Avec talent, Ohko Ishida continue le métier de son père : modiste. Elle perpétue la fabrication artisanale des chapeaux et présente aujourd’hui, pour la première fois en France, son travail éminemment poétique.
Si Akio Hirata a créé son univers de haute mode au Japon il y a quelques décennies, c’est après un séjour en France où il était venu se perfectionner auprès de Jean Barthet dans les années 60. Il a réellement introduit la « haute mode » au Japon », créant tout aussi bien pour la famille impériale (les formes de « pillow box » de l’impératrice) que pour les créateurs de mode les plus importants (Comme des garçons, Issey Miyake, Yohji Yamamoto…) avec des fantaisies de formes et des réalisations techniquement de haut vol. Pour populariser le port du chapeau dans son pays, Akio Hirata avait ouvert en 1971 une école avec des cours de « modisme » (NB j’ai eu la chance de suivre sa formation en 1987-1988).
Sa fille, Ohko Ishida, continue avec brio la tradition familiale et est venue à Paris (où elle est née) exposer ses créations. Avec des noms très français, ses chapeaux font voguer l’imaginaire vers le cinéma, la littérature. Le minutieux travail avec les lanières de paille est particulièrement remarquable.
-George Méliès, « le Voyage dans la lune, 1902 se met en boule, semble flotter en apesanteur dans un ton crème en parabuntal (une paille qui n’est plus aujourd’hui produite, comme malheureusement beaucoup de matières du métier).
-La lune d’Indochine voyage vers l’Asie avec sa forme de chapeau chinois.
-Plusieurs hommages à Cristobal Balenciaga et à son sens de l’architecture dont un modèle en « rubans » suggérant la traîne d’une robe.
-Le manteau de Jean Cocteau, tout en courbes, en lin noir à effets de transparence.
-Fujiwara Teika, Homage to Camelia, du nom d’un poète japonais qui célébra la fleur, une version camélia blanc.
-Quant au chapeau rose qui ne porte pas de nom, si les Japonais le qualifient de sakura, en hommage à la couleur de la fleur du cerisier, les Français y voient un macaron. La forme et la couleur me suggèrent un autre nom : Huitre rose.
À la fin de l’exposition une sélection de chapeaux est là pour que les visiteurs les essayent, pour le plaisir.
Galerie de l’Europe. 53 Rue de Seine. Jusqu’au 7 mai.