Arsenal devait perdre, Racine l’avait écrit

sadowaEncore une fois, Bacary Sagna se fait prendre sur son flanc droit

Merci Monsieur Moussaka, merci Van Persie, Wenger, Guardiola, Messi, Djourou, Busquets, merci le foot, ma maman, et le rhum arrangé du bar La Plage, rue de Charonne.

Une nouvelle fois, avec le match retour entre Barcelone et Arsenal, le foot a démontré qu’il était l’alternative la plus crédible à la guerre. En Mondovision, comme on disait à une époque, la planète a regardé deux équipes s’affrontant avec tous les éléments dramaturgiques d’une pièce racinienne.

Le foot en soi, c’est pas mal (sauf la Jupiler Pro League). Le foot quand ça joue bien au ballon, c’est mieux. Le foot, quand ça joue bien et que le match est émaillé d’incidents et de petits drames, c’est génial.

Déjà, évacuons les si, si importants pour Arsène Wenger. Et si Robin Van Persie n’avait pas été expulsé, Arsenal serait resté à 11, Barcelone se serait exposé à des contres, blablabla… Et si les Autrichiens n’avaient pas subi une lamentable défaite à Sadowa en 1866, les Prussiens ne seraient pas devenus si puissants, la France n’aurait pas perdu l’Alsace, les Austro-Hongrois leur empire, il n’y aurait pas eu 14-18 et Céline n’aurait pas écrit le Voyage au Bout de la Nuit.

«C’est peut-être ça qu’on cherche à travers la vie, rien que cela, le plus grand chagrin possible pour devenir soi-même avant de mourir», écrit l’auteur du Voyage. Exactement ce qu’a ressenti Robin Van Persie au moment de son expulsion. L’homme s’est retrouvé tout seul, ne comprenant pas ce qui lui arrivait. Robin a beau être Néerlandais et venir de Feyenoord, il avait toute notre compassion. Nous pouvions, dans le bar où nous étions, hurler à l’infini contre l’arbitre Monsieur Busacca, que tout le monde appelait Moussaka, je ne sais pas trop pourquoi. L’Helvète, pour notre plus grand plaisir, semblait d’ailleurs avoir clairement choisi son camp, a contrario de la neutralité habituelle des Suisses, depuis la prise de conscience de leurs faiblesses irrémédiables après Marignan, 1515.

Le match auquel nous avons assisté était un match de catch, ou une pièce racinienne, ce qui revient à peu près au même. Tout était préparé à l’avance. On savait qu’à la fin Barcelone, bien supérieur, allait gagner, mais que cela ne se passerait pas sans larmes. Il restait juste à scénariser les rebondissements.

Acte 1, l’arène

«Quand j’écoutais la foule réagir aux matchs précédents, j’avais l’impression d’être à un enterrement. Lorsque ma musique a commencé à tourner, c’était comme au bon vieux temps, les gens étaient debout, c’était électrique», s’émouvait le catcheur Hulk Hogan, une phrase réutilisable jusqu’à plus soif pour les confrontations entre Barcelone et Arsenal.

Acte 2, la bataille des Thermopyles

Jusqu’à la 65ème minute, Arsenal repoussait vaillamment les barbares. Les Gunners, si inférieurs en talent, donnaient l’impression d’être 11 contre une horde infinie de Catalans, qui venaient buter de manière désordonnée sur la défense anglaise. Parmi les guerriers grecs, Djourou était le brave parmi les braves.

Acte 3, le coup de poignard

Un match de Ligue des Champions n’est pas forcément fidèle à l’histoire. Au final, les Spartiates anglais furent submergés par les troupes de Guardiola. Restait un espoir, un maigre espoir: que Niklas Bendtner ne rate pas son contrôle. Mais, là aussi, c’était attendu. Bendtner devait rater son contrôle et, pour avoir aussi bien tenu son rôle, recevait l’hommage appuyé d’un de mes camarades: «Ce Danois mérite une Golden Shower

Arsenal avait perdu, Wenger se retrouvait seul, une nouvelle fois mis en échec. Il avait beau gesticuler, râler contre l’arbitrage ou ce que vous voulez, il savait sans doute que c’était inévitable. Arsenal devait perdre, aussi certainement que Titus et Bérénice devaient se séparer, et nous qui avions souhaité à la fois le bonheur du club anglais et un tel scénario, nous étions Antiochus, triste et coupable à la fin. Un seul mot alors, nous venait à l’esprit: «Hélas».

Clément Noël

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Crédit: la bataille de Sadowa

2 commentaires pour “Arsenal devait perdre, Racine l’avait écrit”

  1. Ô d’un peuple innocent barbare destinée !

    Lisez, lisez l’arrêt cruel, détestable.

    Nous sommes tous perdus, et c’est fait d’Arsenal.

  2. Excellent article à la présentation vraiment originale…
    Un vrai plaisir, du football littéraire comme on en a bien peu…

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