Tous à l’école (de journalisme) !

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Disclaimer: l’auteure de ce billet de blog n’a pas fait une, mais deux écoles de journalisme. Deux. Ecoles. De. Journalisme.

Une en France, à Sciences Po Paris, et l’autre, que finalement vous suivez avec moi depuis septembre dernier, à Columbia, New York. Columbia, qui, ça fait toujours du bien de se le rappeler, coûte 43.527 dollars (31.697 euros) de frais d’inscription. Pour dix mois.

Dans mes expériences professionnelles françaises, faire des études de journalisme a toujours été un point positif auprès de mes employeurs. Mais je me souviens encore de ma discussion avec mon rédacteur en chef à Politico il y a un an: dix minutes passées à le convaincre — lui même avait pourtant un diplôme de journalisme! — que postuler à Columbia était une bonne idée pour la suite de ma carrière.

«Mais pourquoi faire?», m’avait-il alors demandé, persuadé que des expériences professionnelles suffiraient amplement, selon le mythe du petit jeune qui commence par la rubrique chiens écrasés avant de progresser sous la houlette de ses aînés pour devenir grand reporter/ photojournaliste de génie/ rédacteur en chef impressionnant.

Les journaux meurent et les écoles se remplissent

En janvier 2010, le site Paper Cuts, créé pour chroniquer la mort des journaux américains, affirme que six publications ont fermé et au moins 813 personnes licenciées pour des raisons économiques. En 2009, 584 journaux ont procédé à des licenciements ou des plans de départ, pour un total de 14.845 journalistes remerciés. Et ces chiffres ne concernent que les journaux papiers, pas les chaînes télévisées ou les radios. En France aussi les plans de départ se succèdent dans les médias.

Face au triste état du marché de l’emploi, les 13 écoles de journalisme reconnues par la profession qui existent en France et des centaines d’écoles qui enseignent le métier aux Etats-Unis (difficile d’en donner un nombre exact, puisque le journalisme s’y enseigne en licence ou en master à l’université) continuent à diplômer des centaines (de futurs?) journalistes, et ne désemplissent pas.

Dans ces conditons, «mais pourquoi faire une école de journalisme?» reprend Seth Lewis, nouvellement engagé par le NiemanLab, l’excellent blog sur les médias d’Harvard, pour discuter éducation et formation. Comment aller à l’école pourrait aider à se préparer à un métier qui va changer mille fois entre le jour où je suis arrivée à New York en septembre et le jour où j’en repartirai en mai? Pourquoi faire confiance à des profs qui sont eux-mêmes en train de réapprendre leur métier?

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5 millions de dollars, ça vous tente?

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Depuis que je suis ici j’ai l’impression d’entendre parler d’un nouveau projet médiatique toutes les semaines: Spot.us qui s’allie au New York Times pour une enquête, une coopérative locale formée par des anciens du Chicago Tribune qui produit l’édition Chicago du New York Times, la Columbia Journalism Review lance un programme pour récupérer des supers journalistes au chômage, sans parler de tous les sites hyperlocaux qui se lancent partout aux États-Unis.

Certaines de ces start-ups se lancent grâce à de riches investisseurs ou des médias déjà existants. Mais d’autres existent grâce à des fondations qui offrent des prix conséquents aux nouveaux entrepreneurs. Les États-Unis ont, en général, un rapport aux bourses très différent de la France. Dans les milieux universitaires, en plus des bourses sur critères sociaux, les facs ont toutes des dizaines de bourses octroyées par des particuliers ou des fondations sur des critères ultra précis -du style, “cette bourse ira à un étudiant dont le grand-père a combattu pendant la Seconde Guerre Mondiale et qui se destine à être grand reporter de guerre” ou “cette bourse est destinée a un individu qui respecte des valeurs spirituelles et le goût de l’enseignement”-. Sans parler des “fellowships”, qui encouragent les journalistes aguerris à revenir à l’école en leur payant les 60 000 dollars de frais de scolarité plus 50 000 dollars d’argent de poche. (Toute pointe de jalousie dans cette description serait purement imaginée par le lecteur).

J’allais me lancer dans un plaidoyer pour plus de fondations en France quand je me suis rendue compte que Frédéric Filloux expliquait en détails il y a quelques mois sur Slate pourquoi ce modèle des fondations à but non lucratif ne pourrait pas fonctionner pour les médias en France: la richesse colossale de ces mécènes américains, la rentabilité de la presse française contre la faiblesse culturelle du mécénat français et la différence de nature entre les mécènes américains et français font toutes parties des raisons qui empêchent d’importer le modèle américain dans l’hexagone (un peu comme les bourses d’études américaines sont à la hauteur des frais de scolarité américains).

Mais puisqu’il est impossible d’amener les États-Unis à la France, amenez la France aux États-Unis! Pour la quatrième année de suite, la Knight Foundation octroie 5 millions de dollars à des projets médiatiques grâce à son News Challenge. Créée en 1940, la John S. and James L. Knight Foundation a pour but de promouvoir le journalisme, particulièrement le journalisme local ou tout ce qui lie les journalistes à la communauté qui les entoure.

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