La crise au PSG, petit précis d’anti-journalisme sportif

Une de L’Equipe du 18 août 2011

Les pétrodollars qataris ont donné un coup de boost bienvenu à l’imagination des journalistes sportifs français. A les croire, le PSG serait plus que jamais en crise. Le coach Antoine Kombouaré n’en finit d’ailleurs pas de recevoir des ultimatums.

Une saison sans crise au PSG, c’est comme un match de Mathieu Bodmer sans blessure. Ça n’existe pas. A Plat du Pied, nous avions d’ailleurs imaginé l’exercice 2011-2012 des joueurs de la capitale. Une fiction un peu apocalyptique, certes, mais une fiction. Le problème, c’est qu’une bonne partie de la presse sportive française semble s’être aujourd’hui donnée le mot pour saborder ce nouveau Paris. Pensez-donc: après deux matches de championnat, l’équipe d’Antoine Kombouaré ne compte qu’un point! Qu’importe si l’OM n’en a que deux et si Lille, le champion en titre, un seul. La crise est à Paris, point final.

Peut-être que les prophéties auto-réalisatrices de L’Equipe et du Parisien finiront par se vérifier. Peut-être qu’Antoine Kombouaré sera viré dans les prochaines semaines, que Leonardo se fâchera pour de bon avec les actionnaires qataris, que Carlo Ancelotti coachera enfin le club de la capitale. Les deux journaux de Marie-Odile Amaury pourront alors se féliciter de leur perspicacité, à coups de “Comme nous vous le révélions il y a quelques semaines…”.

Mais en attendant, leur matraquage systématique tient plus de la pathologie que d’un journalisme de faits. A la mi-juillet, L’Equipe paye sa première Une sur son marronnier favori: “Le PSG déjà en crise”. Quelques jours plus tard, le quotidien sportif croit savoir que Leonardo énerverait déjà les actionnaires qataris… La raison? Il n’aurait pas mis toute son énergie pour débaucher Abel Taarabt, l’attaquant de QPR. D’obscures sources estiment même que le directeur sportif brésilien serait menacé.

Mais par chance pour Leo, la presse spécialisée va trouver un autre os à ronger. Un os kanak de 48 ans, nommé Antoine Kombouaré. Le coach du PSG a un problème: il n’aurait pas le charisme nécessaire pour gérer un groupe de starlettes en devenir (Pastore, Ménez, Gameiro…). Qu’importe si AK a remis son équipe sur les rails en deux ans de présence à Paris, après le passage lénifiant de Paul Le Guen. Qu’importe si le PSG a terminé la saison passé à la 4ème place (avec une base défensive composée entre autres d’Apoula Edel, Siaka Tiéné, Papus Camara, ce qui en dit long), développant d’ailleurs un des meilleurs jeux de France. Qu’importe qu’il soit un homme de caractère franchement pas du genre à se laisser marcher sur les pieds. Kombouaré est sur le grill. Il faut dire que son départ ravirait Jérôme Touboul et Dominique Séverac. Il redonnerait vie à une de leurs vieilles lunes: la venue de Carlo Ancelotti, l’ex-coach italien du Milan AC et de Chelsea.

La défaite inaugurale des Parisiens contre Lorient est donc du pain béni pour nos duettistes. Avant même le deuxième match de championnat, L’Equipe croit ainsi savoir qu’’’en cas de nouvelle contre-performance samedi à Rennes, un changement d’entraîneur ne semblerait pas à exclure”. Vous apprécierez d’ailleurs la combinaison conditionnel+forme négative pour ne pas trop se mouiller. Le match nul contre les Bretons ayant apparemment “contrarié” Leo, le quotidien sportif dégaine une deuxième fois, quelques jours plus tard. “Leonardo a sondé Ancelotti”. Bigre. Le coach italien ne serait “pas contre l’idée de débarquer à Paris”, lit-on. Sauf que dans le même article, Leonardo himself explique clairement: “Je suis très content de travailler avec lui (Kombouaré) (…) Le projet, c’est avec Antoine Kombouaré.”

Dernier épisode de la saga cette semaine, avec un nouvel ultimatum made in L’Equipe. Cette fois, c’est sûr, “les jours d’Antoine Kombouaré à la tête du PSG sont comptés”. Toinou doit à tout prix remporter les deux prochains matches de championnat s’il veut garder son job. On passe sur les subtilités de langage pour réintroduire le facteur Ancelotti (“Les actionnaires qatariens ne verraient pas d’un mauvais oeil”), mais on savoure une autre info, lue quelques heures plus tard sur le site du quotidien sportif: “En tout cas, il n’y a pas d’ultimatum posé à Kombouaré en termes de résultats”. Des mots prononcés par Leonardo en personne.

Même plaisir également à lire les paroles de Carlo Ancelotti sur RMC: “Il persiste à dire qu’il n’est pas intéressé par le poste d’entraîneur du PSG, à la fois pour des raisons privées et professionnelles. «On m’a déjà posé la question en Italie. Je veux rester en Angleterre. Je peux attendre un an.(…) Je préfère l’Angleterre au niveau sportif. Les stades sont pleins, il n’y a pas de violence, l’ambiance est magnifique, et il n’y a pas les problèmes d’arbitrage qu’on voit en Italie ou en France. » A la question «et si on vous appelle pour venir à Paris maintenant ou dans un mois ? », la réponse d’Ancelotti fuse : « Non »”.

Comme quoi, interroger les intéressés, ça a du bon.

>> A lire aussi sur le sujet, un papier de psgmag.net et un autre des Cahiers du foot.

Sidney Maréval

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Un commentaire pour “La crise au PSG, petit précis d’anti-journalisme sportif”

  1. Merci pour ce magnifique Article qui tourne petit à petit sur les forums 😉 on devrait l’envoyer a Pauwels Touboul et tous les anti PSG

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