Nicolas, la petite Clio et la montagne de la balance des paiements

Au 55, rue du Faubourg Saint-Honoré, au Palais de l’Elysée, Nicolas Sarkozy veille aux intérêts de la France et rappelle la petite Clio à ses devoirs. Carlos Ghosn, le président de Renault s’est rendu au rendez-vous et a assuré” qu’une partie des Clio 4 seront assemblés à Flins”. Pour le reste, aux frontières les douaniers veillent et dépriment. Ce n’est pas la Clio qui leur pose problème. Le déficit mensuel de notre balance des paiements représente une montagne de 300.000 Clio Campus à 10.000 € pièce. Quand, en 2009, la production de Flins excède de 4.000 par an les immatriculation dans l’Hexagone. La France a peut perdu la guerre commerciale contre le reste du monde, mais elle n’a pas perdu la bataille de la Clio.

Nicolas Sarkozy préfère donc regarder Clio, la petite Renault. Quoi? On projetterait de vendre aux français des voitures venues d’ailleurs. Il faut que cela cesse. Pas sûr que ce soit le bon dossier, mais il faut bien commencer. Va pour Clio. C’est vrai que des Clio neuves sont immatriculées en France et viennent d’ailleurs. Au cours des 6 premiers mois de l’année 157.000 Clio ont été assemblées dans six pays, selon les comptages de l’entreprise. Les ouvriers de Flins en ont assemblés 66.000, Cela fait 42% de la production mondiale. Dans le même temps 64.000 Clio ont été immatriculées en France. Sur l’année il reste 4.000 Clio a exporter. Pas de quoi réveiller le président de la République. Eh bien si, justement. Le ministre de l’Industrie, Christian Estrosi, le disait le week-end dernier. Nicolas Sarkozy l’a redit ce week-end à Carlos Ghosn, le président de Renault : les Clio vendues en France doivent être produite en France.

Une montagne de 3,7 milions de Clio.
Soit, l’intention est bonne. A priori en tout cas. Mais quelle est la situation de notre commerce extérieur? Prenons les chiffres de l’OCDE qui ont l’avantage de permettre une comparaison internationale. En 1999, la balance des paiements est largement positive : 46 milliards de dollars. Nous vendons au reste du monde plus que nous ne lui achetons. C’est un record ce chiffre, mais cela fait déjà sept longues années que les douaniers voient entrer plus d’argent qu’il n’en sort. Pourquoi cela s’arrêterait-il? La France est sur une bonne dynamique, le Made in France se vend bien. Non seulement ça ne va pas se prolonger, mais ça va sérieusement se gâter. Les années 2000 ne seront qu’une lente et inexorable descente? En 2005, la balance des paiements devient négative de 10 milliards de dollars. Le fond du gouffre c’était en 2008. Il semble que personne ne l’ai vu : -64,4 milliards de dollars.  Et l’année dernière, si les choses se sont arrangées c’est uniquement parce que le commerce mondial hiberne. A fin septembre, le trou était déjà de 40 milliards de dollars! Soit, sur 12 mois une montagne de 3,7 millions de Clio campus!

Les plus patients peuvent aller faire un tour dans le kiosque statistiques des Douanes, il n’est pas facile de trouver un secteur, un sous-secteur ou un produits industriel dont la balance aux frontières soit supérieur à 0. Avant, il y avait l’automobile. Tous les ans, les échanges de véhicules autombiles dégageaient un solde positif de 7 milliards d’euros. L’année dernière c’est un solde négatif de 7 milliards que l’automobile devrait afficher. Aujourd’hui, il y a toujours les vins ou le tourisme pour faire rentrer des recettes. Peut-être la haute couture et les produits que se transportent mal. L’idéal est de vendre une voiture dans un rayon de 2.500 km autour de l’usine. Le papier toilette ça ne va pas au-delà de 400 km. Une chance, notre balance commerciale du “papier crêpe à usages domestiques, d’hygiène ou de toilette”, cote des douanes 48030031, est positive. Sur les douze dernier mois, nous en avons vendu pour 69 millions d’euros au reste du monde et nous en avons importé pour 59 millions. C’est un peu comme si aux Jeux olympiques nous avions enlevé la médaille d’or de la boule lyonnaise.

Le consommateur est-il irresponsable?
Plus sérieusement, peut-on faire en sorte que les voitures vendues en France soit construites en France? Non. Que ce soit heureux ou malheureux la réponse est négative. Les frontières sont ouvertes, Bruxelles veille à ce qu’aucune préférence nationale ne vienne gêner la circulation des marchandises dans l’Union européenne et chacun peut acheter la voiture de son choix. D’ailleurs, le consommateur français peut s’inquiéter de voir des voitures fabriquées en Turquie arriver en France, il peut aussi choisir de les acheter, ou pas. En effet, le consommateur n’est pas sans responsabilité. Quand il décide de s’en offrir une, il compare les prix, évalue le rapport qualité/prix. Après, il marchande pour arracher 5, 10 ou 15% de rabais. Bref, il a le choix et il en use. En face, le vendeur de Renault, de Peugeot, de Skoda ou d’Audi va raboter ses prix et le patron des usines va limer ses coûts et réduire les emplois… Pour redresser la balance commercial chacun peut agir et refuser d’acheter une Volkswagen,  une Seat, une Fiat. Aucune n’est assemblée en France. En même temps nous sommes en 2010 et Renault vend des voitures en Allemagne, en Espagne ou en Italie. Revenir à une politique de châteaux forts paraît un peu dépassé.

A  quoi ressemble, l’ancienne forteresse ouvrière? A Boulogne-Billancourt, le berceau du groupe, il ne reste que le siège, le design et la cabane où Louis Renault a assemblé ses premières automobiles. La plus grande usine de Renault se trouve aujourd’hui en Turquie, à Bursa, à 3.478 km. En même temps, Renault possède 44% de Nissan, contrôle le coréen Samsung et détient Dacia, une marque qui peut lui permettre d’aller en Afrique, en Amérique du Su ou en Europe Central. La contrepartie est évidemment que 20% des voitures particulières estampillées Renault ou Dacia sont construites en France contre 63% en 1999.

Maintenant, la France a-t-elle définitivement perdue la guerre face à la Chine, à la Corée ou au Japon? On peut le dire… Mais alors, il faudra alors expliquer pourquoi l’Allemagne a réalisé un parcours exactement inverse. En 1999, sa balance des paiements est négative de 28 milliards de dollars. Dix ans plus tard, elle est positive de 244 milliards de dollars. Sans doute faut-il regarder plus de plus prêt la question de la compétitivité des entreprises françaises plutôt que de montrer du doigt la petite Clio. Clio est la muse de l’histoire, pas des histoires que l’on racontent pour calmer les enfants.

PhDx

Les commentaires sont fermés !

« »