Quand l’équipe d’Algérie s’appelait “équipe du FLN”

Quand l’équipe d’Algérie s’appelait “équipe du FLN”
“Ouane, tou, tri, viva l’Algérie”. Le slogan a résonné toute la semaine dernière pour saluer la qualification des Fennecs à la Coupe du Monde aux dépends de l’Egypte. On l’a entendu à Khartoum, où se jouait le match, à Alger, bien sûr, mais aussi à Marseille, Bron ou Gennevilliers. Car les histoires française et algérienne sont intimement mêlées, entre amour et déchirements, y compris dans le football. Dans le premier cas, il y a Zidane, le fils d’immigré kabyle qui fit vibrer la France un soir de juillet 1998. Dans le deuxième cas, il y a ce mois d’avril 1958, où des joueurs algériens évoluant dans le championnat de France, et même pour certains en sélection nationale, désertent le pays à deux mois de la Coupe du Monde. En pleine guerre d’Algérie, ils décident de ne plus jouer pour la puissance coloniale française, mais pour l’indépendance de leur pays.
L’étrange disparition
Drôle d’ambiance à l’AS Monaco ce 14 avril 1958. Depuis plusieurs jours, les dirigeants n’ont aucune nouvelle de leur défenseur Mustapha Zitouni. Comme celui-ci est par ailleurs sélectionné en équipe de France, ils appellent logiquement la FFF pour signaler la disparition du joueur. Les Bleus sont alors réunis à Paris, à quelques jours de France-Suisse, match préparatoire de la Coupe du Monde en Suède. Les Bleus, moins Zitouni, donc. Les journalistes, étonné de cette absence avec la sélection, se mettent à chercher dans les lieux qu’il fréquente habituellement, mais il reste introuvable. En fin d’après-midi, les radios annoncent sa disparition, mais aussi celles de trois autres joueurs de l’AS Monaco : Bekhloufi, Boubekeur et Bentifour, également Algériens. Panique dans tous les clubs français qui se mettent à battre le rappel de leurs joueurs d’outre-Méditerrannée. Le SCO Angers, qui a gagné la veille à… Monaco, signale alors la disparition d’Amar Rouaï. On croit d’abord à une virée sans conséquences, mais l’évidence s’impose d’heure en heure : les cinq joueurs d’origine algérienne sont partis pour Tunis, capitale informelle du Front de Libération National (FLN) et qui abritera bientôt le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA).
Ce premier groupe est parti de Monaco juste après le match contre Angers. Il a rejoint Rome en train, puis vers Tunis en bateau. Un deuxième groupe composé du lensois Arribi, du lyonnais Kermali, du toulousain Bouchouk et du stéphanois Mekhloufi (lui aussi appelé en Bleu), passe par la suisse en voiture avant de rejoindre l’Italie, puis la Tunisie. Le compère de Bouchouk au Téfécé, Brahimi, rejoint la capitale tunisienne par ses propres moyens. Ces fuites ne doivent rien au hasard, elles sont coordonnées par Mohamed Boumezrag, ancien joueur à Bordeaux et au Mans dans les années 1940. En tout, ce sont dix joueurs qui sont accueillis à Tunis par Ferhat Abbas, futur président du GPRA, qui leur annonce “Vous venez de faire gagner dix ans à la cause algérienne”. Il ne fait plus aucun doute sur les intentions de Mohamed Boumezrag : la constitution d’une proto-sélection algérienne à fins de propagande, l’équipe du FLN. En France, le retentissement de l’affaire est énorme. Un journaliste de l’Equipe écrit : “l’équipe de France demeure, même si le mot France prend une signification plus étroite”. Imaginez la fuite d’une dizaine de joueurs de L1, dont l’équivalent d’un Gourcuff aujourd’hui, à savoir Rachid Mekhloufi, alors jeune espoir du football français. Il témoigne dans cette vidéo (en anglais) sur son engagement dans l’équipe du FLN :

LucarelliAvatarOuane, tou, tri, viva l’Algérie“. Le slogan a résonné toute la semaine dernière pour saluer la qualification des Fennecs à la Coupe du Monde aux dépends de l’Egypte. On l’a entendu à Khartoum, où se jouait le match, à Alger, bien sûr, mais aussi à Marseille, Bron ou Gennevilliers. Car les histoires française et algérienne sont intimement mêlées, entre amour et déchirements, y compris dans le football. Dans le premier cas, il y a Zidane, le fils d’immigré kabyle qui fit vibrer la France un soir de juillet 1998. Dans le deuxième cas, il y a ce mois d’avril 1958, où des joueurs algériens évoluant dans le championnat de France, et même pour certains en sélection nationale, désertent le pays à deux mois de la Coupe du Monde. En pleine guerre d’Algérie, ils décident de ne plus jouer pour la puissance coloniale française, mais pour l’indépendance de leur pays. Lire la suite…

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