Climato-sceptiques: “Des dentistes pratiquant la cardiologie”…

La réponse des climatologues à la tribune publiée par 16 scientifiques, dont Claude Allègre, dans le Wall Street Journal du 27 janvier 2012 ne s’est pas fait attendre. Elle est venue le 1er février 2012 dans le même journal sous le titre: “Vérifiez auprès des climatologues les opinions sur le climat”. Signée par Kevin Trenberth et 37 scientifiques spécialisés dans l’atmosphère, les océans et  le climat, ce retour de bâton est aussi bref qu’incisif. Il commence par une question: “Consultez-vous un dentiste au sujet de l’état de votre cœur?”. La tribune souligne en effet que les signataires du texte intitulé “Pas la peine de paniquer sur le réchauffement climatique”, reconnus dans leur domaine, ne sont pas des experts du climat. Les signataires de la réponse contestent l’argument des climato-sceptiques concernant l’arrêt de l’augmentation de la température au cours des dix dernières années.

“Les experts du climat savent que la tendance au réchauffement n’a pas disparu au cours de la dernière décennie. En fait, il s’agit de la décennie la plus chaude jamais enregistrée. Les observations montrent sans équivoque que la planète se réchauffe. Et les modèles mathématiques ont récemment démontré que pendant certaines périodes, lorsque l’accroissement de la température de surface ralentit, le réchauffement se produit ailleurs dans le système climatique, en particuliers dans les océans profonds”.

97% des scientifiques du climat sont d’accord

La tribune rappelle que les principales académies nationales des sciences dans le monde, dont celle des États-Unis, ainsi que les corps constitués des experts du climat ont confirmé que “la science est claire” dans ce domaine, sans citer le GIEC. “Le monde se réchauffe et les hommes en sont les principaux responsables. Les effets sont déjà apparents et vont augmenter”. D’après les signataires, 97% des scientifiques publiant des articles dans le domaine du climat confirment que le réchauffement est une réalité et qu’il est dû à l’homme. “Ce serait un acte inconscient pour tout leader politique de ne pas tenir compte du poids des preuves et d’ignorer les risques énormes que fait peser le changement climatique”, concluent-ils en soulignant le cercle vertueux que représente l’investissement dans une économie à bas carbone: “Cela évitera non seulement les pires risques du changement climatique mais conduira à des décennies de croissance économique. Juste ce que le médecin a prescrit” .

L’impact du doute sur le terrain politique

Cette réaction apparaît d’autant plus nécessaire que le réchauffement climatique ne semble plus faire recette dans le débat politique aux Etats-Unis, pourtant en pleine campagne électorale pour les présidentielles du 6 novembre 2012. Ainsi, Maxwell T. Boykoff, professeur assistant au Centre de recherche sur la politique scientifique et technologique de l’université du Colorado, à Boulder, a publié une tribune dans le Washington Post du 27 janvier 2012 intitulée: “Un dangereux glissement dans la rhétorique d’Obama sur le “changement climatique”” L’auteur y analyse la façon dont les expressions “changement climatique” et “réchauffement planétaire” sont utilisées dans les discours politiques. En particulier ceux du président Obama. Il constate ainsi que ce dernier n’a prononcé qu’une fois les mots “changement climatique” dans son dernier discours à l’Union, contre zéro fois en 2011 et 2 fois en 2010. Cette année, cette citation n’a d’ailleurs été utilisée que pour souligner  les clivages au Parlement sur cette question qui rendent improbable l’adoption d’un plan efficace de lutte contre le changement climatique. Marginaux et marginalisés dans la communauté scientifique, les climato-sceptiques semblent donc atteindre leur but sur le plan politique aux Etats-Unis. C’était justement leur objectif. Et en France ?

Michel Alberganti

Photo: Le groupe  Banque mondiale

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