Quand Google Govaryse, les doodles doodlelisent

Google a commis un doodle pour célébrer le 190ème anniversaire de la naissance de Gustave Flaubert. Écrite ainsi, cette phrase n’a l’air de rien, et pourtant, jamais, de toute ma chienne de mort, je n’aurais pensé qu’un jour je puisse arriver à commettre un post commençant ainsi : Google a commis un doodle pour célébrer le 190ème anniversaire de la naissance de Gustave Flaubert. Déjà, en premier lieu, les commémorations des morts et des naissances de nos illustres aînés m’ennuient profondément. Voilà cinquante ans que Tartatanpion s’en est allé. Il y a très exactement 578 ans que MachinTrucMuche voyait le jour. Demain, si tout va bien, on fêtera le tricentenaire de la barmitsva de Schlomolemomo. Après demain, sera célébré le jubilé de la circoncision de la mère du fils de madame Boutboul.

Ses petites révérences posthumes, pompeuses et faussement élégiaques, me laissent de marbre. Je préférerais nettement qu’on écrivît, en toute simplicité, que demain, le cadavre de qui-vous-voulez, Elvis, Papy Mougeot, Madame Soleil, en sera à son 69350 jour de décomposition, et que pour fêter dignement cet évènement, la 7ème compagnie des joyeux vers de terre du Lubéron s’associera à la fratrie des gais lurons des coléoptères du bassin d’Arcachon pour entamer l’attaque de la face nord du tibia gauche de la dépouille de l’auguste défunt. On serait ainsi plus proche de la vérité. Après tout Flaubert était-il un écrivain réaliste ou pas ?

Maintenant, que Google se fende d’un doodle pour fêter le 190ème anniversaire de la naissance du père de Fréderic Moreau et de Madame Bovary me laisse songeur. Si ce n’est circonspect. Voire dubitatif. J’avoue, jusqu’à ce matin, j’ignorais ce qu’était un doodle. M’eût-on interrogé à brûle-pourpoint sur le sens de ce mot barbare que j’eus sûrement annoné, d’une voix hésitante, qu’il désignait là un objet en forme de donuts utilisé comme doudou pour les enfants esquimaux afin de s’endormir dans leurs igloos. Et je me serais lourdement trompé. Pour celui qui barboterait dans la même ignorance crasse que la mienne, apprends donc, compagnon d’infortune, qu’un doodle désigne “un gribouillage” en anglais, et permet une paronomase avec “Google”. J’imagine que tu ne sais pas non plus ce que c’est une paronomase ? Je te rassure, moi non plus. Dans mes recherches très poussées qui m’ont amené à explorer des terres inconnues et des contrées exotiques, j’ai appris aussi que Google pratiquait l’art des Favicon, le Favicon étant un mot valise né de la contraction des mots Favorites et Icon. Compris Ducon?


Pour résumer, grâce à Google Govarysant, me voilà donc un peu moins ignorant. Non seulement ai-je appris que Gustave avait vu le jour le 12 décembre de l’an 1821, alors que je penchais plus pour le 10 décembre voire le 9 au matin, à l’heure où blanchit la campagne rouennaise, mais de plus, je peux désormais m’enorgueillir de connaître sur le bout des doigts la signification de doodle et de favicon, ce qui, avouons-le, vous change un homme de fond en comble.
Dans toute cette affaire, ce qui m’émerveille, c’est de savoir qu’un gus qui travaille pour le compte de Google se soit non seulement souvenu de la date de naissance de Flaubert mais que de surcroît, il se soit montré assez persuasif dans sa démonstration pour convaincre son supérieur hiérarchique de l’impérieuse nécessité de convoquer, toutes affaires cessantes, le graphiste de l’étage d’en-dessous, pour qu’il en fasse un doodle du plus bel effet – le responsable des Favicons étant visiblement absent ce jour-là ou alors il n’avait pas encore achevé sa lecture de Salammbô.
Je dis chapeau.
Je dis bravo. Même si le côté salope désespérée d’Emma ne transparaît guère dans ce doodle un peu trop pastelisé, tout juste bon à emouvoir les prudes pucelles d’un pensionnat catholique.
Quant à celui qui douterait de la pertinence de ce billet, je conclurais en citant celui dont on fêtera le bicentenaire de la naissance le 12 décembre 2021, date à laquelle, si les vers de terre ne faiblissent pas dans leurs efforts, on peut espérer que le tibia gauche de Gustave ne soit plus qu’un petit tas de sciures ou de chiures d’os, exploit qui mériterait, me semble-t-il, à tout le moins, l’honneur d’un Favicon : ” A moins d’être un crétin, on meurt toujours dans l’incertitude de sa propre valeur et de celle de ses œuvres. “

18 commentaires pour “Quand Google Govaryse, les doodles doodlelisent”

  1. Saga a découvert le doodle, alléluia! Emma était une “jusqu’au boutiste”, c’est ça qu’est beau. Kafka avait un petit coté comme ça aussi :
    “Voici, mon bien cher Max, ma dernière prière : Tout ce qui peut se trouver dans ce que je laisse après moi (c’est-à-dire, dans ma bibliothèque, dans mon armoire, dans mon secrétaire, à la maison et au bureau ou en quelque endroit que ce soit), tout ce que je laisse en fait de carnets, de manuscrits, de lettres, personnelles ou non, etc. doit être brûlé sans restriction et sans être lu, et aussi tous les écrits ou notes que tu possèdes de moi ; d’autres en ont, tu les leur réclameras. S’il y a des lettres qu’on ne veuille pas te rendre, il faudra qu’on s’engage du moins à les brûler. À toi de tout cœur.”

  2. Quand un abruti découvre que le monde a bien avancé depuis qu’il se remet de son dernier litron de rouge.

  3. c’est moi l’abruti ?

  4. Ben, moi je savais que c’était le titre d’une chanson, “Yankee Doodle”, vous ne connaissez pas ? Et j’apprends donc, grâce à vous et Wikipedia, que Doodle veut dire aussi “idiot”, et que cette chanson a été inventée par les Anglais pendant la guerre d’indépendance pour se gausser des colons américains (Qui leur ont finalement botté le train). Et que ce Yankee Doodle est encore la chanson officielle du Connecticut, Connecticut d’où sont originaire J. Mc Inerney, J Salinger, Larry Collins, Katharine Hepburn, Jeff Porcaro. Et j’arrête là la plongée dans l’hypertexte, bref j’ai appris des tas de trucs, la mort de Flaubert (la date, seulement, je me doutais bien qu’il était mort), un Favicon (Ca sonne médicament, tiens), etc… TOutes choses que mon cerveau surmené va se dépêcher d’oublier. Pour info, le Doodle du 25 décembre sera un gars en manteau rouge dans un traineau… Vous pariez?

  5. @ Laurent : C’est celui qui dit qui est.
    Vous avez du encore froisser un joueur de Poker membre des Bad Gones.

  6. Ca fait beaucoup pour un seul homme!

  7. Les Verts sont 5eme, ça vous met du baume au coeur.

  8. Exact, Bernard, Yankee Doodle Dixie était même un des morceaux de prédilection de Marcel Dadi ( en duo avec Chet Atkins) avant que ce pauvre Cecel ne s’évapore dans l’ azur du ciel new-Yorkais suite à un friendly fire de la défense aérienne US.
    Sinon pourquoi toujours parler de Mme Bovary, alors que cette bleuette n’ arrive pas à la cheville de L’éducation Sentimentale ? Avec cette conclusion terrible : “et ils résumèrent leur vie : Ils l’avaient tous deux manquée” Bon c’ est de mémoire, c’ est peut etre pas tout a fait ça, mais l’ idée y est ( je dis ça pour les cuistres qui ne manqueront pas d’ aller vérifier chez Ducon Pedia…)

  9. @ Vinnie : C’est moi le cuistre ? :-))

    Ca ne se finit pas plutôt (de mémoire) sur une phrase qui dit : comme tout cela est passé si vite

  10. @Bernard : Mais bien evidemment que c’est vous que j’ allusionne finement dans le commentaire dont auquel vous-même référencez… 🙂
    J’ adore le terme de “cuistre” peu usité désormais, qui me rappelle Achille Talon lorsqu’il insulte son voisin Lefuneste.
    Bon attendons le reveil de Lolo le Stéphanois de sa torpeur canadienne, ainsi que les premiers commentaires sybillins de la mysterieuse Hannah.

  11. @ Vinnie : Et c’est censé me faire réagir ?

  12. @Bernard : Mais non, cher Bernard, pas du tout. Et c’est heureux, car sinon cela vous aurait pris quasiment 4 heures…Quel echec pour moi !!!
    Bon, qui connait Philippe Jaenada ? et qui a lu son dernier bouquin La Femme et l’ Ours, c’ est excellent.

  13. @ Vinnie : Si vous le dites, ça doit être effectivement excellent.

  14. et ca papote et ca jacasse. Vous voulez peut-être vos mails respectifs ? Bernard, ce n’est pas ainsi que vous allez rentrer dans l’écriture de votre roman. Un peu de constance que diable!

  15. Ben en même temps, vu qu’avec le décalage, vous vous pointez à 18h, faut bien qu’on s’occupe entre temps…

  16. Le témoignage de Deslauriers à la fin de L’Éducation sentimentale est très significatif en effet : “j’ai péché par excès de rectitude, sans tenir compte de mille choses secondaires, plus fortes que tout.”

    Un truc a dû m’échapper mais je ne vois pas quoi? Quelqu’un pourrait m’aider?
    http://desencyclopedie.wikia.com/wiki/Franz_Kafka

  17. @ Laurent. Vous êts la voix de la sagesse.

  18. @ Nico P : “Le contenu de la dÉsencyclopédie, le site lui-même et les administrateurs du site sont une immense parodie sans queue ni tête à la sexualité douteuse et à l’hygiène approximative. Si vous prenez au sérieux un traître mot de ce qui est écrit, vous êtes encore plus con que vous en avez l’air. ”
    Je ne fais que citer l’ en-tête du site, bien sur.
    Sinon j’ ai retrouvé la citation exacte du dialogue entre frédéric et Deslauriers : C’est simplement magnifique
    ” Et ils résumèrent leur vie.
    Ils l’avaient manquée tous les deux, celui qui avait rêvé l’amour, celui qui avait rêvé le pouvoir. Quelle en était la raison ?
    — « C’est peut-être le défaut de ligne droite », dit Frédéric.
    — « Pour toi, cela se peut. Moi, au contraire, j’ai péché par excès de rectitude, sans tenir compte de mille choses secondaires, plus fortes que tout. J’avais trop de logique, et toi de sentiment. »
    Puis, ils accusèrent le hasard, les circonstances, l’époque où ils étaient nés.”

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