Dinosaur Jr, le brontosaure bouge encore

C'est les vacances. Le temps de se poser cinq minutes pour regarder dans le rétro. On fait les fonds de soute de notre iTunes et qu'est ce qu'on découvre? Dans les meilleurs albums de ce premier semestre 2009 figurent deux vieux brontosaures du rock indie 80's: Dinosaur Jr et Sonic Youth.

Concernant Sonic Youth, personne ne sera vraiment surpris, tant leur carrière est rectiligne depuis plus de 25 ans, à part quelles embardées au détour du siècle. Les New-Yorkais gardent jalousement la clé de la maison underground et les rides n'ont pas altéré le respect que leur voue les jeunes générations. Non, la surprise vient plutôt de Dinosaur Jr, dont l'allure de retraités régressifs fait ricaner les festivaliers.

Depuis que le marché du disque s'est effondré pour se transférer en partie sur le business des concerts, la reformation de groupes cultes est devenue une vraie industrie. Objectif: extorquer quelques centaines d'euros à des quarantenaires prêts à ne pas dormir pendant trois jours pour voir les Pixies ou Dinosaur Jr à Benicàssim. Il fallait être un nostalgique bien naïf pour en espérer quelques bienfaits artistiques. D'ailleurs, le retour des Pixies aura sonné aussi creux que le ventre de Franck Black.

Mais du côté de Dinosaur Jr, l'appel des dollars aura eu une vertu: réconcilier le guitariste Jay Mascis et le bassiste Lou Barlow, les deux piliers du groupe qui s'étaient violemment fâchés en 1989. Dinosaur Jr était alors devenu la franchise exclusive du guitariste qui avait fini par s'abîmer dans quelques albums indécents au milieu des années 90. Pour parfaire la tournée de reformation de 2005-2006, le groupe avait sorti Beyond en 2007, un premier retour aux sources déjà très réussi. Deux ans plus tard, les compositions se sont affinées et voici donc Farm qui de a quoi désarçonner la jeune concurrence.

Le trio des albums historiques — Dinosaur, You're living All Over Me et Bug — reste indépassable. Mais Farm, qui réveillera les anciens et convertira les plus jeunes, constitue une sorte de best of rempli uniquement d'inédits. Une démarche de rentier, sans aucune originalité mais parfaitement jouissive. Le groupe revisite ses années de jeunesse, ridant encore et encore la même rampe: pluie électrique, guitare qui pleure, solos classieux, songwriting à la Neil Young…

Le premier clip du disque, Over it, reprend la métaphore des skateurs sur le retour, l'occasion aussi de découvrir la coupe de blonde décolorée de Jay Mascis.

Dinosaur Jr, c'est «Sonic Youth sans New York», écrivent Les Inrocks. C'est pas très gentil pour la province américaine, mais c'est bien cela. Chez Sonic Youth, le snobisme repousse la grâce mélodique au second plan, au détour d'un chemin lardé de larsens. Chez les patauds Mascis et Barlow, la manœuvre est moins discrète: la couche mélodique noie les compositions sur fond de punk hardcore mal dégrossi. Branleurs du MoMa vs branleurs du skate park, il faut choisir.

Mais en l'occurence, les plus gros branleurs sont ceux de la maison de disque de Dinosaur Jr qui ont pressé pour le marché européen une version sur-saturée — elle relève le niveau sonore (déjà bien douloureux pour les oreilles) de 3 dB. Sur son site officiel, le groupe s'en excuse et explique que l'erreur est due à un bug informatique. Ceux qui auraient acheté la mauvaise version peuvent se la faire échanger. En attendant, pas de chance, la version mise en ligne sur l'indispensable site de streaming Spotify est la mauvaise.

Vincent Glad

Pour écouter l'album sur Spotify (prévoir quand même quelques boules quiès), c'est par ici. Pour écouter l'album sur Deezer dans une qualité moindre, c'est par ici.

(Spotify n'est normalement disponible que sur invitation. Mais il est possible de contourner la règle en s'inscrivant sur cette page. Chut, on ne le répète pas)

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