Des millions de personnes partagent des recettes sur Pinterest, des blogs ou des sites de cuisine communautaires, comme Marmiton et consorts. Mais il y a plus d’un siècle, aux Etats-Unis, les gens partageaient leurs prouesses dans des livres de recettes communautaires, comme l’explique Npr.
Ces ouvrages étaient bien plus que des simples catalogues de bons petits plats. La plupart constituaient un moyen d’amasser des fonds pour la bonne cause ou d’exprimer des idées. Aux Etats-Unis, le premier de ces livres de cuisine de charité, A Poetical Cookbook, écrit par Maria J. Moss, a été publié en 1864 pour subventionner les frais médicaux des soldats de l’Union blessés pendant la guerre de Sécession.
En voyant le succès de l’ouvrage, d’autres organisations ont voulu utiliser des recueils de recettes pour lever des fonds: 3000 «livres de cuisine de charité» ont été publiés aux Etats-Unis entre 1864 et 1922… Les groupes religieux se servaient beaucoup de cette méthode. «Si l’Eglise avait besoin de réparer son clocher ou d’un nouveau bâtiment, on demandait aux femmes de la congrégation», explique Andrew Smith, prof d’études sur la nourriture à New York. Chacune donnait sa petite recette, et on publiait la compilation.
Mais ces livres de recettes pour lever des fonds n’étaient pas le privilège des dames d’Eglise… Npr explique qu’en 1886, un groupe de femmes du Massachusetts a vendu The Woman Suffrage Cookbook, le Livre de recettes du Suffrage des femmes, pour financer une campagne pour le droit de vote des femmes mais aussi diffuser leurs idées.
Avec des recettes équivoques comme la Mrs. Mary F. Curtiss’ Rebel soup (la soupe rebelle de Mrs. Mary F. Curtiss, aux tomates), ou la Miss M.A. Hill’s Mother’s Election Cake (le cake de l’élection de la mère de Miss M.A. Hill, au Saindoux et à la noix de muscade)… Toujours sur le même principe, chaque personne donne sa petite recette secrète, et cela donne un livre complet. Notons que la liste des contributeurs contient un seul homme.
Ces vieux livres ont inspiré un nouveau genre de littérature culinaire: des histoires de personnes et de groupes, entrelacées à des recettes. Pour Andrew Smith, ces livres de cuisine communautaires donnent «un aperçu de l’histoire qu’on ne trouve pas avec d’autres sources». Les livres de recettes qui traînent dans nos cuisines seront sans doute d’excellents témoignages historiques dans quelques siècles… Comme, plus largement, nos façons de consommer et de manger.
Photo: Timeless Books/ Lin Pernille Photography via Flickr CC License by