Au théâtre du Châtelet, Jeanne Crousaud est la fée qui donne sa voix au Petit Prince. Le chef d’œuvre de Saint Excupéry fête cette année les 70 ans de sa parution en France.
On a tous dans le cœur un Petit Prince qui rit dans les étoiles, et forcément, tenter de mettre de la musique, autour des mots que tous, nous connaissons par cœur, relève de la gajeure. Courageux, et rêveur, le compositeur et pianiste Michael Levinas a relevé le défi de cette adaptation. Fidèle au texte, il a cherché plus de deux ans la voix qui pourrait incarner l’éternel héros qui nous a appris à comprendre les renards et à aimer les roses. En novembre 2013, il a rencontré Jeanne Crousaud, pas même vingt ans, dans les couloirs du Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris où elle étudiait avec Malcolm Walker. Ensemble, ils ont donné chair au petit bonhomme de Saint-Ex. Avec ses yeux de chats, cette Bretonne du Sud, – elle est née à Nîmes, mais a vécu toutes ses années d’enfance à Brest, avant de passer à Toulouse son adolescence – semble échappée de la forêt de Brocéliande, même si elle aligne déjà un solide bagage artisique de violon, piano et de danse.
Michaël Leviné lui a dessiné un rôle sur mesure, avec ses aigus perchés et ce rire cristallin qui fait scintiller les étoiles. Jeanne aussi a mis du sien pour gommer ce qui dans sa voix pourrait sembler trop incarné, trop féminin, oublier quelques temps la sensualité du vibrato pour mieux habiter le costume vert, son écharpe jaune et ses cheveux blonds comme les blés. Avec sa douceur pure et sincère, dans la mise en scène onirique de Lilo Baur, accompagnée par l’aviateur, le renard, la rose, le serpent, elle nous fait aimer deux fois plus ce Petit Prince, joueur, un peu têtu parfois, enfantin, vivant, si vivant, dont la voix résonne en nous, à chaque instant. « Cette nuit… tu sais… »
Le Petit Prince de Michaël Levinas au Théâtre du Châtelet à Paris, orchestre de Picardie dirigé par Julian Crouch, jusqu’au 12 février.