Cette veille de Toussaint et avant-veille du jour des Morts est l’occasion ou jamais, pour un blog qui traite de science et d’environnement, d’évoquer l’empreinte écologique des trépassés et les manières de la réduire. Car un disparu ne l’est jamais complètement. Son enveloppe corporelle subsiste et il est en général convenable de s’en occuper. Simplement, les deux techniques les plus usuelles dans le monde pour “évacuer” le corps du défunt, l’inhumation et la crémation, sont, à cause de l’inflation démographique mondiale, de moins en moins “planéto-compatibles”. La première en raison du manque de place dans les cimetières, car les vivants occupent de plus en plus d’espace au détriment des morts. La seconde parce que brûler des cadavres, en ces temps de raréfaction des hydrocarbures et de déforestation, consomme des ressources énergétiques que l’homme utiliserait volontiers à autre chose, sans compter les émissions de gaz à effet de serre induites. Ainsi, en Inde, le rituel de la crémation brûle entre 50 et 60 millions d’arbres chaque année et envoie 8 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère. Autre problème de l’incinération, le relargage dans l’environnement de produits toxiques, dont le plus commun est le mercure contenu dans les amalgames dentaires.
Pour tenter de réduire l’empreinte écologique des morts, il n’est pas question de revenir à la momification, même si l’expérience vient d’être récemment tentée sur la dépouille d’un chauffeur de taxi britannique, mais plutôt d’utiliser deux technologies qui redonnent du sens à ce très célèbre extrait de la Bible : “Car tu es poussière et tu retourneras à la poussière.” Le premier de ces deux moyens inventés pour rendre les corps à la terre porte le nom d’aquamation mais les chimistes lui préfèreront celui d’hydrolyse alcaline. L’idée consiste à immerger le corps dans une eau très chaude contenant une base forte, ce qui va entraîner la dissolution des chairs en moins de trois heures. Il ne subsistera plus que des restes osseux, qui seront ensuite broyés et rendus aux familles, comme les cendres récupérées après une crémation. Plus efficace que les bains d’acide auxquels la Mafia s’est parfois adonnée pour faire disparaître des amis encombrants. On peut voir le fonctionnement des premières machines à aquamation dans la vidéo ci-dessous (en anglais).
L’aquamation nécessite sept à dix fois moins d’énergie qu’une incinération et produit également moins de gaz à effet de serre. Les métaux présents dans le corps (plombages, broches, prothèses, etc.) sont rétrouvés intacts et les fluides récupérés au terme de l’opération, stérilisés, vont directement dans le tout-à-l’égout. Evidemment, l’idée d’expédier cette soupe brune que furent les chairs d’un homme ou d’une femme dans les égouts de la ville en a fait hurler quelques-uns, sous prétexte qu’il s’agissait d’un manque de considération pour les défunts. Il faudra tout de même que ces mêmes personnes nous expliquent en quoi donner un corps à manger aux asticots est plus respectueux. Tout ce qui compte, c’est que d’affreux industriels de l’agro-alimentaire ou de la pharmacie ne mettent pas la main sur ces résidus pour en faire de la nourriture, à l’instar de ce qui se passe dans le film Soleil vert, de Richard Fleischer.
La seconde technique pour transformer les cadavres en poussière fait tout autant appel à la science. Inventée par une biologiste suédoise, elle porte le nom de promession et consiste tout d’abord à passer le corps sous un flux d’azote liquide (-196°C) afin de le solidifier, ce qui le rend aussi fragile que du cristal. Il est ensuite facile, en le soumettant à des vibrations, de le pulvériser. Les restes ainsi obtenus sont ensuite lyophilisés, afin d’en extraire toute l’eau, puis tamisés pour récupérer les métaux et versés dans un “mini-cercueil” biodégradable que la famille peut ensuite inhumer où elle le souhaite. Au bout de quelques mois, tout a disparu dans le sol. La technique est résumée dans la vidéo ci-dessous (en anglais elle aussi).
Il existe un dernier moyen pour ne pas être bien encombrant une fois passé de vie à trépas. Transformer vos cendres en un diamant. Le procédé n’est en revanche pas du tout écologique et il implique une débauche d’énergie. Tout commence par une crémation. Les cendres sont ensuite purifiées à très haute température pour ne conserver que le carbone sous forme de graphite. Pour métamorphoser ce graphite en diamant (qui est une cristal de carbone particulier), il faut enfin le soumettre à une température et à une pression dantesques. On le voit, le processus ne risque pas de s’attirer le moindre éco-label. Mais bon, porter Mamie au petit doigt, c’est d’un chic… Et puis, les diamants sont éternels, eux.
Pierre Barthélémy
Bonjour,
Voici une autre méthode présenté lors d’une conférence TED : se faire manger par les champignons qui au passage dépolluent.
http://www.ted.com/talks/lang/fre_fr/jae_rhim_lee.html
L’artiste de la vidéo ci-dessous propose une autre méthode encore plus écologique, la dégradation par champignons:
http://www.ted.com/talks/lang/eng/jae_rhim_lee.html
Le procédé permet de dégrader les polluants organiques. Par contre, je ne suis pas certain qu’il fixe les métaux lourds.
Le gros avantage, c’est qu’il n’y a aucun apport extérieur d’énergie. Mais je pense qu’il faudra revoir le design du “linceul”!
sinon il y a aussi la methode tibetaine de depecage .le probleme est de trouver un boucher pret à faire ce travail.nourrir directement les rapacesou autres charognard sur terre ou en mer. Pas tres ceremonial ni pour les ames sensibles,mais ecologiquement acceptable ,non?
http://www.youtube.com/watch?v=b6hSK8CluxQ
En réponse à la phrase “Il faudra tout de même que ces mêmes personnes nous expliquent en quoi donner un corps à manger aux asticots est plus respectueux.”
Voici plusieurs éléments qui me viennent à l’esprit :
– le lieu : entre le tout à l’égout et le choix d’un cimetière, espace de nature au sein des villes, l’un est tout de même plus respectueux
– la possibilité de se recueillir : dans l’aquamation ce qui est remis aux familles ne sont que les os broyés contrairement aux méthodes plus classiques (je sens la réponse facile pour la crémation mais il s’agit des cendres de la totalité du défunt et non pas de ce qui ne passe pas dans les tuyaux…)
– l’aspect industriel : avec l’aquamation on expédie la corps en très peu de temps, l’enterrement laisse faire le cycle de la nature (même si le défunt est mangé par les astictots, on ne trempe pas le cadavre dans un amas d’asticots dopés pour qu’ils mangent tout en quelques heures)
– la symbolique : “reposer dans la terre de ces ancêtres” (enterrement), “s’élever vers les cieux” (crémation)
Voilà quelques éléments, je tiens à préciser que je ne suis pas religieux et plutôt écolo mais pour autant je pense qu’il faut concilier l’écologie avec l’aspect humain ne se réduisant pas qu’aux aspects organiques mais aussi culturels, psychologiques, sociaux.
D’autres solutions existent pour réduire l’impact écologique des défunts, pour l’enterrement je pense notamment aux simples linceuls préférables aux épais cercueils qui ralentissent la décomposition.
@Caduke :
Je ne vois vraiment pas en quoi livrer le corps d’un mort à la décomposition et à la putréfaction est vraiment plus respectueux et propre que les techniques décrites ici ou que la crémation. Quant à votre préchi-précha spiritico-religieux sur la valeur du recueillement et la symbolique de l’inhumation, il est un peu daté. La seule place authentique des défunts, c’est dans le coeur de ceux qui leur survivent. Le reste n’est que du matériel.
Allez passer quelque temps dans un cimetière, et vous verrez que ce n’est pas vraiment l’espace bucolique dont vous rêvez : le manque de place oblige les services municipaux à déterrer régulièrement les corps, dont certains n’ont pas eu le temps de se décomposer, et à entreposer les restes dans des ossuaires. C’est assez gore. Quant à la crémation, il n’y a aucune raison pour qu’elle restitue plus de matériel que les techniques décrites dans cet article. Et rien ne vous empêche de disperser la poudre issue de l’aquamation tout comme on disperse les cendres des incinérés.
Je vois surtout dans votre commentaire un vieux fond de conscience judéo-chrétienne, qui rappelle diablement le très mauvais accueil fait en Occident à la crémation en son temps. C’était considéré comme une hérésie et un outrage aux morts…
[…] Mort : les alternatives à l’inhumation et à la crémation Cette veille de Toussaint et avant-veille du jour des Morts est l'occasion ou jamais, pour un blog qui traite de science et d'environnement, d'évoquer l'empreinte écologique des trépassés et les manières de la réduire. Source: blog.slate.fr […]
J’aurais souhaité être traité post mortem comme le faisaient jadis certaines tribus indiennes d’Amérique du Nord, qui exposaient leurs morts, sur leur 31, allongés sur des claies fixées en haut de piquets et les laissaient ainsi sur leur terrain de chasse jusqu’à leur recyclage en plein air.
Dépité de ne pas avoir l’autorisation de disparaitre ainsi sur mon propre terrain de chasse, et pour le coup, décidé de faire avec ce temps, j’ai envisagé avec enthousiasme de savoir mes restes expédiés dans la fournaise solaire par une fusée ad hoc. J’ y renonce de mauvaise grâce faute d’avoir les moyens nécessaires.
A défaut, Je serais donc l’objet d’une banale et peu écologique crémation avec dispersion des cendres, l’idée de reposer dans un cimetière moderne hideux genre HLM sur mort dans un coin, et tombes “mon rêve” dans un autre, ne me revenant pas.. De plus, je refuse catégoriquement d’aller dans un endroit interdit aux chiens..
Mais j’aurai enfin ma revanche dans quelques milliards d’années quand les soleil se dilatera. Suffit d’attendre.
Et faire don de son corps à la science?
Moi,ça me conviendrait: les toubibs m’ont tellement enquiquinés toute ma vie, que j’apprécierais de le faire moi aussi après ma mort….
[…] La mort, problème écologique, problème politique […]
[…] – Quite à inover dans ce domaine, pourquoi ne pas rechercher la façon la plus écologique de se débarrasser des défunts ? C’est sur Salte.fr […]
@Christiane
Le don à la science n’est qu’une étape temporaire. Lorsque le corps a servi à la science, il faut s’en “débarrasser” de la même façon.
Mais le don à la science est essentiel, car rien ne remplace un véritable corps humain pour la formation de chirurgiens qui sauveront des vies.
J’aime bien la vidéo de Promession, ça me fait immanquablement penser à “La mort est mon métier” de Robert Merle…
Ceux qui disent que le Troisième Reich a gagné la guerre auraient-ils finalement raison?
J’ajoute que la meilleure façon de ne pas laisser “d’empreinte carbone” sur notre pauvre petite planète qui a vraiment attendu les pseudo-écologistes avant d’apprendre à vivre, c’est de ne pas vivre et de ne pas naître.
Ah, culture de la mort, quand tu nous tiens!
Etant contre la décomposition des corps (oui, je pense à ma famille défunte), j’étais plutôt pour la crémation. Si maintenant je dois penser aussi à mon empreinte carbone post-mortem, je suis damné à vie ! Refroidi, oui, brulé, non plus…!J’ai décidé d’attendre avant de mourir que l’on me propose une bonne solution.
L’autre problème de la crémation et surtout de ce qui est rejeté dans l’air ce sont les produits de conservation injectés dans le corps, en particulier le formaldéhyde.
Mais qu’arrivera-t’il aux embaumeurs alors ?
Nessuno ricorda il funerale in mare. Mi sembra la soluzione più naturale, almeno per le popolazioni non troppo lontane dalle coste. Per le altre si potrebbero organizzare “crociere” dei defunti.