De l’importance des couleurs dans nos assiettes

Le lien entre la couleur d’un plat ou d’un aliment et les saveurs perçues pourrait être bien plus fort que l’on ne le croit, explique Amy Fleming dans un intéressant article du Guardian.

La perception des saveurs est clairement associée aux papilles et à l’odorat. La texture, la température, le toucher ont aussi un rôle. Mais on mange aussi clairement avec les yeux.

Pour Charles Spence, psychologue expérimental à Oxford, la vision est même plus importante que le goût et l’odeur dans la perception d’un plat. Donc, «la couleur d’un plat ou d’une boisson peut non seulement déterminer si ce plat est appétissant, mais aussi influencer sur la saveur ressentie».

Des couleurs préférées ?

On dit souvent que les humains ont une aversion intrinsèque à la nourriture bleue car elle est très rare dans la nature. Mais alors pourquoi les M&M’s bleus ont tant de succès? Autre théorie souvent entendue, nous serions attirés par la nourriture rouge, signe de maturité, de douceur, de calories…

Mais pour Chris Lukehurst, directeur de recherche à la «Marketing Clinic», pas d’aversion ou d’attirance innée: le lien entre couleur et appétit est «directement lié à l’expérience, aux attentes, aux associations, aux normes culturelles et aux modes».

Par exemple, pensez à de la nourriture verte. Il vous vient à l’esprit des images fraîches, de la roquette, du cresson, du concombre ou des fruits acides… «Mais si je vous parle de viande verte, votre estomac se retourne probablement» explique-t-il au Guardian.

Un steak coloré en bleu aura le même effet, même si vous savez qu’il est parfaitement sûr. Si vous faites manger de la viande artificiellement bleue à des gens dans l’obscurité, puis que vous allumez les lumières, beaucoup vont se sentir mal: «Tel est l’effet repoussant d’une couleur alimentaire complètement hors-contexte ».

Un bonbon bleu nous repoussera moins, parce qu’on a l’habitude, on sait que de toutes façons, sa couleur est artificielle, pourquoi pas du bleu, ma foi…

Les emballages aussi

Les packagings ont aussi des saveurs. «Nos cerveaux excellent pour amasser des associations et utiliser ensuite des raccourcis. Quand une couleur nous fait attendre quelque chose avec un certain goût, nous allons sentir ce que nous attendons sauf si c’est scandaleusement différent» dit Spence. Il a ainsi trompé des gens en permutant le contenu et l’emballage de chips au vinaigre et de chips aux fromage et à l’oignon.

Autre preuve de l’importance de la couleur, la multiplication des teintes différentes de Smarties et de M&M’s serait une stratégie pour nous en faire manger plus… On se ressert plus volontiers d’un bol contenant plusieurs «espèces» de ces bonbons, que d’un bol contenant uniquement des bonbons de notre couleur préférée.

Rouge ou blanc?

Dans le cas du vin, la couleur est essentielle pour évaluer un vin, son âge, sa fraîcheur. Mais elle affecte aussi la manière dont les buveurs perçoivent le bouquet d’un vin.

The Guardian parle d’une étude étonnante : des étudiants en œnologie à Bordeaux ont utilisé des termes comme chicorée, charbon, prune, chocolat, tabac pour définir un vin blanc coloré en rouge (sans qu’ils ne le sachent bien sûr). Vin blanc qu’ils avaient goûté auparavant dans sa vraie couleur, et son arôme avait évoqué le miel, le citron, le litchi, la paille…

L’INRA concluait alors: “les résultats montrent que les descripteurs olfactifs choisis par les dégustateurs pour un vin ont effectivement la couleur de ce vin. Il suffit donc de modifier la couleur d’un vin pour en modifier la perception des arômes”.

Le goût des aliments que nous percevons est donc largement lié à nos autres récepteurs sensoriels, comme la vue et plus précisément la perception de la couleur. Ainsi, on peut “préférer” les M&M’s verts, même s’ils ont le même goût que les autres…

Photo: m&m’s !/ :: Suwaif :: via FlickCC License by

Un commentaire pour “De l’importance des couleurs dans nos assiettes”

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