Pourquoi tant de haine?

Crédit: Flickr/CC/Sapphireblue

Derrière des messages d’insultes qui pullulent en ligne, il y a souvent une initiative journalistique. Une couverture d’hebdomadaire, une nouvelle émission de télévision, un  titre d’article, un sujet d’actualité, un journaliste en particulier ou les médias en général… A peu près tout peut déclencher une poussée de réactions ulcérées sur le réseau. Il y a souvent de quoi, c’est vrai. Mais, parfois, la teneur de ces messages ne fait plus la différence entre ce que l’on pourrait se dire intérieurement et ce que l’on formule au vu et au su de tous. Pourquoi? Est-ce là le signe d’un climat de défiance généralisée? La preuve que prolifèrent les “haters“, ces gens qui ne “peuvent pas se réjouir du succès des autres” et préfèrent épingler leurs travers? Sont-ils les nouveaux chiens de garde des journalistes? Explications avec Vincent Glad, journaliste indépendant, contributeur de Slate.fr, ancien chroniqueur pour Le Grand Journal de Canal +, Antonio Grigolini, responsable de la Social TV à France Télévisions, et Michaël Szadkowski, journaliste et social media editor pour lemonde.fr.

Y a-t-il vraiment une escalade d’insultes en ligne contre les médias?

Oui, répond Michaël Szadkowski, du Monde.fr, pour qui “on assiste à une radicalisation des commentaires liés au Monde.fr, directement sur le site, ou dans nos discussions avec nos lecteurs sur les réseaux sociaux”. Non, pour Vincent Glad et Antonio Grigolini, qui estiment que les “haters” sont vieux comme le Web – en témoigne ce mème “hater gonna hate”.

“Ce qu’on appelle aujourd’hui le hater, c’est simplement le râleur d’avant”, continue Vincent Glad. Il y a le blasé, le compulsif, le justicier, celui qui se croit drôle, mais “le hater, c’est aussi celui qui regarde sa télévision, trouve que l’animateur ou l’animatrice est nulle, le dirait simplement à sa femme sur le canapé, et, en son absence, il le tweete”, détaille Vincent Glad. Même si le tweet est emporté, voire brutal, l’intention de nuire n’est pas toujours manifeste. Pourtant, il va provoquer, effet boule de neige oblige, une cascade de réactions courroucées. Et pour cause, la colère se propagerait plus vite et plus largement en ligne que la joie, selon cette étude réalisée sur le réseau social Weibo, qui ressemble à Twittter en version chinoise.

Pourquoi ces messages ont-ils autant de portée aujourd’hui?

Parce que ces messages sont plus visibles qu’autrefois. Aujourd’hui, la “sphère publique a englobé les réseaux (ou s’est étendue aux réseaux), donc cela se voit et s’entend davantage”, m’explique Antonio Grigolini, de France Télévisions. “Quand le Figaro décide de publier une revue de tweets pour le lancement de l’émission Alcaline, sur France 2, on comprend que les réactions dans les réseaux sont scrutées et analysées comme jamais”. Les messages postés en ligne sont devenus un baromètre, ils donnent à voir – en partie et en instantané – la réception qu’ont les utilisateurs de nouvelles émissions et des nouvelles formules des sites d’informations et journaux. Il y a donc un effet loupe, parfois “grotesque”, reprend Antonio Grigolini. Surtout quand, à bien compter, le nombre de tweets sur l’émission est assez réduit.

Pour Vincent Glad, des sites comme le Huffington Post ou Melty jouent un rôle clé dans la “médiatisation de cette colère”. Ils considèrent Twitter comme un “laboratoire des réactions des gens face à une émission, un nouveau clip, une petite phrase et rédigent souvent des articles titrés “Twitter dénonce…” ou “Twitter s’enflamme contre…”, agrégeant ainsi des discussions de canapé pour en faire un mouvement d’opinion. La vraie montée en puissance des haters, elle est là. Dans leur mise en lumière médiatique.”

Les journalistes sont-ils les nouveaux souffre-douleur?

Et si les sermons adressés aux journalistes feraient partie d’une riposte plus globale visant le pouvoir exécutif? L’hypothèse n’est pas aussi tordue qu’elle en a l’air. “L’arrivée de la gauche au pouvoir en 2012 a amplifié les critiques en ligne contre les médias”, estime Michaël Szadkowski, du Monde.fr. “Les commentateurs de droite et d’extrême-droite sont particulièrement virulents, et mettent dans le même panier “médias” et “gouvernement”. Ils critiquent soit l’un, soit l’autre, soit les deux, dès qu’ils en ont l’occasion, dans chaque espace où ils auront une visibilité”, observe-t-il. C’est, en effet, le résultat des consignes données par différents partis, l’UMP, le FN, et aussi le Front de Gauche, à leurs sympathisants: il s’agit d’investir le Web pour répandre idées et messages dans toutes les interstices.

Et ils tapent fort pour se faire entendre, sachant que la blogosphère politique française se compose à 14% de partisans de l’extrême droite, à 18% de sympathisants de la droite républicaine, face à une gauche majoritaire à 46,8% selon une cartographie réalisée par l’agence Linkfluence. Ces commentaires sont “souvent extrêmement violents” contre le pouvoir en place, analyse Michaël Szadkowski, qui en a retranscrit la tonalité dans cet article. “Cela n’encourage pas les autres commentateurs moins engagés à rentrer dans la discussion et à calmer le jeu. Il n’y a souvent personne pour les contredire vraiment. D’où l’impression d’une radicalisation des haters qui ont systématisé leurs attaques. Ils ne sont peut-être pas beaucoup plus nombreux qu’avant (il est impossible d’avoir des chiffres), mais ceux qui sont là sont très actifs.”

Pour Antonio Grigolini, en plus des ressorts classiques de la haine (racisme, démagogie…), “il y a clairement un sentiment anti-élite” qui émane des commentaires les plus violents. “Il suffit de songer à la “dieudonnisation des esprits“, ou encore à l’explosion de Beppe Grillo en Italie. Tout le discours de Beppe Grillo et de ses supporters sur les réseaux est un énorme hymne à la haine contre les élites et les castes, à base d’insultes et de virulence verbale.”

Comment répondre aux critiques quand on est journaliste?

La règle d’or, c’est de rester calme. Même si l’attaque fait mal. Pour digérer les attaques, tous les stratagèmes sont bons: aller faire un tour, respirer un grand coup, en parler à ses collègues – y compris ceux qui ne sont pas toujours d’un grand soutien, ils seront peut-être plus justes – pour dédramatiser…

Deuxième principe, accepter que le “traitement” prenne du temps. Il faut d’abord se demander si la critique émise nécessite une réponse ou non. Si celle-ci est légitime, porte sur le contenu de l’article, et non sur son auteur, alors oui, il vaut mieux répondre et préciser ce qui doit l’être. Si, en revanche, la critique concerne les médias en général, du genre “tous pourris”, “tous gauchos”, “tous fascistes”, elle est “manifestement guidée par des idéaux politiques et est évidemment plus compliquée à prendre en compte”, estime Vincent Glad, qui prône alors de ne pas se jeter dans l’arène.

De même, Michaël Szadkowski s’en tient, lorsqu’il répond au nom du Monde.fr sur Twitter, Facebook ou Google+, “à la règle 14 des Internets qui stipule de ne pas argumenter avec les trolls si leurs critiques ne sont pas constructives et ne sont pas en lien spécifique avec des éléments précis d’un article”. Et de citer son collègue Samuel Laurent, journaliste du Monde.fr qui se qualifie sur Twitter d'”appeau à trolls”, lequel “s’emploie à répondre fermement à toutes les personnes qui l’attaquent – il leur explique par A+B qu’elles ont tort, ou les tourne en ridicule pour prouver l’ineptie de leurs critiques”.

Autres conseils utiles: pour répondre à un détracteur, “demandez lui plus d’informations”, recommande Deanna Zandt, sur le site de Forbes. “Ecrivez-lui par exemple en réponse “d’où vous vient cet avis?”, c’est une question sûre, elle n’offre pas de jugement de valeur sur l’opinion de la personne en question, et elle créé l’espace pour qu’une conversation puisse avoir lieu.”

Il ne faut pas hésiter non plus à bloquer les utilisateurs qui sont trop acharnés et excessifs. “Les réseaux sociaux n’ont pas à être des démocraties où chaque message serait valorisé, quel qu’en soit le prix le payer. Sentez-vous libre d’être le dictateur de votre domaine de conversation”, sourit Deanne Zandt. Inutile, donc, de s’emporter. Mieux vaut marquer le pas et ne surtout pas être dans la même tonalité. Ou, mieux, regarder ces célébrités qui lisent, face caméra, les plus méchants tweets qu’elles aient reçu, face caméra. Salutaire.

Et vous, comment faites-vous pour répondre aux critiques?

Alice Antheaume

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Le journalisme dans House of Cards: fiction ou réalité?

Le personnage de Zoé Barnes (Kate Mara)

Dans la série House of Cards, diffusée sur Netflix aux Etats-Unis, et sur Canal+ en France, il est question de manipulation politique, de relation entre politique et journalisme, de relation avec ses sources, de médias traditionnels, de pure-players, de circuit de la copie, de tweets et d’audience en ligne. Zoé Barnes, une jeune journaliste habituée à couvrir des sujets plutôt locaux et anecdotiques (le mariage d’un pompier, la création d’une aire de jogging dans la ville), se met à sortir des “scoops” fournis clés en main par Franck Underwood, le leader des représentants démocrates. Qu’est-ce qui est vrai et faux sur le journalisme dans la série? Réponses.

Qu’est-ce que le Washington Herald?

C’est le journal pour lequel travaille Zoé Barnes au début de la série. Son organisation a tout de celle des médias traditionnels: bureaux vieillots, lumière blafarde, une rédaction constituée de journalistes très expérimentés, volontiers old school, une piètre estime d’Internet en général et des réseaux sociaux en particulier, un circuit de la copie verrouillé, des difficultés à accepter qu’une histoire puisse être diffusée en ligne plutôt qu’imprimée dans les colonnes du journal, des actionnaires qui dictent aux rédacteurs en chef leur gestion des équipes et des contenus, et une place déclinante dans la vie politique américaine.

Le Washington Herald existe-il en vrai?

Il y a bien eu un journal portant le nom du Washington Herald, aux Etats-Unis, entre 1906 et 1939. Dans House of Cards, le Washington Herald ressemble au Washington Post – racheté cet été par Jeff Bezos –, même si celui-ci a fait une large place au numérique et n’a pas une vision d’Internet aussi caricaturale que celle que l’on voit dans la série. Le Herald est en fait le symbole des grands quotidiens américains traditionnels. Les scènes ont d’ailleurs été tournées dans les bureaux du Baltimore Sun, à Baltimore, et non à Washington, déjà le cadre fictionnel de la cinquième saison de la série The Wire. Un lieu de tournage “très déprimant”, a lâché l’actrice qui joue la correspondante à la Maison Blanche du Washington Herald, constatant que la moitié des bureaux de cette rédaction ont été fermés. Un écho à la grave crise que traverse la presse américaine: près de 20.000 emplois de journalistes ont disparu depuis 2008, en attendant une disparition annoncée des versions papier.

Janine Sorsky, la correspondante à la Maison Blanche (Constance Zimmer)

Qu’est-ce que Slugline?

C’est le pure-player dans lequel Zoé Barnes va travailler après sa démission du Washington Herald. «Slug» désigne, en anglais, le label que l’on accole à un contenu journalistique pour le catégoriser, par exemple “JAPON-ECONOMIE”. C’est aussi le terme qui désigne, sur les tournages, le panneau sur lequel est indiqué “intérieur” ou “extérieur”, le nom de l’endroit où est filmée la scène, et si c’est la nuit ou le jour, rappelle Beau Willimon, le producteur d’House of Cards, interrogé par le site Poynter.

Quel pure-player se cache derrière Slugline?

Dans la vraie vie, Slugline n’existe pas. S’il naissait aujourd’hui, il serait le prochain Politico, un média né en 2007, dont la rédaction est installée à côté de Washington, et qui fait de l’ombre au Washington Post. “D’ici six mois, Slugline sera ce que Politico était il y a un an et demi”, explique Zoé Barnes dans la série. “Tout le monde à Politico a les yeux rivés sur Slugline parce qu’ils publient les informations avant eux”. Slugline serait en fait un avatar de Twitter, pour le côté “breaking news” et pour les locaux, et de Buzzfeed, pour la stratégie éditoriale. Chez Twitter, à San Francisco, les bureaux à cloisons individuels ne sont pas de mise, chacun se promène avec son ordinateur et travaille où il le souhaite, et, de même, à la rédaction de Slugline, les rédacteurs se vautrent avec leurs ordinateurs sur une allée de poufs. Autre point commun entre Slugline et Buzzfeed: recruter des vedettes de la profession. Slugline recrute ainsi d’abord Zoé Barnes devenue une star grâce à ses scoops clés en main, puis la correspondante de la Maison Blanche historique du Herald Janine Skorsky, un peu comme Buzzfeed a recruté entre autres Ben Smith, venu de Politico, pour monter sa section politique et la rédaction en chef.

La rédaction de Slugline

Etre correspondant à la Maison Blanche, ce n’est plus le Graal journalistique?

La réponse dépend du profil du journaliste. Zoé Barnes se voit proposer le poste de correspondante à la Maison Blanche, mais elle le refuse. Pour elle, “la Maison Blanche, c’est là où l’information meurt. Tout est mis en conserve, avec tous ces communiqués de presse parfaitement préparés (…) Ce poste était prestigieux quand j’étais au lycée, maintenant, c’est un mouroir.“ Pas tout à fait faux, concèdent David Carr, du New York Times, et Jake Sherman, de Politico, qui rappellent que ce poste consiste à couvrir toute l’actualité du président de la République américain, de le suivre lors de ses voyages, d’assister aux conférences de presse et autres briefings à la Maison Blanche. Les quelques scoops qui surviennent sont donnés, reprennent-ils, à des journalistes choisis en conséquence.

Est-il vrai qu’il n’y a pas de circuit de la copie dans les pure-players?

A priori, il y a un circuit de la copie dans tout média digne de ce nom. En ligne, le processus est parfois – mais pas toujours – plus léger, grâce à des systèmes de publication moins contraignants que ceux prévalant dans les rédactions papier. A plusieurs reprises, on entend Zoé Barnes se plaindre au Washington Herald de la lourdeur du processus: “dans combien de temps peut-on le publier sur le site?”, demande-t-elle, alors que ses rédacteurs en chef font relire son papier par le service juridique avant publication. A Slugline, c’est presque caricatural tant le circuit de la copie semble inexistant: “chacun est un agent libre” et “publie ce qu’il veut, d’où qu’il soit”, “la plupart écriv(ant) depuis leurs smartphones”. Une ambiance qui rappelle les journées des contributeurs de Buzzfeed, et celles de Matt Stopera notamment qui, avant 9h du matin, est en short dans son appartement et a déjà lu tous les Tumblr qui comptent et parcouru tous ses flux RSS.

Quand on est journaliste, peut-on s’inviter à 22h30 chez un homme politique?

Non, sauf si on y a été invité. C’est pourtant ce que fait Zoé Barnes en toquant à la porte de Franck Underwood. “La seule raison qui pourrait me pousser à m’incruster de la sorte chez le représentant des démocrates au Parlement”, commente Jake Sherman, qui couvre le Congrès américain pour Politico, “c’est si jamais j’avais la preuve qu’il avait tué quelqu’un”.

La relation entre Zoé Barnes et Franck Underwood est-elle crédible?

La proposition que fait Zoé Barnes à Franck Underwood tient en une phrase, trois propositions: “je protège votre anonymat, j’imprime ce que vous me dites, et je ne pose jamais de questions”. Tous les rédacteurs en chef à qui j’ai demandé s’ils trouvaient cela vraisemblable m’ont dit: “je ne peux pas croire qu’un journaliste propose de ne pas poser de questions”. En revanche, oui, c’est plausible qu’un journaliste ait une aventure avec un politique, une pratique devenue une “tradition”, selon cet article de Télérama sur les dilemmes des journalistes politiques qui répertorie les cas en France: Valérie Trierweiler/François Hollande; Béatrice Schönberg/Jean-Louis Borloo; Michel Sapin/Valérie de Senneville, etc.

Le problème de ce marché – outre qu’il est jugé “dégradant” par la grande majorité des femmes journalistes – c’est que, dans l’histoire, le Washington Herald est manipulé et fait le jeu d’une source unique. Voilà pourquoi, à Bloomberg et dans d’autres organisations, une personne au moins dans la rédaction aurait dû connaître l’identité de cette source pour éviter de devenir l’outil d’un jeu politique.

Alice Antheaume

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Le direct de l’Assemblée nationale est une drogue médiatique dure

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Depuis le 29 janvier 2013, date d’ouverture des discussions sur le projet de loi concernant le mariage pour tous, le direct diffusé en vidéo sur le site de l’Assemblée nationale fait carton plein, week-end compris. Dimanche 3 février, il y a eu 29.021 connexions de plus de 30 secondes, pour une durée moyenne de 34 minutes, selon les chiffres de l’Assemblée nationale. C’est beaucoup, comparé à un jour de débat ordinaire, comme le jeudi 17 janvier, où le direct n’a alors recueilli que 1.417 connexions – ce jour-là était abrogée la loi sur la lutte contre l’absentéisme scolaire.

L’audience est là, mais le service est archaïque en ligne – un simple flux sans habillage ni intégration sur les réseaux sociaux. En outre, les saturations du streaming se multiplient, comme l’a relevé en séance le député UMP Patrick Hetzel, provoquant les soupirs de Claude Bartolone, le président socialiste de l’Assemblée nationale: “Monsieur Hetzel, sans vouloir être désagréable avec la majorité précédente, je fais avec le site que j’ai trouvé! Mais je vous rassure: j’ai demandé à l’administration et aux questeurs de me faire des propositions pour moderniser le site et le rendre plus accessible.” Depuis, un flux de secours a été mis en place pour suppléer le premier.


Comment expliquer cet engouement pour un service mis en place dès 2007 – le direct était disponible en 2008 au moment d’Hadopi et avait facilité la vie des journalistes qui couvraient le sujet alors qu’il n’y avait à l’époque ni prise électrique ni Wifi dans l’hémicycle? Il y a bien sûr l’intérêt suscité par le sujet, le mariage pour tous, mais s’ajoute à cela un faisceau d’autres raisons. Les voici.

  • comme au théâtre, il y a des personnages principaux, des seconds rôles et des citations qui restent

Parmi les protagonistes figurent Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale, chargé de distribuer la parole entre les camps, lequel ne rate pas une occasion de faire un bon mot et de s’amuser des facéties des députés ; Christiane Taubira, ministre de la Justice, la “gardienne” de l’esprit de la loi, sacrée “icône” par France TV Info, qui oscille entre crises de fou rire et élans poétiques ; et Christian Jacob, président du groupe UMP à l’Assemblée, avide de petites phrases bien plantées (il a qualifié le discours de Christiane Taubira de “Badinter aux petits pieds”). Dans les seconds rôles, on trouve des députés moins connus mais qui prennent soudain la lumière. Par exemple Hervé Mariton et Philippe Gosselin, députés UMP, qui relèvent sans relâche le “manque de préparation” du texte et exigent l’avis du Conseil d’Etat et dont on finit par savoir que le premier est daltonien et le second s’intéresse au numérique (il est membre de la CNIL, la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés). Côté PS, le second rôle du moment est incarné par Thomas Thévenoud, pris en photo en train de jouer au Scrabble avec son confrère Jérôme Guedj, par tablettes interposées.

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  • comme dans les dîners de famille, il y a ceux qui monologuent et ceux qui se font chahuter

Avant de commencer les agapes, Christiane Taubira, érigée en mère des futurs mariés, a fait un discours inaugural de 40 minutes sans note. Christian Jacob se plaît à lui répondre depuis son banc, sans que l’on sache toujours sur le direct ce qu’il dit – il n’a pas de micro à ce moment-là, ce qui lui donne l’air de l’oncle bourru coincé au bout de la table. Hervé Mariton se fait, lui, chambrer sur la couleur de ses pulls, comme un enfant qui aurait mal assorti ses chaussettes. Et, puisqu’aux dîners de famille, mieux vaut éviter de parler de politique, Marc Le Fur, député UMP, fait un pas de côté pour s’émouvoir de la suppression du rôle de la belle-mère tandis que Jean-Pierre Door, UMP aussi, s’inquiète du sexe du Père Noël en clamant que “dire que l’institution du mariage peut concerner deux personnes du même sexe, c’est comme dire soudain que le Père Noël est une femme”.

  • comme une radio, on peut se brancher au direct toute la journée sans l’image

L’action n’étant pas vraiment haletante sur le streaming, tout se joue sur le son et l’intensité des dialogues, l’idéal pour le spectateur étant d’avoir passé assez d’heures à écouter pour reconnaître le député qui parle à sa seule voix. C’est parfait pour “consommer” lorsque l’on est au bureau, à travailler sur un ordinateur. Une fenêtre de son navigateur ouverte sur le direct de l’Assemblée nationale et une autre sur le travail en cours, on peut rédiger une note – ou écrire cet article – sans regarder l’image. Un format adapté aux nuits d’insomnie – les députés se sont quitté dans la nuit de mercredi à jeudi peu avant 4h du matin.

  • comme à l’école, il y a des règles et des petits malins qui jouent avec

Le rappel au règlement est un droit des députés et a priorité sur la discussion en cours. “La parole est accordée à tout député qui la demande à cet effet soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention”, stipule le règlement de l’Assemblée nationale. Et ce, pour une durée maximum de 2 minutes. Un rappel au règlement peut concerner des horaires jugés tardifs, des insultes proférées à l’encontre de l’un ou l’autre député, ou le besoin de discuter par groupe parlementaire. Souvent, et c’est devenu la spécialité d’Hervé Mariton, le rappel au règlement n’en est pas un, il consiste à couper la discussion pour faire une remarque hors sujet. Dans ce cas, le président de séance peut reprendre la parole. Surtout quand, comme lundi 4 février, on dénombre pas moins de 32 rappels au règlement pendant la discussion. Au final, c’est comme à l’école, il y a toujours des rigolos qui contournent les règles, et il est assez divertissant de découvrir quel curieux motif invoque parfois l’opposition en guise de rappel au règlement, où il peut être question de “champignons vénéneux” ou de “fréquentation prolongée du très subtil Georges Frêche“.

  • comme sur Internet, affluent les points Godwin

Sur Internet, la règle est simple: plus la discussion dure, plus la probabilité est grande qu’un internaute finisse par faire une comparaison impliquant le nazisme ou Hitler. C’est ce que l’on appelle le point Godwin, issu de la loi Godwin, énoncée en 1990 par l’avocat américain Mike Godwin. A l’Assemblée nationale, alors que les heures de débat parlementaire s’alignent au compteur, les points Godwin pleuvent aussi, avec des mentions de “triangle noir” ou de “triangle rose” pour parler des homosexuels, références aux symboles utilisés par les nazis dans les camps de concentration. Mercredi 6 février, Hervé Mariton a aussi évoqué la date du 6 février 1934, manifestation des ligues fascistes, “qui étaient un danger pour notre assemblée, pour la démocratie, pour la République”. Un appel, a-t-il dit, à “chercher, lorsque cela se peut, dans la vie de la démocratie des formes de rassemblement et de consensus”.

  • comme à la télévision, l’expérience du second écran apporte un supplément d’âme

322 députés sur 577 ont un compte Twitter, d’après Le Lab d’Europe 1. Plus d’un député sur deux est donc en mesure de publier sur le réseau des commentaires sur le débat auquel il participe dans l’hémicycle, racontant de l’intérieur ce que le public ne voit guère, provoquant les protestations de leurs collègues et même un rappel au règlement à cause du tweet suivant, écrit par le député socialiste Jérôme Guedj.


Marc Le Fur, député UMP, a même procédé à un photomontage d’une scène en coulisses avant de l’envoyer sur Twitter en se trompant de nom (il s’agissait de Thomas Thévenoud et non de Guillaume Bachelay, contrairement à ce qui mentionné par erreur sur la légende).

Bref, l’Assemblée nationale fait de la télévision sociale (Social TV en VO), cet usage qui consiste à voir un programme sur un premier écran et à utiliser un deuxième écran (ordinateur, tablette, mobile) pour réagir à ce même programme en allant le commenter sur les réseaux sociaux ou en cherchant, sur le Web, des informations complémentaires. Malgré la demande de Philippe Gosselin de stopper les messages sur le réseau qui “polluent” le débat, tous les tweets restent permis, facilités par l’installation du Wifi à l’Assemblée nationale à l’été 2012.

“Vous savez que vous êtes désormais très observés, par des photographes et sur les réseaux sociaux”, a averti Claude Bartelone mercredi 6 février. En effet, le hashtag #directAN a déjà été mentionné plus de 34.000 fois depuis le début des débats. Quant aux spectateurs non parlementaires, ils ne sont pas en reste. Ils ont créé deux Tumblr qui valent le détour et tournent en dérision les stratégies et mimiques des parlementaires, comme “Ciel mon égalité” et “Quand un député UMP“… MISE A JOUR 14h32: Ce nouveau Tumblr, lancé par le dénommé Monsieur Kaplan, agrège des GIFS animés sur les principaux personnages des discussions.

Crédit: quandundeputeump.tumblr.com


Alice Antheaume

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La supra rédaction décortique le tweet d’Eric Besson… et puis s’en va

Il a suffit d’un tweet d’Eric Besson pour que la «supra rédaction» se mette en ordre de bataille. Cette «supra rédaction», vue à l’œuvre pour la première fois en novembre 2009 lors de la polémique autour de l’exacte date à laquelle la photo de Nicolas Sarkozy donnant des coups de pioche sur le mur de Berlin a été prise, c’est ce corps de journalistes et experts du Web qui, au delà du titre qui les emploie – ou du site pour lequel ils produisent des contenus –, travaillent parfois de concert sur le même sujet. Et communiquent les uns avec les autres. Comme s’ils étaient dans la même rédaction.

Le sujet du jour? Un drôle de message publié sur Twitter ce mercredi 19 octobre, avant 11h du matin, par le ministre de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie numérique: «Quand je rentre je me couche. Trop épuisé. Avec toi?». Un message rédigé depuis son iPhone et… posté par erreur.
Aussitôt, l’histoire devient le sujet le plus discuté sur Twitter France dans la matinée, d’après le classement des «trending topics» (#DMfail est le mot-clé qui signifie erreur de direct message).

Alors que les journalistes en ligne s’interrogent sur la sortie d’Eric Besson, le ministre efface le message incriminé et présente ses excuses. Il est plus de 11h.

Il n’en fallait pas plus pour qu’une mini-enquête commence. Que s’est-il passé? Le ministre s’est-il mélangé les pinceaux? Est-ce un direct message – un «DM», dans le jargon, autrement dit un message privé – qui a été transformé en «tweet» – un message public –? De quelle «liste des brouillons» parle-t-il? A qui était destiné, à l’origine, ce message?

Et les réponses aux questions tombent, sur Twitter toujours, par des journalistes et spécialistes qui donnent des bribes d’éléments sur cette petite histoire. A ceux qui se demandent combien de personnes ont vu le message d’Eric Besson, Maître Eolas répond, ce mercredi matin: 13.000 abonnés  (plus de 14.000 au moment où l’on écrit cet article). Un autre journaliste publie la capture d’écran du tweet depuis supprimé – car sur le Web, rien ne s’efface, l’oubli n’existe pas.

Autre interrogation: Est-il possible d’avoir des brouillons sur Twitter? Sur le site Web Twitter.com, non, mais sur l’application Twitter pour iPhone, oui. La preuve, Cécile Dehesdin, de Slate.fr, l’a testée, et publie une capture d’écran de ses propres brouillons de messages.

Or c’est bien de cette application (Twitter for iPhone) dont Eric Besson s’est servi pour tweeter. Et cette application a en outre la particularité de rendre facile la confusion entre «message» (privé) et «tweet» (public). Tout s’explique? Pas encore tout à fait.

Reste la question: à qui était destiné le message d’Eric Besson? Tandis que Voici se lance en posant cette question sur Twitter à l’intéressé («A qui parlez-vous M. le ministre?»), celui-ci ne répond pas. D’autres journalistes tâchent de procéder par élimination en pointant vers les comptes que suit Eric Besson sur Twitter, à qui, donc il aurait pu envoyer un message privé – seuls ceux qui sont abonnés à son flux Twitter peuvent recevoir des «direct messages» de lui.

Les sites d’informations publient l’histoire. Même l’AFP en tire une dépêche, ce mercredi à 12h33.

Mais le plus rapide, c’est encore Eric Besson lui-même qui, juste après son dérapage, a enchaîné, toujours sur Twitter, en:

1. Rappelant un précédent de Pascal Terrasse, député PS, qui avait insulté sur Twitter la rédactrice en chef de L’Hebdo de l’Ardèche, confondant sans doute lui aussi «direct message» et «tweet»

2. Vaquant à des occupations plus nobles («Bon allez je vous laisse à vos délires. J’ai une audition à l’Assemblée Nationale à préparer…»)

3. Faisant de l’humour («Oserai-je vous dire? Le débat que j’organise demain portera sur “démocratie 2.0, du virtuel au politique”. Un exemple pour l’illustrer?»)

Désamorçage efficace? Pas en tant que tel, mais l’annonce de la venue du premier bébé de l’Elysée, le mercredi après-midi, est une actualité qui en chasse une autre… Et les rédactions, supra ou pas, ont de quoi s’affairer ailleurs.

Alice Antheaume

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Réseaux sociaux et journalistes: l’école des chartes

Un journaliste a-t-il le droit de publier sur Twitter une photo de sa rédaction presque déserte, en visant ses collègues qui ne sont pas au travail dès potron-minet? Peu de rédactions françaises l’interdisent. Ou disons plutôt: peu de rédactions estiment qu’elles ont besoin de l’interdire tant cela leur semble évident qu’on “ne balance pas sur les horaires d’arrivée des journalistes de sa propre maison devant la terre entière”. Certes, Twitter n’est pas la terre entière, mais c’est quand même plus de 3 millions de personnes, selon une récente étude de Semiocast.

Lorsque le cas se présente, les directions se révèlent perplexes. A la rédaction du Nouvel Observateur, ce cas est survenu. “Je ne vois pas en quoi tweeter la photo du plateau, donnant l’impression que la rédaction est vide, alors qu’il y avait des journalistes qui travaillaient, aurait pu être drôle. Même au troisième degré”, me confie Aurélien Viers, rédacteur en chef du NouvelObs.com. “Cela peut être mal interprété, et a été mal interprété”. De fait, un autre journaliste du Nouvel Observateur a riposté aussitôt, également sur Twitter, en saluant la “pointeuse”. Ambiance.

“Je ne pensais pas que cela arriverait, nous n’avons jamais eu aucun souci”, reprend Aurélien Viers. “Aucun journaliste ne tweete sur son canard ou sa direction en les critiquant, c’est enfoncer des portes ouvertes, mais il fallait que cela soit précisé”. Il a alors envoyé un email à son équipe, rappelant quelques règles simples et de “bon sens” sur l’utilisation de Twitter par les journalistes, dont il s’explique dans cette tribune publiée sur WIP.

Or ce qui est le bon sens pour les uns ne l’est pas toujours pour les autres. Et c’est toute l’ambiguïté de l’appréciation de ce qui est “évident”. Alors faut-il l’expliciter via une charte, ou un “règlement intérieur”, comme l’appelle Eric Mettout, rédacteur en chef de lexpress.fr? “Comme si, parce que nous nous exprimons sur Twitter ou Facebook en notre nom, nous y oubliions notre carte de presse et les comportements qui y sont attachés et dont nous sommes abreuvés depuis l’école”, regrette-t-il. Faut-il aller jusqu’à demander aux journalistes de ne pas dénigrer leur direction en public? Lorsque Anne Lauvergeon a été annoncée à la présidence du conseil de surveillance de Libération, les journalistes de ce titre ne se sont pas privés de marquer leur désapprobation sur Twitter.

Journalisme et réseaux sociaux en ménage

Si les rédactions anglo-saxonnes ont la culture de la charte et documentent les droits et devoirs de leurs journalistes, les rédactions françaises n’ont pas ce réflexe, craignant sans doute d’entraver la liberté de ton de ses journalistes ou de devoir, pire, réactualiser les règles en permanence en fonction des cas rencontrés. Surtout, elles ne veulent pas freiner les enthousiasmes de ceux qui tweetent et participent ainsi à la visibilité de leur titre en dehors des pages et colonnes traditionnelles.

La véritable raison d’une charte sur les réseaux sociaux, c’est d’assurer le prolongement des devoirs journalistes (pas de diffamation, pas d’atteinte à la vie privée, etc.) prévalant sur les publications traditionnelles (sites Web, journaux) aux publications annexes (blogs, Twitter, Facebook, lorsque les comptes sont ouverts). Car un journaliste l’est 24h/24, quel que soit l’endroit d’où il parle.

France Télévisions a, de son côté, écrit une charte des antennes. “La charte de France Télévisions est plus subtile que ce que l’on a bien voulu en dire, détaille Bruno Patino, directeur général délégué au numérique, également directeur de l’Ecole de journalisme de Sciences Po. Twitter n’est pas au centre de la charte. Celle-ci prend seulement en compte un fait avéré: il n’est pas possible d’avoir sur les réseaux sociaux deux identités, une privée et une professionnelle, qui soient imperméables l’une à l’autre. En clair, il ne faut pas dire des choses sur tweeter que l’on n’assumerait pas à l’antenne. Notre crédo, c’est “think before your tweet”, réfléchissez avant de tweeter.”

Le Nouvel Observateur a aussi une charte, créée en 2004, et révisée en 2010, qui concerne l’ensemble des devoirs des journalistes, et non l’utilisation spécifique des réseaux sociaux. Mais Aurélien Viers laisse la porte ouverte: “il faut l’envisager, d’autant que les 130 journalistes du titre vont davantage utiliser leurs comptes Twitter et Facebook” dans les mois à venir.

En ligne ou hors ligne, même combat

Quant à l’AFP, elle est en train d’en élaborer une, dont la première partie concerne la vérification du matériel trouvé sur les réseaux sociaux, la deuxième partie devant s’attaquer à ce que les agenciers peuvent publier, ou non, sur Twitter et Facebook. En préambule, m’explique François Bougon, journaliste à l’AFP, “on va rappeler que les journalistes sont encouragés à être présents sur les réseaux sociaux (veille, recherche d’infos, etc.) et que leur présence n’est pas différente de celle dans le monde réel et elle doit continuer à être guidée par les mêmes droits et devoirs tels qu’ils sont consignés dans des textes fondateurs comme par exemple la déclaration des droits et devoirs des journalistes, adoptée à Munich en 1971”.

De même, le SNJ, le Syndicat National des Journalistes, a également mis à jour, le 5 juillet 2011, son code de conduite et s’attaque à l’instantanéité: “la notion d’urgence dans la diffusion d’une information ou d’exclusivité ne doit pas l’emporter sur le sérieux de l’enquête et la vérification des sources.” Façon de calmer la course au premier tweet.

Enfin, à l’Ecole de journalisme de Sciences Po, où je travaille, nous avons écrit une charte, en vigueur depuis la rentrée scolaire 2010, pour que les étudiants suivent les mêmes règles journalistiques, qu’ils produisent des contenus pour un site Web d’infos, sur une page Facebook, sur un compte Twitter, dans un journal télévisé ou un flash radio.

Les règles des rédactions anglo-saxonnes

Pour finir sur ce sujet intarissable, voici quelques uns des mots d’ordre observés dans différentes rédactions à l’étranger.

  • Ne soyez pas stupide (Wall Street Journal)

Le message est simple: ne soyez pas stupide”, demande Alan Murray, l’éditeur du Wall Street Journal. Si vous couvrez la politique, vous n’allez pas tweeter que vous venez de voter pour John McCain. Si vous êtes Bob Woodward et que vous allez rencontrer Gorge Profonde dans un garage, vous n’allez pas le fanfaronner sur Twitter. Le problème, dans les grosses organisations comme le Wall Street Journal, c’est qu’il y a inévitablement des gens qui font des choses stupides, et d’autres gens du titre qui estiment que, s’il y a des gens qui font des choses stupides, il faut tenter de codifier la stupidité.”

  • Si vous ne voulez pas qu’on voit quelque chose de vous en ligne, ne le mettez pas (Washington Post)

“Les journalistes du Washington Post doivent savoir que, quel que soit le contenu qui leur est associé sur les réseaux sociaux, celui-ci est considéré comme l’équivalent de ce qui peut apparaître à côté de leur signature, sur le site Web ou dans le journal.”

  • Conduisez-vous en ligne comme vous le feriez en public (NPR)

Dans ses règles à tenir sur les réseaux sociaux, la radio américaine NPR énumère plusieurs points, donc celui-ci: “tout ce que vous écrivez ou recevez sur un réseau social est public. Toute personne ayant accès au Web peut accéder à votre activité sur les médias sociaux. Et même si vous êtes attentif à essayer de séparer professionnel et personnel, en ligne, les deux s’imbriquent”. Et plus loin: “vous devez vous conduire en ligne en pensant à ce que votre comportement et vos commentaires (…). Autrement dit, conduisez vous en ligne comme vous le feriez en public.”

  • Ne mettez pas en péril le modèle économique de votre média (Reuters)

A la question “quand puis-je tweeter?”, répertoriée dans sa charte, Reuters répond: interdit aux journalistes de l’agence de poster un scoop sur Twitter. Toute information exclusive doit d’abord être publiée dans le fil de dépêches. Logique, puisque Reuters a un modèle économique qui repose notamment sur l’achat d’informations par des clients, lesquels verraient d’un mauvais oeil le scoop publié sur une plate-forme accessible à tous, sans abonnement. En revanche, il est possible de retweeter un scoop quand c’est celui de quelqu’un d’autre, reprend Reuters, dans son manuel.

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Alice Antheaume

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Il était une fois les journalistes sur Twitter…

W.I.P. demande à des invités de donner leur point de vue. Ici, Aurélien Viers, rédacteur en chef au NouvelObs.com, explique pourquoi il a envoyé, à ses équipes, un email sur l’utilisation journalistique de Twitter.

Twitter et les journalistes? Une belle histoire. A croire que les fondateurs ont forgé un service de micro-blogging sur mesure pour la profession.

En mode passif, le réseau social sert d’outil de veille, d’alertes, et comme agrégateur de flux d’informations. On suit en temps réel des médias, des hommes politiques, des sites d’infos, des blogs, etc.

En mode actif, ce couteau suisse peut aussi être utilisé comme moyen de diffusion par le reporter, qui délivre des infos, souvent depuis son smartphone, par tranche de 140 caractères.

Enfin, le réseau permet de rechercher des contacts (interlocuteurs, spécialistes, etc.), d’entrer en relation avec eux – comme avec le reste du monde – et d’établir un dialogue en direct entre le journaliste et le public.

En bref, Twitter = veille + information + communication + discussion.

Là où les rédactions permettaient aux journalistes de s’exprimer dans un format défini et limité (une page dans le journal, un reportage dans une émission de radio), Twitter permet aux journalistes de s’exprimer avant, pendant, après le bouclage. Jour et nuit.

Comme ils le veulent? Oui. Les journalistes se sont appropriés le réseau. Chacun à leur manière. Certains ne diffusent que des infos sur leur secteur d’’activité, par exemple, et partagent leur veille. D’autres recherchent des témoins. D’autres encore débattent sans fin de l’actu. Beaucoup en rigolent. Et puis, certains font tout cela à la fois: veille, information, discussion, débat, humour.

Tout dépend de la couleur que vous annoncez dans votre biographie, ces quelques lignes que l’on écrit à côté de la photo de son profil. Et si c’était le contrat de lecture que vous passez avec ceux qui vous suivent – vos followers?

On peut être journaliste Web et ne pas s’empêcher de plaisanter de temps en temps. Ce que fait très bien Alexandre Hervaud, qui se présente sur son profil comme “journaliste en quasi-vacances. CECI N’EST PAS UN COMPTE (trop) SERIEUX”.

Moins abruptement, certains glissent aussi à leur audience qu’ils manient le second degré. Nicolas Filio, par exemple, rédacteur en chef adjoint de Citizenside, affiche son “amour pour la langue française” quand la moitié de ses messages sont écrits en anglais.

L’ironie, le second degré, l’humour transpirent dans les articles à la française. Alors, les bâillonner sur Twitter?

Un journaliste ne peut oublier qu’un tweet, même écrit en une seconde, ne peut colporter des éléments non vérifiés. D’autant que, hormis ceux qui perdent toute retenue, le journaliste sait que cet espace, Twitter, est public, voire grand public, avec plus de 3 millions d’inscrits en France.

Au sein de son média, dans son service, lors des conférences de rédaction, le journaliste discute avec ses collègues. Ceux-ci s’interpellent et s’opposent parfois. C’est plus que normal. C’est nécessaire. Mais s’en prendre à son propre média, ou critiquer sa direction? Cela peut bien sûr arriver, mais ces séquences n’ont pas vocation à se retrouver déballées à l’extérieur de la rédaction. Il en va de même sur Twitter.

C’est pour rappeler ces quelques règles élémentaires et de bon sens (voir à ce sujet le très intéressant billet d’Eric Mettout, le rédacteur en chef de lexpress.fr) que j’ai adressé un email au service Web du Nouvel Observateur. Un message repris in extenso (sans m’avoir contacté) par Télérama.fr, puis évoqué dans un article du Monde.

Avec ou sans charte d’utilisation des réseaux sociaux (le Nouvel Observateur a une charte de déontologie, mais pas de charte relative à ce que les journalistes ont le droit ou pas d’écrire sur Twitter ou Facebook, ndlr), les journalistes laissent transparaître leur personnalité sur les réseaux sociaux – continuons ainsi.

Les surréalistes ont beaucoup cité le vers d’Arthur Rimbaud – il faut absolument être moderne. Sur Twitter, nouvel espace d’expression, où tout reste à expérimenter, journalistes, restez vous-mêmes. Il faut absolument être non terne.

Aurélien Viers

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Les médias à l’école DSK

Crédit: REUTERS/Allison Joyce

Il y a aura, dans les médias, un avant et un après Dominique Strauss-Kahn, accusé de «crime sexuel», de «tentative de viol» et de «séquestration» contre une femme de chambre de l’hôtel Sofitel à New York. Envergure planétaire, pics d’audience inégalés, questions juridiques inédites, et frontières du genre repoussées. Cet événement pousse les rédactions françaises à redéfinir les limites de leur exercice. Retour sur les éléments médiatiques clés nés par et autour de ce scandale.

  • Premier scoop français sur une affaire «internationale»

Ce n’est pas une première dans l’histoire médiatique de Twitter, dont les premiers «breaking news» sont apparus aux Etats-Unis dès 2007, lors de la fusillade à l’université Virginia Tech, en Floride (1), mais pour la France, cela devrait rester dans les annales. En effet, c’est sur le réseau aux messages de 140 signes qu’apparaît la première mention de la future affaire DSK.

Ainsi, le samedi 14 mai à 22h59, heure de New York, un étudiant français, Jonathan Pinet, poste le tweet suivant:

Il est le premier à annoncer ce qui va être devenir un scoop, bien avant les agences de presse et autres rédactions. «Ce n’est pas mon tweet qui a déclenché l’emballement de Twitter autour de cette information, explique-t-il après coup sur son blog, mais bien l’article du New York Post à 0h33», toujours heure new-yorkaise. Un article qui n’est plus dans les archives.

  • Premiers signes de dépendance à Twitter

Lundi 16 mai 2011: l’ex-patron du FMI passe devant la juge américaine Melissa Jackson, qui lui refuse la liberté conditionnelle dans l’immédiat – elle lui sera accordée à l’audience du 20 mai, après quatre nuits de prison. Lors de ces audiences préliminaires, les rédactions françaises – télé, radio, Web – utilisent Twitter pour réaliser leur couverture en direct, en se servant des tweets envoyés par les journalistes – Français et étrangers – présents dans la salle d’audience.

«L’affaire DSK propulse Twitter au premier plan», annonce Le Figaro. «Twitter et ses “gazouillis” s’imposent dans les salles de rédaction», titre l’AFP.

Mais comment faire autrement? Comment relayer, en temps réel, ce huis clos partiel tel que celui du tribunal pénal de Manhattan, où seuls quelques journalistes peuvent pénétrer? Ceux-ci n’ont le droit ni de téléphoner ni de filmer pendant l’audience, mais peuvent envoyer SMS ou messages sur les réseaux sociaux. Depuis Paris, ceux qui animent des émissions, radio ou télé, en direct, ou des «lives» sur les sites d’infos, suivent donc chaque tweet, même lorsque ce tweet est écrit par un confrère d’une rédaction concurrente, abolissant ainsi des frontières longtemps en vigueur. «Heureusement qu’on a Twitter», confie cette journaliste d’iTélé, au moment de l’audience du 20 mai.

  • Première interdiction de tweeter

Quatre jours après l’arrestation de DSK, on apprend que la chaîne Canal+ interdit à ses journalistes de tweeter. Première fois, il me semble, qu’un média français prend une position «officielle» à propos de ce que ses journalistes publient ou pas sur Twitter. Conséquence: Laurence Haïm, correspondante à la Maison Blanche pour la chaîne cryptée, présente aux audiences de DSK au tribunal pénal de Manhattan, «réserve “ses” informations à (sa) rédaction» plutôt qu’au réseau social, explique Rodolphe Belmer, le patron de Canal+, pour qui «les journalistes professionnels doivent leurs infos à leur public» et «les grands médias ont tout intérêt à assurer les règles de contrôle de l’information (sans) (…) reprendre à son compte des tweets sensationnalistes quand ils ne sont pas erronés».

Laurence Haïm ne raconte donc pas en live, sur Twitter, comme son confrère Remi Sulmont de RTL, ce qu’elle entend et voit dans la salle d’audience, mais elle l’envoie par SMS aux journalistes d’iTélé (même groupe que Canal+) qui sont, au même moment à Paris, en direct en plateau. Et réalise ensuite des duplex, par exemple pour le Grand Journal de Michel Denisot.

Aux Etats-Unis et en Angleterre, déterminer via une charte rédactionnelle quel journaliste tweete et sur quel sujet est très répandu. En France, ces chartes existent mais elles évoquent avant tout la déontologie, les droits et les devoirs du journaliste, sans s’attaquer de façon frontale aux questions soulevées par l’utilisation journalistique de Twitter – sauf l’AFP qui s’est dotée en 2011 d’une charte ad hoc, focalisée pour l’instant sur la vérification des informations repérées sur les réseaux sociaux.

  • Décalage télévisuel

Dans le flux de messages postés sur Twitter et retweetés des dizaines de fois, il y a des infos et des rumeurs, du vrai et du faux. Les contraintes du direct imposent aux journalistes de les trier en quasi temps réel, afin de les commenter.

Or, lors des premières audiences de DSK au tribunal, les journalistes français ont peiné à suivre le fil Twitter tout en en parlant à l’antenne, laissant souvent passer de longues minutes entre l’apparition d’un tweet, visible par n’importe quel internaute, et son évocation en plateau. A l’heure où commenter sur Twitter ce que l’on voit à la télévision devient tendance, ce décalage peut-il être assumé? D’un côté, il peut être rassurant, si l’on estime que cet écart temporel permet à l’information vue sur Twitter d’être vérifiée avant d’être annoncée à la télévision. D’un autre, il met les journalistes dans une situation de réceptacle de l’information, en même temps qu’un internaute lambda. Quel est l’apport journalistique dans ce cas?

De fait, il y a un deuxième problème, relevé par Benjamin Ferran dans son excellent article sur le sujet: l’interprétation, sur les télévisions françaises, parfois hasardeuse de tweets qui n’ont pas toujours vocation à être relayés. «Certains “tweets” rapportés n’avaient plus grand-chose à voir avec de l’information, écrit-il. “Le juge est en train de réfléchir, semble-t-il, si j’en crois ce que je lis sur Twitter”, a lâché un journaliste de BFM TV. “Il n’y a pas de tweet, on est dans un moment de flottement. Là c’est un peu la spéculation parce que je ne sais pas ce qui a pu se passer”, a-t-on pu entendre sur iTélé.»

A CNN, «la chaîne du live» par excellence, les animateurs de la matinale sont branchés en permanence sur le réseau social aux 140 signes. Même lorsqu’ils présentent les informations. Face à la caméra, ils pianotent sur le clavier d’un ordinateur portable disposé devant eux, consultent des tweets, et y répondent.

  • Questions autour de la diffusion d’images filmées dans un tribunal

En France, il est interdit – sauf autorisation spéciale comme pour le documentaire de Raymond Depardon sur la 10e chambre, ou certains grands procès «historiques» – de filmer les audiences en vertu de l’article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui stipule que, «dès l’ouverture de l’audience des juridictions administratives ou judiciaires, l’emploi de tout appareil permettant d’enregistrer, de fixer ou de transmettre la parole ou l’image est interdit».

Mais aux Etats-Unis, c’est permis – avec 15 minutes de différé. Les juges américains n’autorisent souvent qu’une seule caméra dans la salle d’audience, mais ils l’autorisent. Dans ce cas, les médias intéressés par ces images se constituent alors en «pool» et désignent la chaîne qui fera office de «pool caméra» pour l’événement, c’est-à-dire qu’elle filmera pour le compte de tous les autres les images, et les redistribuera à tous ceux qui les ont demandées. C’est ce qu’il s’est passé lors de l’audience du 6 juin, lorsque DSK a plaidé «non coupable». Et cette fois, c’était CNN qui filmait.

Que faire, quand on est une télévision française bardée de l’interdiction de filmer les procès, et que l’on voit les images filmées par CNN débarquer sur les sites d’infos français, sur les réseaux sociaux, bref, n’importe où sur le Web en un clic? Se mettre des oeillères pour respecter la loi? Ou prendre le risque de les diffuser, au nom du «droit» d’informer? «Il est impossible de cacher des images librement diffusées sur les télévisions du monde entier, a expliqué au Figaro Guillaume Dubois, directeur de l’information de BFM TV. À l’heure de l’audiovisuel planétaire, la notion de frontières médiatiques n’a plus de sens.»

Pour l’instant, cet article de loi n’a été modifié que pour faire apparaître le montant de l’amende en euros plutôt qu’en francs. Mais il y des autorisations spéciales qui se demandent, et s’obtiennent, comme cela vient d’être le cas pour le procès en appel d’AZF.

  • Première plainte pour diffamation contre un tweet français

Le 1er juin, Lepoint.fr annonce que Ramzi Khiroun, ex-conseiller de DSK, va déposer plusieurs plaintes pour diffamation, dont l’une contre Arnaud Dassier, actionnaire du site Atlantico, «en raison d’un message publié sur le réseau Twitter le 14 mai» sur les activités de Khiroun.

Aux Etats-Unis, des plaintes nées d’un tweet, il y en a déjà eu. Pour la chanteuse Courtney Love, qui a insulté une styliste sur Twitter, l’affaire s’est soldée par le versement de 430.000 dollars (300.550 euros), un accord trouvé afin d’éviter le procès.

Qu’avez-vous retenu, médiatiquement parlant, de l’affaire DSK?
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Alice Antheaume

(1) Au palmarès de Twitter, prem’s sur son rôle d’alerte, on se souvient aussi d’un autre scoop historique, fait en 140 signes, en janvier 2009, lors de l’amerrissage miracle d’un avion sur l’Hudson, à New York. Le premier à évoquer l’accident est un citoyen américain, qui s’appelle Janis Krums. Présent à bord d’un ferry juste à côté de l’endroit où vient d’échouer l’avion, il publie aussitôt sur Twitter une photo de la scène en la qualifiant de «crazy». Première photo disponible sur cet événement, celle-ci est immédiatement reprise dans les médias du monde entier.

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Le faux tweet de trop

W.I.P. demande à des invités de donner leur point de vue. Ici, Cécile Dehesdin, journaliste à Slate.fr, diplômée du double diplôme Columbia/Ecole de journalisme de Sciences Po.

Fin août, un éditorialiste sportif du Washington Post tweete le nombre de matchs de suspension d’une star de football américain. Problème, ses informations sont non seulement fausses, mais il le sait: Mike Wise (dont le pseudo sur Twitter est @MikeWiseguy, jeu de mot sur son nom et l’expression «petit malin») a décidé d’écrire un faux tweet pour prouver que, dans ce détestable monde de l’Internet mondial et des réseaux sociaux, les médias sont prêts à écrire n’importe quoi sans vérifier leurs sources.

Crédit: DR

Crédit: DR

Plusieurs publications spécialisées ont repris l’annonce des matchs de suspension, en l’attribuant au journaliste et en précisant que la NFL (National Football League) n’avait fait aucune annonce officielle, mais sans vérifier plus avant l’information. Dans l’heure et demie qui a suivi, toujours dans la journée du 30 août, Mike Wise ajoute «Je ne peux pas révéler mes sources», «Ok, ok, c’était une croupière du casino de Lake Tahoe», avant d’écrire deux autres tweets annonçant des transferts sportifs dans le même style que le premier. Cette vague tentative pour montrer que sa première déclaration était une blague n’a pas suffi: Mike Wise a été suspendu pendant un mois de ses fonctions au Washington Post.

C’est que les médias ne blaguent pas avec les médias sociaux. Aux Etats-Unis, plusieurs organisations ont installé une personne sur un poste spécialement dédié au sujet, comme le New York Times et sa «social media editor» par exemple. En outre, presque tous les médias américains ont des règles écrites sur l’utilisation de blogs, Facebook ou Twitter par les journalistes. Reuters aussi, et sa charte a été détaillée ici.

Au Washington Post, l’après-midi même après la publication du faux tweet, le chef de la rubrique sport a d’ailleurs renvoyé à tous ses employés une note formelle qui précise les règles d’utilisation des réseaux sociaux:

«[Les règles sur les médias sociaux] s’appliquent à tout le monde, y compris les reporters, les chefs de rubrique et les éditorialistes de la rubrique sport. Quand vous utilisez un média social, rappelez-vous que vous représentez le Washington Post, même si vous utilisez votre propre compte. Ceci n’est pas à prendre à la légère. Les standards que nous appliquons au journal, sur le site, sur la version mobile ou sur n’importe quelle autre plateforme s’appliquent au monde des médias sociaux. Plus fondamentalement, nous devons être exacts. Nous devons être transparents. Et nous devons être justes.»

Paradoxal? Cette histoire a eu lieu alors que le Washington Post est, à ma connaissance, le seul journal à avoir un «social media editor» entièrement dédié à sa rubrique sport! J’avais interviewé Cindy Boren, la «sports social media editor» du quotidien, avant de partir de New York.

Dans cet entretien, Cindy Boren disait avoir eu du mal à convaincre ses collègues de se mettre aux réseaux sociaux, et se rémémorait la période où elle passait de bureau en bureau, harcelant les journalistes pour qu’ils suivent son nouveau compte sur Twitter, cherchant à les convaincre de l’intérêt de l’outil: «Si vous vous faites un réseau et que vous suivez les sources clés dont vous avez besoin, vous avez moins de chance de vous faire voler un scoop», expliquait-elle, prenant comme exemple le récent tweet d’un follower alertant le service sport de la présence d’un joueur de football américain dans un avion. «Ça aurait pu être le signe d’un transfert. En fait il s’est avéré qu’il s’agissait juste des vacances, mais c’était bien de pouvoir faire vérifier cette info à notre journaliste».

Elle aussi appuyait sur l’importance de vérifier ses sources. Et insistait encore et encore, arguant que son staff laissait des dizaines de tweets de côté «parce que nos reporters nous disent qu’ils ne sont pas avérés».

Plus tard, dans un pseudo tweet d’excuse, effacé depuis, Mike Wise écrit: «Au final, ça a prouvé deux choses 1. J’avais raison en disant que personne ne vérifie les faits ou les sources et 2. Je suis un idiot. Mes excuses à tous ceux impliqués».

Mais pour les blogueurs, du Washington Post comme d’ailleurs, Mike Wise n’a rien prouvé sur les réseaux sociaux et le journalisme avec son faux tweet. Oui, dit l’un d’eux, dénommé Michael David Smith, quand un journaliste sort un scoop, les autres médias le relaient en le citant. «Mais il a tort: tout ceux qui ont diffusé son tweet l’ont correctement sourcé en l’attribuant à Mike Wise du Washington Post. Simplement, nous ignorions que cette source était si peu fiable».

Cécile Dehesdin

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Liens du jour #6

Le journalisme des grands sujets internationaux peut-il survivre? (Charlie Beckett’s blog)

Les rédactions Web cherchent des journalistes avec une “expertise qui évolue” quand les rédactions traditionnelles recrutent des personnes aux “compétences techniques solides” (Hot topics in journalism and mass communication)

Le parcours d’un tweet en images (Next generation online)

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