Areva c’est fini. En tout cas le rêve d’Anne Lauvergeon (Normale sup, Mines) de faire de l’entreprise qu’elle dirige un acteur majeur de la filière nucléaire dans le monde s’est envolé avec la perte du contrat, estimé à 20 milliards d’euros, en Abou Dhabi, au bénéfice d’un consortium sud-coréen, Korean Electric Power Corporation (Kepco).
Partant du combustible nucléaire, elle se proposait de construire une offre globale en passant par la maîtrise de la construction des centrales, le transport et la distribution de l’électricité. Le 1er décembre, Anne Lauvergeon était contrainte de céder au tandem franco-français
Alstom-Schneider Electric, sa filiale
Transmission & Distribution. Deux couleuvres en une. Elle refusait, la vente et aurait privilégié une autre offre, celle venant de Toshiba ou celle avancée par General Electric. Tout sauf le renforcement d’un rival en France.
L’échec abou-dhabien ouvre la perspective à la reconstruction de la filière nucléaire française sous la direction de Nicolas Sarkozy avec deux patrons très proches dans le rôle des solistes. Henri Proglio, pdg d’EDF et président non exécutif de Veolia, et Patrick Kron, pdg d’Alstom, deux proches qui figuraient parmi les invités du Fouquet’s au soirt du 6 mai 2007. Ils seront à la manœuvre dans les semaines à venir.
Le schéma est prêt et devrait se mettre en place rapidement. Il faut distinguer cinq domaines de compétences: le combustible, l’ingénierie, les équipements qui entrent dans la construction d’une centrale, l’exploitation et les équipements qui permettent de connecter la centrale au réseau. Areva, née de la fusion de la Cogema (combustible), de CEA Industrie (ingénierie) et de Framatome (conception et construction de centrale) pouvait prétendre à bâtir une offre complète, à l’exception de l’exploitation confiée à EDF. Ce dernier n’avait à priori pas beaucoup d’atouts dans son jeu. L’un des premiers exploitants de centrales nucléaires dans le monde pouvait bien développer des activités d’ingénierie, il arrivait en bout de chaîne.
La France revient donc a une culture étatique : le
colbertisme ou le
pompidolisme. L’Etat décide et organise l’industrie tricolore face au reste du monde. On pourra toujours parler de libéralisme ou d’ultralibéralisme, cela n’a rien à voir à l’affaire ou avec les affaires. Elles sont supposées trop sérieuses pour être abandonnées à des industriels. Sur ce point, les syndicats, et notamment l’omniprésente CGT-EDF, n’a rien à redire.
L’Elysée devrait donc délimiter les frontières et chacun devra s’y conformer. A Alstom les équipements (turbines) dans la centrale et à la sortie avec T&D. A EDF l’exploitation et l’ingénierie en coordination étroite avec Areva. Ce dernier pouvant conserver une complète maîtrise du combustible…de l’approvisionnement au traitement. Cela s’appelle un démantèlement. Pour écrire le scénario, Nicolas Sarkozy a confié une mission d’étude à François Roussely. L’ancien patron d’EDF (1998-2004) apparaît d’ailleurs comme un proche d’Henri Proglio qui déclarait récemment aux Echos (18/11/09): « Mon ambition est d’avoir une filière nucléaire française qui fonctionne. Cela implique qu’on repense toute la filière, en particulier les rôles d’Areva et du CEA. » Le patron d’EDF insistait pour les mal comprenants que la fusion Cogema et de Framatom pour créer Areva était “probablement une erreur.”
Le corps des Mines pourra se consoler de la perte d’influence d’Anne Lauvergeon, longtemps couvée du regard par ces les mineurs, Patrick Kron, X Mines servira de relais pour rassurer ceux qui s’inquiètent de voir un HEC, Henri Proglio, patron de la filière nucléaire. A propos d’inquiets il faudra faire les choses discrètement vis-à-vis de Bruxelles. Cela fait désordre quand
Le Monde: “L’Elysée décide qu’Areva T&D restera français”.
PhDx