Un des thèmes les plus abordés dans mes cours d’entrepreunariat, de réseaux sociaux, et par les nombreux invités qui passent à l’école, c’est l’idée qu’on a envie de lire ce que nos amis nous suggèrent.
Peut-être que vous avez fait (ou faîtes encore?) partie des lecteurs qui aiment découper leurs articles préférés pour les ramener chez eux et les afficher dans leur chambre ou les faire lire à leur famille, ou peut-être abusez-vous du bouton «envoyer cet article par email» sur tous les sites d’infos.
Personnellement, je me suis aperçue que j’avais arrêté de lire mes flux RSS pour ne plus me satisfaire que de Twitter, Facebook, et de mes sites préférés pour me tenir au courant de l’actualité. (Depuis que j’ai commencé ce blog, je me suis remise aux liens RSS. Twitter me sert d’entrée dans l’info du jour mais je l’utilise aussi pour suivre des amis, Facebook m’offre des trouvailles d’actu mais je m’en sers plutôt pour un usage personnel, tandis que mes liens RSS forment une page entièrement dédiée à ce qui se passe dans les nouveaux médias.)
Recherche sociale
On a beaucoup parlé de Google Buzz ces dernières semaines, mais la version publique de Google Social Search, lancée un peu plus tôt sans trop de fanfare, est beaucoup plus impressionnante: quand vous avez besoin d’information, vous tapez quelques mots clés dans le moteur de recherche; sauf qu’en plus des résultats habituels (news, photos, pages webs et — depuis peu — derniers tweets), Google propose également des résultats tirés de votre réseau, affichés en bas de la première page. Votre réseau est automatiquement défini par vos contacts gmail, comme Buzz, et vous pouvez y ajouter votre compte Twitter ou Friendfeed.
Il s’agit carrément de considérer vos connaissances comme vos sources d’informations: si j’hésite à louer un film, en plus des critiques et de la page Wikipédia qui lui est dédiée, je verrai le post de Charlotte qui l’a démonté méthodiquement sur son blog, et celui de Luisa qui l’a défendu. «Ce n’est que la première étape d’un effort continu pour que la recherche web Google soit toujours aussi sociale que le web lui-même», expliquait l’entreprise sur son blog. Tout est dit. Google n’est pas en compétition avec Twitter, mais en compétition avec le web même. Et Facebook l’est tout autant.
Facebook comme source de trafic pour les sites d’infos
lire le billetUne des grandes opportunités qu’offre internet en matière d’information, c’est la possibilité de la présenter autrement. Que ce soit avec des webdocus dont vous êtes le héros ou qui sont séquencés originalement, Internet permet d’échapper à la linéarité.
En dehors de ces web-documentaires, qui traitent de sujets particuliers, il existe des interfaces qui cherchent à présenter l’info de la journée d’une façon originale, qui laisse plus de liberté au lecteur ou cherche à organiser l’information selon une autre hiérarchie que celle éditoriale et humaine, d’un rédacteur en chef.
En septembre dernier, Chris Wilson de Slate.com a lancé News Dots, une sorte de réseau social géant consacré à l’information: les mots-clés des articles sont transformés en tags, et les tags apparaissent sous forme de cercles, plus ou moins gros selon le nombre de publications qui les utilisent. Les cercles/tags sont reliés entre eux quand ils sont apparus ensemble dans aux moins deux articles. Pour le vendredi 12 février 2010 «United Kingdom» sera par exemple relié à «Afghanistan», «Toyota», «Japan», «Bank», «Britain», etc. Il suffit de cliquer sur chaque cercle pour voir apparaître sur la droite une liste d’articles qui lui correspondent. L’historique remonte à environ deux semaines.
«J’ai créé News Dots pour que les lecteurs puissent avoir une vue d’ensemble de la façon dont les informations sont connectées les unes aux autres par quelques degrés de séparation», explique Chris Wilson. «C’est aussi pratique pour voir les sujets les plus couverts par les médias».
L’idée lui est venue il y a trois ans, au moment du procès de Scooter Libby dans l’affaire Valerie Plame. «Je lisais le journal, et dans le même quotidien il y avait des articles sur le procès et sur des attentats suicides en Irak. Et je me rappelle m’être dit que ces sujets étaient étroitement liés même si, là dans l’immédiat, ils n’avaient rien à faire l’un avec l’autre. Libby était accusé d’avoir menti en disant qu’il n’avait pas fait fuité le nom d’un agent de la CIA pendant la montée vers la guerre en Irak, la même guerre qui était désormais devenue une violente insurrection».
Comme il se renseignait également beaucoup sur la théorie des réseaux sociaux, Chris Wilson s’est dit «que le moyen de montrer comment ces articles étaient connectés l’un à l’autre serait peut être un diagramme du réseau de ces sujets».
Mais chaque média tagguait ses articles selon différents systèmes, et il est «incroyablement difficile d’apprendre à un ordinateur que “Clinton, Hillary Rodham” est la même personne que “Hillary Clinton”». Il paraissait donc impossible de réussir à compiler plus d’une publication dans ce diagramme.
C’est là qu’est arrivé Calais, un service créé par Thompson Reuters: il suffit de lui fournir des articles pour qu’il les taggue automatiquement avec ses mots-clés, permettant ains d’obtenir un système de nomenclature uniforme pour tous les articles, quelque soit le média d’où ils viennent.
A terme, Chris Wilson aimerait que News Dots soit un portail d’accès à l’actualité, mais pour l’instant, «c’est un peu chaotique. Je le verrais plutôt comme une destination secondaire, où les gens se rendent après avoir lu leur journal du matin pour prendre un peu de recul». Il voudrait ajouter plus de publications et améliorer la transition entre les différents jours pour que les gens puissent voir l’actu évoluer devant leurs yeux, plutôt que d’avoir un diagramme remplacé par un autre diagramme.
Disclaimer: l’auteure de ce billet de blog n’a pas fait une, mais deux écoles de journalisme. Deux. Ecoles. De. Journalisme.
Une en France, à Sciences Po Paris, et l’autre, que finalement vous suivez avec moi depuis septembre dernier, à Columbia, New York. Columbia, qui, ça fait toujours du bien de se le rappeler, coûte 43.527 dollars (31.697 euros) de frais d’inscription. Pour dix mois.
Dans mes expériences professionnelles françaises, faire des études de journalisme a toujours été un point positif auprès de mes employeurs. Mais je me souviens encore de ma discussion avec mon rédacteur en chef à Politico il y a un an: dix minutes passées à le convaincre — lui même avait pourtant un diplôme de journalisme! — que postuler à Columbia était une bonne idée pour la suite de ma carrière.
«Mais pourquoi faire?», m’avait-il alors demandé, persuadé que des expériences professionnelles suffiraient amplement, selon le mythe du petit jeune qui commence par la rubrique chiens écrasés avant de progresser sous la houlette de ses aînés pour devenir grand reporter/ photojournaliste de génie/ rédacteur en chef impressionnant.
Les journaux meurent et les écoles se remplissent
En janvier 2010, le site Paper Cuts, créé pour chroniquer la mort des journaux américains, affirme que six publications ont fermé et au moins 813 personnes licenciées pour des raisons économiques. En 2009, 584 journaux ont procédé à des licenciements ou des plans de départ, pour un total de 14.845 journalistes remerciés. Et ces chiffres ne concernent que les journaux papiers, pas les chaînes télévisées ou les radios. En France aussi les plans de départ se succèdent dans les médias.
Face au triste état du marché de l’emploi, les 13 écoles de journalisme reconnues par la profession qui existent en France et des centaines d’écoles qui enseignent le métier aux Etats-Unis (difficile d’en donner un nombre exact, puisque le journalisme s’y enseigne en licence ou en master à l’université) continuent à diplômer des centaines (de futurs?) journalistes, et ne désemplissent pas.
Dans ces conditons, «mais pourquoi faire une école de journalisme?» reprend Seth Lewis, nouvellement engagé par le NiemanLab, l’excellent blog sur les médias d’Harvard, pour discuter éducation et formation. Comment aller à l’école pourrait aider à se préparer à un métier qui va changer mille fois entre le jour où je suis arrivée à New York en septembre et le jour où j’en repartirai en mai? Pourquoi faire confiance à des profs qui sont eux-mêmes en train de réapprendre leur métier?
lire le billetLa tablette d’Apple est enfin sortie, et elle ne semble pas avoir grand chose de prévu pour les journaux et les magazines. Les livres auront leur iBooks Store, mais rien sur — ou pas encore — un iNews Store ou un iMedia store. Est-ce vraiment une si mauvaise chose?
Juste avant la présentation de la tablette, plusieurs médiasannonçaient qu’Apple allait sauver les journaux et magazines papier. Une sorte d’outil salvateur qui allait renverser la fâcheuse tendance des journaux et magazines américains à mourir l’un après l’autre.Premier problème: contrairement au Kindle, l’iPad permet de surfer sur le web. Comment, dès lors, faire payer aux consommateurs des contenus qu’ils peuvent obtenir gratuitement en visitant les sites gratuits de ces journaux et magazines? Certes, des médias comme le quotidien britannique /The Guardian/ ont montré que les lecteurs pouvaient très bien accepter de payer si l’application était de qualité.
Mais la vente d’applications iPhone n’offre pas de business modèle viable: prenons le Guardian justement. Son «app» est un gros succès, avec 70.000 téléchargements le mois de son lancement. A 2.39£ (2.99€ en France) l’application, si le journal continuait d’en vendre 70.000 par mois, l’Apple store pourrait lui rapporter 1,97 million de livres (2,28 millions d’euros) en un an.
Même avant la commission de 30% prélevée par Apple, cette somme n’est pas une source de revenus importante. Supposons que les revenus du groupe du Guardian soient les mêmes en 2009-2010 qu’en 2008-2009, c’est-à-dire 405,4 millions de livres (467,78 millions d’euros), auxquels on ajouterait les 1,97 million potentiellement rapportés par l’app. Ces téléchargements ne représenteraient que 0,48% des revenus du groupe.
L’iPad pourrait créer un nouveau système avec la mise en place d’un iMedia store où l’on achèterait des abonnements ou certains numéros de ses publications préférées. Dans sa dernière Monday Note, Frédéric Filloux imagine son expérience de consommateur en 2011, où il reçoit son New Yorker tous les lundis sur sa tablette, et achète Vanity Fair au numéro quand ça lui prend.
Pour autant, rien ne dit que cet iMedia store imaginaire serait bénéfique aux magazines et aux journaux.
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