Nous entrons dans un monde multipolaire, un monde qui n’est plus divisé en deux avec d’un côté les Etats-Unis et de l’autre l’URSS. TOP500 nous offre un critère en or avec le répertoire publié tous les six mois des très gros ordinateurs installés et mis en service dans le monde. La bipolarité n’est pas une chose assurée, sauf dans le courant alternatif ou pour les piles qui alimentent nos petits ordinateurs ridicules.
Un mot d’abord sur ces mastodontes du calcul. Leur puissance se calcule en Flop/s ou Flops. Amusant en français, Flops est l’acronyme réalisé à partir de l’anglais: FLoating point Opération Per Second. Faisons confiance en l’occurrence à Wikipédia. On compte aujourd’hui en PetaFlop. Autrefois on comptait en GigaFlops, soit 1 milliard d’opérations par seconde, 10 puissance 9 Flops, ou 1 Flops multiplié par 1.000.000.000, ou encore un 1 suivi de 9 zéro. On a ensuite compté en TeraFlops. Et donc maintenant en PetaFlops: 1 flop avec 15 zéros derrière, ou un million de milliards d’opérations en une seconde. Bon, pour certains spécialistes, ce n’est pas une bonne manière de mesurer la puissance de calcul des superordinateurs. Passons.
Contentons-nous de poser deux questions: où se trouvent-ils et à quoi servent-ils? Et surtout regardons comment le paysage a évolué depuis 5 ans, c’est-à-dire depuis une éternité dans le monde des ordinateurs. En 2005, sur les 500 méga ordinateurs (MO) installés à travers le monde, on en comptait 277 aux Etats Unis. 55%. La Russie, ancienne superpuissance, n’en comptait que trois, soit autant que la Nouvelle Zélande ou la Suède et presque trois fois moins que l’Italie ou la France (11 chacun). Le deuxième puissance informatique à l’époque était l’Allemagne (40 superordinateurs) ou l’Union européenne avec un total de 75 machines.
Nous en avions donc 284 en Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada), 59 en Asie (Chine et Japon) et 58 en Europe occidentale et très peu ailleurs: 3 dans toute l’Afrique, 4 en Europe centrale ou orientale, 10 au sud du Texas.
Et depuis? Eh bien, les Etats-Unis ont progressé, puisque 56% des 500 plus gros ordinateurs du monde se trouvent sur son territoire selon le dernier classement réalisé le mois dernier et daté de juin 2010. Cela donne 282 MO contre 277 cinq ans plus tôt. La prédominance américaine demeure sans l’ombre d’une hésitation. La multi-polarisation s’organise en face, si l’on ose dire. Mais, il n’y a pas, dans l’immédiat, un autre pôle émergeant. La Grande-Bretagne (38 machines, 8% du parc), la France (29, 6%) ont progressé, la Chine aussi, mais elle ne compte que 24 MO.
Et l’UE? Avec 124 MO, elle reste assez loin de l’épouvantail américain. Et mieux vaut ne pas regarder qui fabrique les 500 ordinateurs poids lourds. L’Asie a produit 11 des machines sous tension actuellement, l’Europe Occidental 12 et les Etats-Unis 473, soit 95%. Bipolarité avez-vous dit? Peut-être, mais ailleurs alors.
Deux signes de rééquilibrage tout de même. La Chine et la France viennent d’annoncer la mise sous tension, la mise en service, de super-calculateurs Petaflopiques, les deux premiers construits en dehors des Etats-Unis. Le Tera100 (1,25 PetaFlops) de Bull mis sous tension à la fin du mois de mai, n’entrera dans le classement qu’en novembre prochain, mais il se situe à la troisième place du palmarès. Devant se trouve le Jaguar (1,75 PetaFlops) du Oak Ridge National Laboratory américain et le chinois, baptisé Nabula ((1,27 PetaFlops), du National Supercomputing Centre in Shenzhen (NSCS), mis au point par Dawning (1,27 PetaFlops).
Cette rivalité ressemble assez au mesurage de zizi à l’école primaire, sauf que le sujet est plus sérieux. Ses grosses têtes numériques servent en général à faire la guerre ou d’autres activités approchantes. Si le TOP500 publie un nombre impressionnant de données techniques, il n’est pas question de dire à quoi les ingénieurs les utilisent exactement. Si l’on regarde le Top500, l’industrie est prédominante, mais pour le Top 100, la défense est clairement le principal utilisateur. On dénombre en effet 39 MO dans la catégorie «Application non précisée» qui fleure bon le «circulez, y a rien à voir» des militaires. Pour le reste, 38 sont destinés à la recherche qui bien souvent nous ramène aux armements. Un exemple: le Tera100 servira à simuler des essais nucléaires.
Bref, la métaphore qui veut que l’on soit passé de conflit du fort au fort, au fort au fou, apparaît clairement. La bataille du World Trade Center avait opposé les plus gros calculateurs du monde à une dizaine de cutters.
PhDx
Voir aussi le Top 100 simplifié
Les Onze méga-ordinateurs français.
Le Tera100 de Bull n’entrera dans le TOP500 qu’en novembre prochain
Intéressant.
Une petite coquille cependant : Peta, million (6 zeros) de milliards (9 zéros) comme vous le dites, cela fait donc 15 zéros, en non 24.