutra Martien ou l’Apesanteur et le Coïte Sidéral” vient de s’enrichir d’une nouvelle prise toujours à la manière des poulpes http://media.paperblog.fr/i/101/1019905/poulpes-in-love-L-1.png Après le Cuni-Céleste les Astrhomos pourront pratiquer la Pipe-Lunaire. 69 année érotique!!!

  18. Obscurantisme dépressif et stérile.

    bien sur que la recherche spatiale nous a apporté énormément en connaissance de l’univers et en technologie. la lune n’échappe pas à la règle.
    En outre, moi la lune m’a encore toujours fait rêvé, bien qu’arrivé sur Terre bien après 1969.

    cherchez bien, je ne suis pas sur que l’assassinat de votre “part d’enfance” soit imputable à Armstrong.

  19. @Nico, merci de ramener le sujet à l’essentiel, notre lune la plus familière^^
    Jo imaginez Monsieur Saga enfant…:) je n’ai pas de sentiment exalté envers ce caillou mais bien plus qu’une muse, la lune, éternellement fidèle, sombrera avec la terre

  20. Chacun ses goûts, Laurent… Si tous les assassins étaient comme Neil Armstrong, le monde ne tournerait pas si mal…

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