Quand la censure chinoise s’exporte


C’est promis, on ne rira plus du «made in China». Mercredi, plusieurs témoignages (ici et ) nous apprennent qu’au Chili et aux Etats-Unis, des utilisateurs se sont vus refuser l’accès à Facebook, Twitter ou Youtube… par la censure chinoise. Présenté comme tel, on pourrait croire que l’espace de quelques heures, la «grande muraille» de l’internet est devenue poreuse, dans le mauvais sens. C’est aussi la preuve que les filtres sont au mieux inopérants, au pire dangereux.

Au sein de la vaste communauté des internautes, l’inanité d’une régulation du web à l’échelle nationale ne fait pas encore consensus. Mais ceux qui connaissent les rudiments de l’internet, son mode d’emploi, savent à quel point il occasionne des dommages collatéraux, sans offrir de garanties. Des associations l’ont écrit, des journalistes aussi, et je m’en suis déjà fait l’écho sur ce blog.

Les mystères du routage

Alors, que s’est-il passé le 26 mars, l’espace de quelques heures? Sans rentrer dans des considérations techniques pas forcément intelligibles, le routage du Net est plus dicté par l’économie du transit que par la géographie. Le blog de Renesys l’explique très bien, une entreprise A peut tout à fait échanger de la bande passante avec une entreprise B, dans le but avoué de réaliser des économies. Parfois, l’entreprise B est également l’administrateur du système. C’est notamment le cas de China Telecom, l’un des principaux fournisseurs d’accès du pays, qui échange du flux avec 100 autres boîtes.

Pour l’heure, les experts en sécurité n’ont pas réussi à déterminer s’il s’agissait d’une mauvaise manipulation ou si la responsabilité d’un tiers – un hacker, pour faire simple – était engagée. En 2008, alors que le Pakistan venait de bloquer Youtube pour «blasphème», un acte de malveillance l’avait rendu inaccessible aux internautes du monde entier pendant quelques minutes.

Si le mode opératoire de l’incident chinois reste flou, les leçons à tirer sont claires: il rappelle à quel point le web est global, et combien les lois de régulation votées en Australie ou discutées chez nous sont vouées à l’échec. Dans la jungle du web, nouveau champ de course du progrès technique, il y a toujours des esprits plus malins que celui du législateur.

Olivier Tesquet

Photo: la Grande Muraille de Chine / Flickr CC Francesco Diez

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