Émile Verhaeren s’en émouvait déjà en 1895. Boris Vian s’en moquait 50 ans plus tard. Que diront les poètes du 21ème siècle de ces villes qui ne cessent de devenir plus tentaculaires ? Il y a un siècle, on comptait 20 cités de plus d’un million d’habitants dans le monde. Elles sont aujourd’hui 450…
Lors de la conférence “Une planète sous pression” qui se tient à Londres du 26 au 29 mars 2012 et rassemble quelque 3000 participants, les experts en urbanisme estiment que, au rythme actuel, les villes occuperont 1,5 million de km2 de plus qu’aujourd’hui… dans 20 ans seulement. Ainsi, vers 2030, les zones urbaines se seront agrandies d’une surface égale à celle que couvrent la France, l’Allemagne et l’Espagne réunies. D’après les Nations Unies, la population du globe devrait passer des 7 milliards qu’elle vient de franchir à 9 milliards en 2050. Ce qui signifie une progression de 1 million d’habitants par semaine au cours de 38 prochaines années… Et la majeure partie de cette croissance se focalisera sur les centres urbains. Par ailleurs, la migration des campagnes vers les villes se poursuivra et concernera 1 milliard d’individus. La population urbaine pourrait ainsi passer de 3,5 milliards aujourd’hui à 6,3 milliards en 2050, soit 70% des habitants de la planète contre 58% actuellement.
Une telle perspective offre des opportunités considérables aux urbanistes. Surtout s’il s’agit de maîtriser cette explosion en lui conférant un caractère “durable”. C’est l’objectif de Shobhakar Dhakal, directeur du Global Carbon Project implanté à Tokyo. “La ré-ingénierie des villes est un besoin urgent pour garantir la durabilité de la planète. Les nouvelles citées ont l’avantage des derniers arrivants en termes de connaissances, de prise en compte de l’écologie et de technologies pour prendre en charge des questions fondamentales comme celles des ordures et du transport”, a-t-il déclaré.
Un meilleur urbanisme doit également viser une réduction des gaz à effet de serre émis par les villes, responsables de 70% des rejets de CO2 dans l’atmosphère. Les zones urbaines ont ainsi produit 15 milliards de tonnes de CO2 en 1990 et 25 en 2010. Elles pourraient en émettre 36,5 milliards de tonnes en 2030. Ce qui n’aidera pas à limiter le réchauffement climatique d’ici la fin du siècle. Loin de prôner la décroissance ou le recours massif au cyclisme, les experts misent sur la technologie moderne pour améliorer l’efficacité énergétique des mégapoles. Ils estiment que les embouteillages coûtent de 1 à 3% du produit intérieur brut.
Au delà de la consommation de pétrole et de la pollution engendrée par les bouchons, le temps perdu est évalué à 4,2 milliards d’heures pour les seuls Etats-Unis en 2005. Les embouteillages coûteraient ainsi pas moins de 4 milliards de dollars par an à la ville de New York. D’où l’extrême rentabilité de tous les systèmes de guidage faisant appel à l’intelligence artificielle, l’Internet des objets (badges RFID), les voitures interconnectés, les systèmes de conduite automatiques… La haute technologie doit également améliorer la santé en ville, la qualité de la vie urbaine, la lutte contre le crime… La ville tentaculaire va donc devoir devenir ultra-sophistiquée pour éviter de ressembler à un enfer d’ici quelques décennies.
Michel Alberganti
Le paradoxe dans le développement inexorable des mégapoles, c’est que malgré les technologies de communication actuellement disponibles les entreprises continuent obstinément à vouloir faire venir dans des bureaux immenses et à la même heure, leurs personnels qui sont logés de plus en plus loin de leurs bureaux.
Pour éviter les heures perdues dans les embouteillages et les déplacements inutiles, dans le tertiaire où l’usage de ses membres supérieures sert essentiellement à taper sur un clavier, on pourrait aussi développer résolument le travail à domicile et/ou les bureaux de proximités qui consistent à fournir dans les zones résidentielles des bureaux de petites tailles équipés d’infrastructures informatiques (ordinateurs, télécopieurs, imprimantes, salles de vidéoconférence et… machines à café) de sorte à amener les bureaux aux employés au lieu d’amener les employés aux bureaux.
Une grande entreprise informatique, dont le nom (de 3 lettres) commence par I et finit par M, pratique ce mode «nomade» pour certains de ces cadres depuis plus de dix ans.
On gagne des heures de transports (et de stress), on fait des économies de frais de transport (à la fois pour l’employé et pour l’entreprise), on limite les émissions de CO2, on ajoute de la flexibilité dans les horaires, on peut se libérer partiellement des décalages horaires, etc.
On perd un peu de convivialité encore que la «pause café» puisse aussi se prendre en vidéoconférence…
Il y a aussi la disparition de fait de la frontière entre la vie privée et la vie professionnelle, ce que dénonce certains syndicats mais qui n’est pas seulement le fait du nomadisme mais bien de la généralisation des smartphones et des ordinateurs portables qui rend les collaborateurs joignables en permanence.
Ce phénomène s’est véritablement généralisé ces dernières années et est amplifié par la crise chez les cadres supérieures indépendamment des possibilités évoquées ci-dessus.
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