Quand je bullais en vacances…

luciano

Je me souviens. Il fut un temps, j’avais des vacances. Souvent même, parfois à ne plus trop savoir qu’en faire. Aujourd’hui, je n’ai plus que des week-ends. En plus, l’été, le petit monde de la bédé se met aussi à ronronner doucement. Il n’y a guère beaucoup de sorties (en attendant le grand raout de la rentrée littéraire) et les meilleures ventes sont probablement les pauvres éditions estivales d’Achille Talon dans les stations services. C’est aussi l’époque où l’on trouve des bédés dans les journaux, qu’on peut lire sur les transats. Alors quand le soleil d’août pointe ses rayons par la fenêtre et vient frapper les toits de zinc gris de la capitale, je me plais à me rappeler cette époque bénie.

A chaque fois que les beaux jours réapparaissaient, on se préparait pour le grand départ avec mon cousin Lucien (qui aujourd’hui a bien grandi). J’ai des souvenirs émus, étant gamine, de la galère pour se préparer à temps avec mon oncle et ma tante lorsqu’on devait quitter Malakoff. Le père qui s’énerve, la petite soeur qui braille, le frère les doigts dans le nez et la mère débordée. D’ailleurs, les vacances avec Lucien et ses copains, j’en ai passées un paquet et y’a toujours un truc qui déconnait. Il y a la fois où on est allés avec Nanard se mettre au vert: le confort était tout relatif. J’aurais du m’en douter aussi, Nanard c’est un hippie qui fait du fromage de chèvres en Ardèche. Y’a aussi la fois où on a voulu aller à un rassemblement de motards: l’ami Ricky s’en souviendra, je pense.

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D’ailleurs, ça me rappelle un peu les vacances avec mes autres cousins motards du Joe Bar Team. Là c’était bien la galère. Joe, le patron du bar, partait en van avec Josie, la serveuse -que moi j’ai toujours trouvé un peu vulgaire. Les autres suivaient en moto. Parfois je montais derrière Ed la poignée ou Joe l’Arsouille. Je n’ai jamais vraiment eu confiance en Pépé ou pire, dans les petits jeunes, Jéjé l’Aspi, Paulo les Gaz, Pierrot la Fouine. Plusieurs fois évidemment, j’ai cru mourir. Pourtant on n’allait rarement à plus de 180km/h. Mes parents leur avait fait promettre de ne pas dépasser les limites. Alors il y en a un qui se dévouait pour me prendre à l’arrière et les autres partaient loin devant. Pendant tout le trajet, je l’entendais grommeler «moyenne en baisse», «honte», «conduite de femme». Après, entre ceux dans le ravin et ceux en grande discussion avec la gendarmerie, on arrivait toujours premier.

Finalement, avec la famille de Lucien, on arrivait aussi à partir. Les longs trajets en voiture, la petite soeur qui braille à l’arrière, l’autoroute qui bouchonne, là encore, c’est Lucien qui raconte ça le mieux. A vrai dire, il ne doit pas y avoir une bande dessinée de Frank Margerin où il n’est pas question, à un moment ou à un autre, de départ en vacances ou de week-end pluvieux en Bretagne. Après des heures de route, c’est enfin la plage ! Evidemment, quand j’étais avec Lucien, la plage, c‘était encore la galère. Je crois que la poisse lui colle à la banane à Lucien. Je vous passe aussi tous les plans foireux que j’ai essuyés avec mon pote Gaston. A la plage, je préférais aller retrouver le Petit Spirou, avec qui on s’amusait bien.
On en a passé du temps sur la plage. J’aimais bien quand on s’asseyait sur la plage et qu’on regardait les filles se faire déshabiller par les vagues. Je trouvais ça rigolo, même si je comprenais pas pourquoi Spirou était tout excité. On s’amusait a creuser des tunnels dans la dune, parfois on allait trop loin et on remontait vers la surface. Une fois, on a tapé avec la pointe de notre pelle les fesses d’une grosse femme qui ressemblait à une baleine échouée. Elle a hurlé ! Qu’est-ce qu’on a dû courir vite après! Quand Spirou passait du temps avec Vertignasse à dessiner des sirènes toutes nues sur la plage, là, je m’ennuyais un peu. Je préférais faire des balades avec le prêtre. En théorie nous partions toujours aux champignons mais on finissait toujours par tomber sur un camp de naturistes. Je crois que, dans le fond, il le faisait exprès. Le problème c’est quand Suzette arrivait. Là, le petit Spirou m’oubliait complètement, j’étais jalouse. Cédric, lui aussi, ne voulait pas me regarder, trop occupé par Chen.

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Quand ils partaient tous les deux se bécoter, je me retrouvais à devoir attendre au bord de la mer avec tonton Charles et tata Yvonne. Bon c’est vrai tonton Charles radotait un peu mais quand même, il était tellement amusant quand il essayait de draguer les jolies filles. Il en avait des bonnes histoires, malgré sa tendance à se comparer avec Napoléon et Vercingétorix et à vouloir voler comme les mouettes. Et, je dois l’avouer, j’adorais mettre du sable dans le chapeau de son pusillanime petit greffier, Lebornec. Titeuf, obsédé comme à son habitude, s’amusait, lui, à renouer les lacets des jeunes femmes.

Mes parents avaient plutôt de l’argent, alors il m’envoyaient parfois aussi à l’étranger, au Japon, chez une vieille grande tante éloignée. Elle avait une pension dans la banlieue de Tokyo, l’hôtel Hinata. Là chaque année je retrouvais toutes mes copines japonaises: Naru , Su, Motoko, Shinobu. On mangeait des Lamens, on riait très fort. Je ne comprenais pas pourquoi elles voulaient toutes sortir avec Keitaro qui n’était pas très beau et pas très intelligent. En plus personne ne faisait jamais l’amour – cette question commençait à me titiller – et c’était dommage.

Maintenant que je suis plus grande, l’amour, ça va, mais les vacances insouciantes me manquent tellement…

Laureline Karaboudjan

Dans cette article je cite:

Lucien de Franck Margerin
Joe Bar Team de Bar2 et Fane
Le Petit Spirou de Tome, Janry, Bruno Gazzotti, Dan Verlinden
Cédric de Raoul Cauvin et Laudec
Gaston de Franquin
Titeuf de Zep
De Gaulle à la Plage de Jean-Yves Ferri
Love Hina de Ken Akamatsu

Et vous, avec qui aimez-vous buller en vacances?

(Image de Une: Lucien, Bananes Métalliques, Editions les humanoïdes associés

Illustration: Joe Bar Team, Editions Vent d’ouest et De Gaulle à la plage, Collection Poisson pilote)

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