On devrait toujours faire confiance aux lecteurs de PDPS. Le 21 février dernier, en réponse à notre article «Heureux groupe pour l’Euro 2012», dans lequel nous nous ingénions à démontrer le faible niveau de notre groupe de qualification pour la compétition ukraino-polonaise, Arviol nous écrivait, la plume acerbe et sévère. «Redescendez sur terre la France est forte que sur les papier, sur le terrain vous êtes pitoyable.» Arviol avait malheureusement raison, sauf pour la grammaire.
Les Bleus affrontent ce soir la Biélorussie au Stade de France, et on n’est pas loin d’avoir peur des gars de Bernd Stange, sympathique sélectionneur des verts et rouges, ancien informateur de la Stasi et ex-coach de l’Irak (au crépuscule de Saddam). Le Mondial sud-africain est passé par là. On ne reviendra pas en détail sur le fiasco de juin, déjà brillamment exposé ici. Tout juste rappellera-t-on quelques faits. Un nul, deux défaites, et surtout un délire politico-sportif de deux mois, culminant avec la sortie sur les «caïds immatures» de Roselyne Bachelot dans l’hémicycle et le procès brinquebalant fait aux «meneurs» de la mutinerie de Knysna.
Laurent Blanc, le nouveau sélectionneur, veut liquider cet héritage. Il a déjà dû avaler quelques couleuvres – notamment la suspension des Evra, Ribéry et Toulalan – il espère désormais que ses joueurs lui épargneront un automne de feu en ramenant deux résultats positifs de Saint-Denis et de Sarajevo (mardi, les Bleus y affrontent la Bosnie). Sauf que rien n’est moins sûr. Le mal va bien au-delà d’un simple «problème Domenech», et le champion du monde 1998 ne ramènera pas si facilement à la maison la culture de la gagne.
L’équipe de France ne fait plus partie des grandes. Le revenant Louis Saha se disait cette semaine choqué que les tricolores figurent au 21ème rang du classement Fifa (derrière la Slovénie et l’Australie, ndlr). On ne peut que lui donner tort. Aucun des Bleus, à part le gardien Hugo Lloris et le milieu Florent Malouda, n’appartient au gotha mondial. Le groupe de 23 joueurs retenu pour affronter la Biélorussie a une moyenne de 25 ans et de 10 sélections. Autant dire rien.
La renaissance – si elle arrive – prendra du temps. Blanc en est conscient. A Clairefontaine, cette semaine, il a multiplié les messages codés. A l’intention de l’opinion publique, de sa fédération, et de ses joueurs. A l’avance, il démine le terrain. «Cette équipe a de bons joueurs, pas de grands joueurs (…). En 1998, on avait des bons joueurs, un grand joueur (Zidane, ndlr), et surtout un état d’esprit (…) Un sélectionneur peut s’appuyer – ou non – sur un noyau de joueurs.» Sur son projet de jeu, on a même cru parfois entendre le fantôme de Domenech. «Ce sont les joueurs qui font l’animation offensive, pas le système», a-t-il expliqué, en substance.
Charge donc aux Ménez, Hoarau, et Rémy de planter contre les 11 Biélorusses qui camperont dans leurs 40 mètres ce soir. Comment ces bleus réagiront-ils si d’aventure le Stade de France se mettait à les siffler? On a pu constater en novembre dernier, lors du fameux match contre l’Irlande, l’effet paralysant d’une telle ambiance…
Pour masquer ces doutes, la Fédération française de football (FFF), confrontée à une chute drastique du nombre de licenciés, en fait des caisses. Son président par intérim, Fernand Duchaussoy a expliqué jeudi dans L’Equipe que les joueurs avaient signé une charte de bonne conduite (pas de casque en public, dire bonjour au président, signer des autographes). Juste une question: ça ne date pas déjà de 2008, ce genre de truc?
La fédé bat aussi le rappel des glorieux anciens, garants de l’esprit France-1998. Le staff de Blanc en est truffé. L’intendant Henri Emile et ses 67 ans est dans la place, tout comme l’attaché de presse Philippe Tournon. Mieux, Zinédine Zidane est venu faire le mariole mercredi au château. Sa mission: porter la bonne parole («l’équipe de France, c’est bieng») et distraire les médias. C’était définitivement mieux avant.
Sydney Maréval
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Crédit photo: Reuters/Charles Platiau
[…] Ce billet était mentionné sur Twitter par Jérôme Lefilliâtre, Plat du Pied . Plat du Pied a dit: 11 Bleus contre un ancien de la Stasi http://fb.me/E9DpJUNE […]
Ce qui n’a pas changé avec l’été, c’est l’humeur rabat-joie qui est celle des observateurs de l’équipe de France. Au nom de l’objectivité et de l’honnêteté, on critique l’enthousiasme.
L’envie de gagner, l’espoir de gagner, n’est pas forcément un signe de naïveté quant au niveau des joueurs. Notre équipe doit continuer à s’offusquer de son rang mondial. Pour mériter mieux, elle doit commencer par vouloir mieux.