«Skyfall»: pas encore Bond pour la retraite

Conscient du risque d’usure, le 23e épisode officiel de la série en fait de manière plutôt inventive son carburant.

Daniel Craig dans «Skyfall» (United Artists Corporation/Columbia Pictures Industries)

Daniel Craig dans Skyfall de Sam Mendes

Cinquante ans, c’est largement l’âge de la retraite pour un agent du service action. Les entrepreneurs de la franchise 007 ont beau capitaliser au maximum sur l’effet anniversaire, ils sont bien conscients du poids des ans et du risque de répétition.

A vrai dire, la longévité du personnage au cinéma est déjà un exploit sans équivalent, surtout si on considère que, à la différence des éternels retours des Batman et Spiderman, il ne s’agit pas de «réinventer» (hum) le personnage et de rejouer différemment des situations déjà racontées, mais à chaque fois d’une nouvelle aventure. C’est vrai même avec les trois reprises du même titre, Casino Royale, depuis l’ancêtre télévisuel qui adaptait le premier volume de Ian Fleming à la télé américaine en 1954 (Bond y devenait, horresco referens, un agent de la CIA, mais nul autre que le grand Peter Lorre incarnait le premier de tous les méchants bondiens, le Chiffre n°1 donc), avant la joyeuse sarabande pilotée par John Huston en 1967 et le navrant pataquès qui voyait l’apparition de Daniel Craig dans le tuxedo mythique en 2006.

L’intérêt de la 23e apparition cinématographique dite «officielle» —c’est-à-dire sous la houlette de la famille régnante depuis le début sur la Bond Trademark, les Broccoli, chez qui jamais au grand jamais on ne dit «jamais plus jamais»— est d’être parfaitement consciente de ce risque d’usure, et d’en faire de manière plutôt inventive le carburant de ce Skyfall, qui se retrouve du coup être le meilleur James Bond depuis dix ans.

Les auteurs du scénario se sont manifestement beaucoup creusés pour trouver un assemblage de péripéties permettant de jouer en même temps sur deux claviers, celui du changement d’époque et celui du retour aux fondamentaux. Ils s’en tirent plutôt bien, accrochant le destin de leurs trois personnages principaux, Bond, le méchant joué par Javier Bardem et M, à un énorme câble psychanalytique à deux sterlings, qui remplit parfaitement son office.

Ça démarre plutôt mal

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2 commentaires pour “«Skyfall»: pas encore Bond pour la retraite”

  1. Bah alors Jean-Michel, on retombe en enfance ? Ok pour les plaisirs coupables. Mais tout de meme, James Bond, n’est-ce pas la quintessence meme de l’infantilisation des masses au cinema ? Ce rapport infantile, et non pas enfantin (je fais la difference), aux images nourri par les James Bond, tous plus misogynes et manichéens les uns que les autres, ça m’a toujours completement laisse indifférent. Si j’ai parfois vu un film de cette saga, c’est pour Roger Moore, pour son charme British qui me rappelait Brett Sinclair d’Amicalement Votre. Mais, me dit-on, Roger Moore est le James Bond que les puristes de 007 aiment le moins. Ça tombe bien. Je n’aime pas les James Bond. Mais j’aime Roger Moore. Ou Henry Moore. Entre nous, je préférerais vous lire sur des films moins commerciaux, on dirait avec Bond que ce film n’est plus qu’un support parmi d’autres pour vendre du Coca et des montres bling bling, je préfèrerais davantage vous lire concernant des films plus confidentiels et qui ont besoin d’une visibilité, pour que le cinema contemporain ne se réduise pas aux “Seigneurs” et a “Stars 80”, films de ploucs autosatisfaits par leur beaufitude. Non, je ne vous parle pas, ici, d’Amour, c’est une Palme d’or, il va trouver son public, notamment une grande partie des lecteurs de Telerama, je ne vous parle pas non plus de “La Traviata et nous”, car, a raison, vous venez d’ecrire dessus. Je vous parle de Into The Abyss. Signe du grand Werner Herzog. Et qui n’est pourtant diffuse que dans UNE salle a Paris. SCANDALEUX. Quelle frilosité des distributeurs et des gestionnaire de salles. La, ils nous font faux Bond, honte a eux ! Et bravo au Cinema du Pantheon, seule salle parisienne a le diffuser alors que Herzog est le realisateur de chefs-d’oeuvre comme Aguirre, Fitzcarraldo et autres Grizzly Man. Cette plongée fascinante dans l’humain trop humain de l’Amerique profonde est assez impressionnante. Et je vous parle aussi d’un autre documentaire : Tempête sous un crâne, doc qui raconte la transmission de la littérature et des arts visuels dans un établissement scolaire a la population dite “difficile” (une classe de 4e dans un college ZEP de Saint-Denis). Attention, je ne me la joue pas ici documentaire contre fiction, sachant tres bien que depuis au moins Bazin et Rivette que la frontière est infra-mince et poreuse entre les differents régimes d’images, mais quand la fiction prend la tournure paresseuse de l’infantilisation (‘Pan pan, t’es mort’ a la James Bond), eh bien je prefere qu’on mette en avant l’élégance et la prise de risque authentique plutot que le bulldozer et le tiroir-caisse, Werner Herzog ou C.Bouffartigue plutot que Messieurs Coca-Cola ou Nokia. C’est juste une question de point de vue… trouver le bon axe. Amicalement votre, Vince Vint@ge

  2. Bonjour
    je suis entièrement d’accord avecla 2e partie de votre texte. La première me semble inappropriée. J’ai toujours considéré qu’il fallait voir les films un par un, ne pas décider à l’avance de ce qu’ils étaient et de ce qu’ils feraient. La sortie d’un James Bond m’intéresse toujours. Et évidemment Roger Moore incarne ce qui se sera fait de moins intéressant dans le domaine de l’interprétation de ce personnage – ou de ce type.
    Bien à vous. JMF

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