Trop noirs pour être politiquement correct aux Etats-Unis

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Aux Etats-Unis, les Schtroumpfs noirs sont devenus violets.

Regardez bien ces deux couvertures:

(L’édition française des Schtroumpfs noirs, publiée en 1963)


(L’édition américaine, publiée en 2010)

Les Schtroumpfs noirs sont ainsi devenus violets. Dans l’histoire originale, un Schtroumpf se fait piquer par une mouche Bzzz inconnue et devient fou, se transforme en noir et attaque ses adversaires de manière féroce, en grommelant Gnap, Gnap. Mais devenir noir avait été jugé trop politiquement incorrect aux Etats-Unis et cet album est le seul qui n’avait jamais été traduit – jusqu’à aujourd’hui – quand les petits hommes bleus eurent du succès outre-atlantique dans les années 80. Aujourd’hui, la BD est suffisamment connue aux US pour que des séries comme Family Guy la caricaturent.

Déjà, dans le dessin-animé, ils étaient devenus violets.

La censure ou les petites adaptations pour plaire aux sensibilités de chacun sont courantes en BD, comme je l’avais déjà expliqué dans un article en septembre dernier. Tintin au Congo revient ainsi régulièrement dans l’actualité suite à des critiques récurrentes de telles ou telles institutions.

Nous ne sommes pas dans la tête de Peyo, impossible de savoir si, à l’époque, il avait une vision raciste. Cela m’étonnerait fortement. Après, que les Stchtrompfs deviennent noirs ou violets, cela ne change pas grand-chose à l’histoire donc ce n’est pas très grave.

Mais,  qu’on le veuille ou non, politiquement correct ou pas, le noir reste souvent associé, dans une phase de transformation, à la couleur du mal dans la civilisation occidentale. Peyo n’est donc sans doute pas plus raciste que les scénaristes de Spiderman 3 où le double maléfique de Peter Parker est aussi noir (il aurait très bien pu être d’une autre couleur).

Ou que George Lucas qui revête Dark Vador tout de noir alors qu’Anakin était en blanc (et blond)


Ou que Tolkien qui transforme les rois humains en infâmes créatures noires au contact de l’anneau (bon, pour lui, c’est limite…).

Pourtant personne n’a demandé à ces Américains de changer la couleur de leurs méchants. Après, et je m’étais déjà fait la remarque, Peyo, à l’époque, aurait mieux fait de transformer ses Schtroumpfs non pas en noir mais en brun.  C’est aussi associé au mal en ayant l’avantage de ne pas faire penser à une couleur de peau comme “noir”.  Et comme les petits bleus sont communistes, la transformation en brun aurait permis de développer un parallèle avec la lutte entre le fascisme et le socialisme. Avec cette dimension politique, cela serait sans doute devenu le meilleur album des Schtroumpfs.

Laureline Karaboudjan

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