De toute façon, c’est Raul qui gagne à la fin
Ce soir: Schalke 04-Manchester United. Demain: Real Madrid-Fc Barcelone. Plat du pied joue l’avocat des quatre équipes en lice pour la coupe “aux grandes oreilles”. Avec 100% de chances d’avoir vu juste.
Pourquoi le Barça va gagner la C1
Marquer 50 buts en une saison avec le physique d’un moins de 13 ans, même le mythique Ferenc Puskás ne l’avait pas fait. Leo Messi est donc statistiquement le meilleur attaquant de tous les temps. Il y a un an, nous disions qu’il n’était pas le meilleur joueur du monde, parce qu’il n’était pas le plus complet. Nos lecteurs nous répondaient qu’il n’était peut-être pas le plus complet, mais qu’il avait du génie, là où Cristiano Ronaldo avait du talent. Ils avaient raison. Entre Eugène Delacroix et Jacques Louis-David, on préférera toujours le premier. Messi guidant le peuple catalan, c’est la victoire assurée en Ligue des champions. Le Wall Street Journal a raison, cet homme est “the great one”. Profitons qu’il n’ait pas encore été découpé par un boucher type Nigel de Jong pour le voir soulever les uns après les autres les trophées.
Messi est plus fort que Puskás, et le Barça de Guardiola joue mieux que la Hongrie des années 50. Nos grands-pères nous l’ont dit, et Marouane Chamakh est d’accord. C’est dire si cette affirmation tient la route.
Le pauvre Eric est sorti de l’hosto, mais n’est pas encore prêt pour revenir sur le terrain. Ce qui fait deux bonnes nouvelles: l’une pour lui, l’autre pour le Barca. Abidal a beau avoir fait une saison énorme avant son problème au foie, l’aligner en défense, c’est toujours prendre le risque de le voir faucher sans raison un attaquant le long de ligne de sortie de but, dans sa surface, alors que le ballon va sortir. Et des gars comme Higuain connaissent bien cette propension à l’absurde de l’amuseur de l’équipe de France.
Pour ou contre l’indépendance de la Catalogne? A cette question référendaire, les Barcelonais ont répondu oui au début du mois, à plus de 90%. La participation de 21% à ce vote sans légalité était inespérée pour les organisateurs. Preuve que la séculaire revendication identitaire et culturelle s’est enhardie d’arguments économiques, dans une Espagne toujours en crise. L’Etat-Nation du XIXe siècle, c’est fini. Pardon Ernest Renan. Dans une Europe où les droites extrêmes font leur retour, la Catalogne défend de plus en plus la voie régionaliste, avec l’ancien président du Barça en tête de gondole, Joan Laporta, pas toujours exempt de populisme. Parce que “le Barça, c’est la sublimation épique du peuple catalan“, selon l’écrivain Manuel Vázquez Montalbán, l’engouement pour les blaugrana, symboles de la lutte indépendantiste (par opposition au “royal” Madrid), témoignent d’un mouvement européen de repli sur soi, qui est la vraie hype des années 2010. Si le foot a quelque chose à voir avec la politique, la bande de Guardiola ira au bout
Pourquoi le Real va gagner la C1
C’est même lui qui le dit, à en croire Didier Deschamps. Mieux encore que le coach de l’OM, Dom José sait gagner en jouant serré (ou moche, c’est une question de point de vue) et tous les entraîneurs ne peuvent pas en dire autant. La recette est toujours la même, un axe central infranchissable, des côtés bouclés à double tour, un bombardier au milieu, et un chasseur devant le but. A Chelsea: Carvalho-Terry-Gallas-Makelele pour le travail de sape, Lampard au milieu et Drogba pour planter. A l’Inter: Samuel-Lucio-Chivu-Zanetti, Stankovic au milieu et Milito dans la surface. La recette a marché l’an dernier, et l’ascendant psychologique du Mou est de retour. La forme de son équipe est ascendante face au Barça: défaite 5-0 à l’automne, nul au retour il y a deux semaines, victoire en prolongation en finale de coupe… La force est avec lui. 0-0 mercredi, 1-1 sur péno la semaine prochaine au Camp Nou, et l’affaire est dans le sac. Un coup franc de Ronaldo en finale, et hop, une troisième coupe aux grandes oreilles dans la baraque du Portugais.
Ce mec est un dingue, c’est un fait. Mais son repositionnement devant la défense, comme premier briseur de jambes est efficace, surtout contre des équipes très fortes dans l’axe. Comme lors des deux derniers clasicos, le Portugais va s’occuper de tout: Xavi, Iniesta, Messi, voire les trois à la fois. Solide comme une brique. La finale, ce sera relâche.
Ca fait un moment qu’on vous le dit . Cri-cri pento-plaquettes de chocolat est bien au dessus de Messi. Le lion, c’est lui. On le décrit trop perso, mais ça ne l’a pas empêché de porter ManU vers le titre. Maintenant, c’est au Real qu’il régale, et vu ce qu’il plante, son transfert est amorti. Pénos, coups francs, pied droit, pied gauche, tête en prolongations, c’est cadeau.
Quand on peut se payer un gus à 94 millions, il n y a pas de raison qu’on ne puisse pas s’offrir un arbitre ou deux, une bourde de Gabriel Milito ou même le comité directeur de l’UEFA. Quand on est Perez et le Real, on n’a pas le droit de se contenter de la Coupe du Roi, surtout broyée par le bus. Le fair play financier, c’est pour les loseurs.
Pourquoi Man U va gagner la C1
Cette année, Manchester est intouchable. Sans jouer particulièrement bien, ils ne perdent tout simplement pas. A coup de victoires 1-0 par-ci par-là, Manchester vainc sans convaincre. A ce train-là, le successeur de Ferguson ne sera pas Blanc mais Deschamps. Tout comme Marseille va faire un hold-up sur la Ligue 1, Manchester va empocher la Champion’s. Avec Vidic en MVP… Il faudra bien ça pour battre le Real de Mourinho et Pepe.
Au moins dans le foot… Voir Giggs, Scholes, Van der Sar sur le terrain est une éternelle cure de jouvence, une Madeleine de Proust qui rappelle l’avant “Big Four”, Cantona et ses chevauchées héroiques, Keane et ses tacles assassins. En plus, avec eux, pas de problème de dépendance. A part la vitesse, tout est là: technique, tactique… Il n y a qu’à voir les prestations de Giggs contre Chelsea en quart. Ces mecs-là méritent une troisième C1, ne serait-ce que parce qu’ils jouent et gagnent de la même manière depuis 20 ans, et parce que Paul Scholes n’aura jamais de Prix Nobel pour sa promotion de l’égalité entre les roux et les autres.
Quand l’équipe de Sir Alex gagne, elle aime le faire dans les grandes largeurs : en accumulant les trophées. Lors des deux dernières victoires en C1, les Devils s’étaient offert le championnat, la Cup et la coupe intercontinentale en 1999 et le championnat, le mondial des clubs et le Charity Shield en 2008. Cette année, Chelsea et Arsenal les ont gentiment laissés prendre respectivement 6 et 9 points d’avance en championnat. Le titre est quasiment dans leur poche, pourquoi ne pas ajouter la coupe aux grandes oreilles ?
Il est moche, colérique et anglais mais il est excessivement fort. Capable de tout faire: attaquant de pointe, ailier, meneur, deuxième arrière droit, le prodige est aussi un gros travailleur qui tacle comme un mort de faim et récupère plus de ballons que tous les attaquants madrilènes réunis. Après une Coupe du monde terne, Wayne a déjà mis le but de l’année pendant un derby. C’est sûr il sera présent pour les gros rendez-vous.
Oui, cette année marque le renouveau anglais. Le British est hype. Le mariage princier à venir redore le blason de la monarchie. Les critiques permanentes contre l’Euro valident leur décision de ne pas adopter la monnaie unique. L’intervention militaire en Libye légitime en creux celle en Irak. Cerise sur le gâteau, la finale a lieu à Wembley, dans leur jardin… Home sweet home.
Pourquoi Schalke va gagner la C1
Ouais, la Ruhr. Qui tient l’unité de l’UE? L’Espagne et sa dette abyssale, ces égoïstes d’Anglais ou le poumon économique de l’Allemagne? Sérieusement, elle nous sauve financièrement et on n’est pas très reconnaissant. On devrait leur donner la coupe, c’est un minimum. Et puis: Schalke 04, ville minière et industrielle, la passion, éternel second, tout ça… Il y a plus de romantisme et d’âme du jeune Werther dans un orteil de Raul que dans toute l’équipe de Manchester !
On sait que ce club ne peut pas gagner la Ligue des Champions, ce serait encore plus improbable que Monaco en 2004. Cela changerait des éternels gagnants que sont les trois autres équipes. Elles nous lassent. La victoire de Schalke serait contraire au sens de l’histoire. Il faut les soutenir, donc, en chantonnant des vers d’Heine pour y croire:
“Au commencement, j’étais près de désespérer et je croyais ne jamais y tenir ; et pourtant, j’ai fini par m’y faire, — mais ne me demandez pas comment !”
Les Galactiques sont comme les diamants, éternels, même quand ils sont revendus en seconde main au moment de liquider l’héritage. Morientes avait emmené Monaco en finale en 2004. Raul est en train de nous refaire la même avec Schalke. L’homme aux 73 buts en LDC, et aux 323 avec les Merengue est toujours là. Il fait partie de ceux qui nous ont fait rêver et qui disparaissent petit à petit. Le voir éliminer les Red Devils, puis ensuite se jouer du Mou, ce serait beau.
Laurent Legoupil, François Mazet, Olivier Monod et Clément Noël
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Photo: Ramos et Villa pendant la finale de la coupe du Roi/REUTERS/Sergio Perez