Mon chat aura bien la grippe cet hiver !
Prémonition ou simple règle statistique journalistique non écrite ? Il y a un mois nous traitions dans cet espace des premières démonstrations du possible passage du H1N1pdm à d’autres espèces mammifères ; avec, sans preuve, ce titre interrogatif (soufflé par Antoine Flahault) : « Mon chat aura-t-il la grippe cet hiver ? »(Slate.fr du 4 novembre). Quelques heures plus tard, magie du Blog, l’une de nos lectrices, Anne nous adresse un commentaire : elle avait mieux vu venir la menace que nous. « Titre prémonitoire ? nous demandait-elle. Vu qu’un chat a attrapé la grippe A en IOWA, ainsi suffirait-il donc d’écrire pour, parfois être entendu sinon exaucé ?
Un mois plus tard. Et en France le Pr Didier Houssin, délégué interministériel en charge de la lutte contre la pandémie, par ailleurs directeur général de la santé, vient de prendre solennellement la parole sur ce thème –celui du chat domestique – lors d’une conférence de presse. Pour nous dire qu’un chat a, en France, été retrouvé grippé dans une famille dont plusieurs des membres l’étaient également. Et il ne fait plus aucun doute que le dénominateur infectieux commun est le H1N1pdm. L’affaire, qui aurait fort réjoui Delphine, Marinette et Marcel Aymé, ne se passe pas dans une ferme du lointain Jura neigeux mais dans l’anormale douceur du département des Bouches-du-Rhône.
Que nous dit sur ce sujet le Pr Houssin ? Le strict minimum, comme à son habitude. En substance que le vétérinaire zélé (absence de carte vitale animale et de prise en charge collective des soins, ils le sont presque tous, animaux de rente ou animaux domestiques) a constaté que ce félin d’appartement souffrait d’une broncho-pneumopathie avant de poser le diagnostic de grippe. Sans crainte d’être un jour poursuivi pour exercice illégal de la médecine il a fait en sorte que les investigations se poursuivent ; ce qui a permis de faire le lien virologique entre les cas humains et le cas félin. « Il y a déjà eu plusieurs observations de ce type à l’étranger dans des élevages porcins ainsi que chez des chiens, en Chine tout récemment, et puis un chat aux Etats-Unis, a expliqué le Pr Houssin. La meilleure manière d’éviter cela est que les personnes qui ont des animaux domestiques se fassent vacciner. »
L’affaire n’ayant rien semble-t-il de dramatique on osera ici même, au nom de tous les amoureux de chats, d’interroger le Pr Houssin ; en espérant qu’il puisse nous répondre avant la fin de l’hiver. Si ses propos ont été fidèlement retranscrits et diffusés (mais comment en douter ?) par l’Agence France Presse le directeur général de la santé assimile les porcs d’élevage aux chiens et aux chats domestiques. Et toujours sous l’hypothèse d’une retranscription fidèle il conseille la vaccination des personnes vivant à proximité de leurs animaux domestiques « pour éviter cela ». Mais, osons lui dire que le bât blesse, pour éviter quoi, précisément ? La contamination de son chat par son « maître » ou la contamination inverse ?
On perçoit d’emblée le labyrinthe interrogatif. A commencer par cette question qui tombe sous le sens : faudrait-il aussi se faire vacciner pour que son chat de soit pas contaminé ; contamination qui pourrait ensuite se transmettre, par voie de gouttières, aux autres félins, siamois ou pas, ainsi qu’à leurs « maîtres » ? Existe-t-il d’ailleurs un vaccin pour chats et chiens ou peut-on postuler que le vaccin protecteur dans l’espèce humaine l’est aussi chez ces animaux domestiques ? Une fraction des surplus de nos stocks nationaux pourrait-elle être utilisée à des fins vétérinaires ?
On sait que les chats ne sont pas les seuls animaux proches de l’homme a pouvoir être les victimes du H1N1pdm. Il y a un mois Promed, remarquable site communautaire spécialisé dans la surveillance planétaire des maladies infectieuses nous avait appris qu’au Nebraska un certain “Stormy” vient de succomber à l’infection par le virus H1N1pdm. Il s’agissait de l’un des quatre furets « de compagnie » appartenant à une famille dont l’un des membres était lui-même infecté par le même virus. Et les experts cités par Promed d’expliquer ne pas avoir d’éléments pour penser que les chiens et les chats étaient à ranger dans la même catégorie que les furets, ces cousins proches du putois, chiens et chats semblant en effet n’être sensibles qu’ à des virus grippaux qui leur sont spécifiques.
Tel n’est plus le cas. Vaccination préconisée, donc, pour les propriétaires mais aussi (pourquoi le Pr Houssin a-t-il omis de le mentionner ?) respect accru de l’hygiène (lavage des mains et des bols, voire mise en quarantaine) dans tous leurs rapports avec les animaux vivants avec eux sous le même toit. Et alerte de l’ensemble des vétérinaires avec une mention toute particulière pour les dindes et les porcs d’élevage ainsi que pour les « cochons de compagnie » puisqu’il est acquis que de tels porcs existent. Peut d’ores et déjà annoncer que cette liste des cibles animales du H1N1pdm n’est pas exhaustive ? Pour l’heure une certitude : des contaminations porcines ont ces derniers temps été observées, selon Promed, au Canada, en Argentine, en Australie, à Singapour, au Royaume -Uni, en Irlande, en Norvège, au Japon, en Islande, aux Etats-Unis, à Taïwan, en Indonésie, en Finlande ainsi, ces derniers jours, qu’en Italie. A quand en France ?
Jean-Yves Nau
H1N1pdm joue au chat et au furet
On a un peu l’impression que tout devient argument marketing aujourd’hui pour « vendre » la vaccination au bon peuple. Que m’importe que mon chat attrape la grippe pandémique ! C’est une « non information » qui aurait pu rester tapie au fond de sa litière. Bien sûr, il survient des cas de transmission du virus pandémique aux animaux de compagnie, en contact étroit avec les hommes. Il y en a probablement beaucoup plus à l’heure où nous écrivons ces lignes que de cas rapportés dans le monde, et probablement chaque hiver aussi avec la grippe saisonnière ; et tout le monde s’en moque. Il était autrement plus grave pour un homme d’être contaminé par les volailles vivantes infectées par le virus H5N1. Mais l’impasse microbiologique était du même ordre : la barrière d’espèce n’autorisait pas la transmission interhumaine du H5N1. Ici la barrière d’espèce ne semble pas autoriser la transmission inter-féline de H1N1pdm. En tout cas si la mise en évidence d’une chaîne de transmission entre animaux semble avoir été faite au sein d’élevage de porcs, elle ne l’a pas été entre chats. Ce serait là une information intéressante.
Antoine Flahault
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